Chapitre 11: La Forêt

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Joe avait pour habitude d'entendre les oiseaux chanter au printemps, surtout lorsqu'il se baladait en forêt, mais ici le silence était roi et glacial. Un frisson d'effroi parcourut son échine, pourquoi était-il là ?

— D'après mes calculs, nous devrions en avoir pour environ trois jours de marche avant d'arriver sur le terrain d'Adam, annonça Paul.

Les pas étaient lourds, le frottement des sacs sur les doudounes des garçons, régulier. Le soleil était bas et ses rayons traversaient avec difficulté le feuillage dru des conifères. Il était nécessaire de lever haut les genoux afin de ne pas trébucher sur de potentiels racines ou animaux étranges en tout genre.

— Tu as eu le temps de lire ton guide ? questionna Joe, au printemps ici, on risque de tomber sur quoi ?

Paul inspira, la marche et le poids du sac rendait la discussion plus difficile.

— Il y a vingt ans en tout cas, on pouvait croiser des tigres, des libex, qui sont des genres d'antilope, des ours, enfin des animaux de forêt du Nord quoi. L'hiver durait neuf mois à cette époque, tout était différent. Le réchauffement de la planète a changé tant de choses.

— Des tigres ? répéta Joe, hébété, comme s'il n'avait retenu que cette information.

— Ne t'inquiète pas, ils étaient déjà portés disparu. Il est impossible que l'on en croise un, alors que des biologistes en ont recherchés partout à travers le monde pendant cinq ans.

— Des tigres, s'enquit Joe, définitivement obsédé par le félidé.

La nuit tomba rapidement. Paul pensa, nostalgique, au confort de son lit à l'auberge. Heureusement, ils avaient eu la présence d'esprit de laisser leurs maigres affaires personnelles dans le hall, avant que l'incendie ne soit déclenché. Par la suite, ils avaient dû sacrifier quelques vieux t-shirts ou souvenirs inutiles, pour qu'elles puissent rentrer dans leurs nouveaux sacs de campings.

Joe avait dû abandonner un vieux nounours, Pépito, qu'il amenait partout avec lui depuis que, à six ans, il avait pour la première fois, passé une nuit en dehors de chez Mamita. Paul, lui, dut laisser derrière lui son œuvre favorite: Le lilas blanc, qu'il avait lu dès sa sortie en deux-mille soixante et qui ne quittait jamais son sac, même s'il le connaissait pratiquement par cœur.

— On devrait commencer à s'installer pour la nuit, déclara Henry, il va rapidement faire extrêmement froid et dans le noir, le chemin va être vraiment compliqué.

Pour Henry, ce fut plus simple, il avait pour habitude de voyager léger. Il n'avait donc aucune babiole encombrante dans ses poches. Son seul souvenir tenait dans une paume de main, la bague de sa mère. Suspendue à une chaîne en argent, elle ne quittait jamais son cou.

— Il faut que l'on trouve un terrain plat, un genre de plaine, énonça Joe, dont l'ascendant éclaireur prenait le dessus.

— C'est pas comme si on en avait croisé au moins une depuis que l'on est entrés dans cette maudite forêt, grommela Paul.

Joe fronça les sourcils.

— T'es pas obligé d'être aussi désagréable, lança le blond.

— J'énonce juste une évidence, déclara Paul sur un ton condescendant.

Le garçon aux yeux foncés se renfrogna, vexé. Il essayait simplement d'aider. Lui au moins, avait l'habitude de dormir en extérieur et cela depuis plus de cinq ans.

— Alors trouvons deux arbres rapprochés, nous dormirons en hauteur, émit Joe.

Paul souffla de nouveau et roula des yeux.

La dernière tartineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant