Je me souviens de l'époque où nous étions enfants.
J'avais cinq frères jumeaux. Nous nous ressemblions tous comme deux gouttes d'eau, si bien que tout le monde n'arrêtait pas de nous confondre les uns les autres. Autant le dire, nous étions carrément indissociables. Je ne compte plus le nombre de fois où on m'a appelé Todomatsu ou Osomatsu. C'est à se demander comment notre mère arrivait à nous différencier. Nous étions inséparables, toujours à enchaîner les bêtises et les pitreries avec nos amis, que ce soit avec eux ou qui se retournaient malencontreusement contre eux, comme Iyami ou Chibita.
Tous les jours, on allait s'amuser au parc pour enfants situé quelques rues plus loin de notre maison. Les parties de chat et de cache-cache s'enchaînaient à tour de rôle, jusqu'à ce que chacun de nous six soit le chat ou le 'démon'. On passait de nombreuses après-midi ainsi, après nos journées d'école. On souriait, on rigolait, et même si nous étions épuisés en rentrant chez nous, on continuait à jouer tous ensemble jusqu'à ce qu'on s'endorme en plein milieu du salon, sous le regard attendri de nos parents. Ce furent sans aucun doute les plus beaux jours de ma vie...
J'aimais mes frères. Je les aimais sincèrement. Être avec eux suffisait à me rendre heureux. Je passais le plus clair de mon temps avec Todomatsu, mais j'appréciais aussi beaucoup la compagnie de Jyushimatsu et Ichimatsu. Je me fichais pas mal que nous faisions la même chose à longueur de journées, tant que je pouvais sourire avec mes cinq frères, je n'avais besoin de rien d'autres.
Un jour en particulier m'avait marqué. Peu de temps avant la fin de nos années de primaire, le club de théâtre de notre école rencontra un problème : l'élève qui tenait le rôle principal de leur pièce était tombé malade, à savoir Macbeth de Shakespeare. J'avais eu l'occasion de les voir répéter de temps en temps au gymnase, et je fus tellement emporté par l'œuvre de ce dramaturge que je me suis entraîné en cachette à jouer chacun des personnages, dont Macbeth. Lorsque j'ai entendu la nouvelle, j'ai proposé timidement mon aide au club, qu'ils ont accepté. Bien évidemment, j'avais gardé la surprise à ma famille jusqu'au jour de la représentation. Ce serait mentir de dire que je n'avais pas le trac lorsque j'ai dû monter sur scène... Et si je me loupais dans mes répliques ? Même si je me suis entraîné dur pour interpréter un rôle aussi difficile que Macbeth, est-ce que je pourrais vraiment offrir au public un jeu convaincant ? Je n'étais sûr de rien... Cependant, toutes ces peurs et ces angoisses qui me hantaient se sont envolées à l'instant où j'ai vu la lumière.
Lorsque j'ai vu les yeux des parents et des élèves braqués sur moi, j'oubliais totalement que j'étais Karamatsu... Je me suis laissé entièrement habité par cet homme qui a commis l'irréparable avec sa femme pour devenir roi.
Bien qu'un peu chancelant dans mes mouvements, j'ai réussi à tenir mon rôle jusqu'au bout. La pièce fut un succès retentissant. Tout le monde a applaudit, et les membres du club de théâtre m'ont tous remercié pour les avoir aidé à ne pas annuler leur représentation. Peu après, mes parents et mes frères étaient venus me voir dans les loges.
- Karamatsu ! C'était bien toi sur scène ? Me demanda Osomatsu, mon grand frère, les yeux grands ouverts.
- Oui, c'est moi qui aie joué le premier rôle. Lui répondis-je, pris au dépourvu.
- Wow ! Tu as super bien joué, Karamatsu nii-san ! Jyushimatsu me prit les mains et m'offrit un sourire radieux. Tu es vraiment doué pour le théâtre !
- Mais pourquoi tu ne nous as rien dit ? Me demanda maman, étonnée du talent d'acteur d'un de ses fils.
- Euh... Je voulais vous faire la surprise. Ma voix s'était faite plus timide. Je craignais qu'ils le prennent mal, mais ce fut tout le contraire.
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Fragments
Fanfiction"Jamais le soleil ne verra ce demain." - Lady Macbeth Prétendre, porter un masque et afficher un sourire de façade. Jour après jour, telle une litanie. Jusqu'à ce que le monde perde ses couleurs, et que la réalité se révèle plus froide encore que la...