Chapitre 14

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H A R R Y

On a frappé à la porte de ma chambre, m'arrachant à ma rêverie.

« Harry ? Je peux entrer ?

– C'est ouvert. »

Ma mère est entrée dans ma chambre et j'ai senti qu'elle retenait un soupir.

« T'es toujours là-dessous ? »

Je n'ai rien répondu parce que oui, j'étais toujours sous mon lit à attendre que le temps passe. Elle le voyait bien alors pourquoi est-ce qu'elle posait la question ?

« Je t'ai préparé un sandwich.

– Hum, hum. »

Inconsciemment, j'ai tourné la tête sur la gauche, là où tous les autres sandwiches qu'elle m'avait préparés patientaient pour être terminés – ou entamés. Elle a déposé l'assiette sur le sol mais au lieu de partir, comme d'habitude, elle s'est assise près de moi.

« Est-ce que tu veux bien me dire ce qu'il s'est passé ? »

Je n'ai pas répondu – la miette de pain qui s'était enfoncée par mégarde dans mon coude était bien plus intéressante.

« J'ai parlé avec Tobias... »

Elle a laissé sa phrase en suspens, comme pour me faire réagir. Et ça a plus ou moins marché.

« Et alors, ça y est ? Vous me faites interner ? »

Il y a eu un long silence et pour être honnête, je pense que c'est parce qu'elle se retenait de pleurer.

« Ça suffit, maintenant. », elle a répondu très sèchement.

Puis elle a tendu son bras pour attraper le mien et lorsque je l'ai senti me tirer de sous le lit avec une force que je ne lui connaissais pas, je n'ai pas eu d'autre choix que de suivre le mouvement car elle appuyait sur mes bleus et me faisait vraiment mal.

« Att—aïe. Maman, arrête ! Tu me serres trop, j'ai— »

Elle a lâché prise quand je me suis retrouvé assis face à elle. Sauf que je n'avais pas eu le temps de rabaisser les manches de mon sweat-shirt et elle s'est emparée de mes poignets pour pouvoir regarder de plus près. Sur l'instant, j'ai eu honte car j'avais conscience du ridicule de la situation. Même si je ne pouvais pas m'en empêcher.

« Bon sang Harry ! Mais qu'est-ce que tu t'es fait ? »

J'ai haussé les épaules avant de me défaire de son étreinte et de baisser mes manches pour de bon.

« C'est parce que je sentais plus rien à l'intérieur des coudes. C'est tout. »

Bon... je ne sais pas si c'était bien de justifier le fait que mes bleus descendaient plus ou moins jusqu'à mes poignets de cette manière, mais c'est tout ce que j'ai trouvé à répondre sur le coup.

Ma mère m'a regardé un long moment et elle a fait un truc qu'elle n'avait jamais fait devant moi avant : elle a éclaté en sanglot.

Ça faisait trois jours que j'avais l'impression d'être mort à l'intérieur et de ne plus rien sentir. Comme si j'étais là, sans l'être vraiment. Comme si j'avais atteint ma limite. Comme lorsque qu'on a l'impression de se brûler avec quelque chose de glacé, et bien moi, j'avais l'impression de ne plus rien sentir tellement j'avais mal. J'ai essayé de me ramener à la réalité, vraiment, mais même en me pinçant plus fort et plus longtemps et à plus d'endroits, je n'y suis pas parvenu. J'ai regardé cette liste 'Suicide' à plusieurs reprises mais plus rien n'avait de sens. Les choses qui me faisaient mal n'étaient plus les mêmes qu'avant et parfois, elles étaient aussi celles qui me donnaient envie de rester.

Show Me You CareOù les histoires vivent. Découvrez maintenant