Chapitre 1

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Solomon ouvre doucement les yeux, aveuglé par une lumière dégagée par une lampe juste à côté de lui. Son ventre lui fait un mal de chien, une douleur intense s'empare de l'ensemble de son corps, alors qu'il essaye de contracter ses abdos pour se redresser. Impuissant, il regarde simplement devant lui. Un plafond. Une tente peut-être. Ou l'intérieur d'un bâtiment. Il tourne doucement la tête pour regarder vers sa droite alors que la lumière lui éclaire profondément les yeux. Une perfusion de fortune, une poche à eau presque vide, reliée à son bras droit par ce qui semble être un tube chirurgical. Bien qu'impuissant pour bouger, il tente de demander de l'aide en entrouvrant la bouche, mais aucun son n'en sort. Une voix masculine lui dit alors « Doucement, ne bougez pas plus. Cela ne sert à rien. ». Solomon, toujours aveuglé par la lumière de la lampe, tente d'apercevoir son interlocuteur. La voix rajoute alors « Vous... avez été grièvement blessé. Je dois dire que je ne m'attendais pas à ce que vous vous réveilliez si vite après ce qui vous est arrivé. En fait, je dois dire que je ne m'attendais pas à ce que vous vous en réveilliez tout court... Vous devez être un sacré spécimen... ». Cette même voix s'approche alors de l'ancien soldat blessé, alors que celui-ci lutte contre la douleur et la luminosité. « Ne vous en faites pas, vous êtes en sécurité... ici... ». Les derniers mots semblent s'estomper lentement tandis Solomon tourne de l'œil et perd connaissance.

Lorsqu'il rouvre les yeux, la lumière de la lampe ne lui éclaire plus le visage. Il se sent même capable de bouger entièrement la tête. De ses lèvres sort alors ce mot « F... famille... ». La même voix répond alors « Vous revoilà. Je croyais vous avoir perdu. ».

Solomon demande alors à cette personne, les yeux vitreux et sa vision trouble, « Q... Qui êtes-vous ? ». Aussitôt, l'individu répond « Je suis le docteur Henry. J'étais un ancien scientifique de l'Enclave, il y a... longtemps. J'étudie les mutations et je vous ai trouvé alors que je me dirigeais vers Jacobstown. Je vous ai trouvé... le corps presque entièrement brûlé. ». Sur ces mots, Solomon ouvre grand les yeux et dirige aussi rapidement que possible ses mains vers son regard. Elles sont couvertes de pansements et entre autres, de bandages. Entre les plis de ses nouvelles manches, il remarque sa peau calcinée, devenue presque marron. Le docteur Henry allume à cet instant une lumière, la même lumière qui éclairait son visage juste avant, avant qu'il ne tombe dans les pommes, et celle-ci dévoile alors l'apparence de son sauveur : le docteur Henry est un vieil homme, avec de grandes lunettes de vue à la monture noire, à moitié chauve. Ses traits sont marqués par les années. Son visage est ridé, triste et froid, comme un cadavre. Solomon le dévisage pendant une seconde, puis redirige son regard sur sa nouvelle peau qui le démange douloureusement.

« J'ai pris la liberté de traiter du mieux possible votre peau, avec tout le matériel à ma disposition. Cela va du plus simple kit de soin, jusqu'aux radiations. J'espère que cela a été efficace. » dit le docteur Henry. Solomon ferme les yeux puis les rouvre au bout de quelques instants. L'ancien soldat répond alors « J'ai besoin ... de me lever, doc... », et il lui répond aussitôt « Vous êtes dans les vapes depuis presque cinq mois. Vous allez avoir besoin de faire quelques séances de... » Solomon ne laisse pas le docteur finir sa phrase et s'assied sur le rebord de son lit d'hôpital en poussant un grognement de douleur. Puis il reste assis et se met à regarder le docteur Henry dans les yeux. « Pas. De. Rééducation. » rage-t-il alors. Le docteur Henry recule d'un pas au même instant et place sa main sur son menton, lui donnant l'air de réfléchir. « Ça c'est fascinant. Vous devez être très résistant pour ne pas avoir de fractures... » répond-il. Solomon se lève alors en poussant un nouveau grognement de douleur, puis secoue doucement ses bras, puis ses jambes, puis sa tête pour soulager et s'adapter à sa nouvelle peau. Il tourne soudainement la tête vers sa droite, et remarque un lavabo qui a l'air encore rempli d'eau. Il s'y dirige alors dans le but de se réhydrater. Le docteur, qui continue de regarder Solomon, remarque que la perfusion encore accrochée à son bras est vide. Il se dirige vers l'ancien soldat et commence à la retirer sans qu'il n'y accorde la moindre attention. Solomon plonge ses mains couvertes de pansements dans l'eau et les ramène contre ses lèvres. C'est au moment de boire, qu'il remarque que sa tête est elle aussi bandée. Dans un léger râle, il retire les bandages d'un passage de la main et commence à boire l'eau avec ses mains. Ses lèvres sont plissées et desséchées.

C'est après avoir pris quelques gorgées qu'il tourne sa tête vers un miroir brisé à sa gauche. Il plonge alors son regard sur son reflet et constate que son visage est totalement brûlé, marron : Ses paupières sont desséchées et presque inexistantes, tout comme ses lèvres qui se sont rétractées. Son nez, lui, a été sauvagement arraché, et ses joues sont dorénavant creusées, sont front plissé et ses sourcils introuvables. En constatant ces dégâts, Solomon baisse la tête. Il a fait face à la mort. Et il a survécu. Il a été trahi par son coéquipier. Son meilleur ami. Son frère. Mais cela ne lui importe peu désormais. Cet homme-là est mort. Tout ce qui compte aujourd'hui c'est de tuer l'homme qui a assassiné sa famille. Tout ce qui compte aujourd'hui c'est de tuer Grayf McKest. Solomon redresse la tête et lance un regard noir à son reflet dans le miroir, puis fixe la silhouette du docteur Henry, qui s'éloigne lentement dans le noir. Il pose ensuite le regard sur ses mains et serre les poings en murmurant à nouveau :

« Venger ma famille... »

Pour une histoire de famille...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant