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—❝racontes-moi ta journée, charlie.❞
➴ ➴ ➴

Je tourne la clé dans la serrure, je pousse la porte et entre. Je pose mon trousseau de clés sur le comptoir, je retire ma veste et la balance sur le canapé. Je m'approche du frigo pour l'ouvrir, sortir la bouteille de jus de fruit, remplir mon verre et ensuite la remettre à sa place. Je bois une gorgée, puis une autre, je me dirige ensuite vers le canapé ou ma veste est posé en vrac. Je la pousse pour ne pas poser mes fesses dessus, j'attrape mon ordinateur sur la table basse, je m'installe correctement, je le pose sur mes genoux, l'ouvre et appuie sur le bouton pour l'allumer.

J'ouvre la page du site de débat que j'ai l'habitude de consulter depuis maintenant quelques temps. Je fais le tour, rien ne m'intéresse. Je quitte la page, en ouvre une deuxième et tape dans la barre de recherche de Google : Twitter.

La recherche se lance au bout de quelques secondes mon twitter est affiché. Je fais le tour du fil d'actualité, je retweet deux, trois trucs jusqu'à me rendre au dernière nouvelles, j'actualise une dernière fois, rien de plus. Une notification, suivis de son son apparaît en haut de mon écran. Un léger sourire se forme doucement sur mon visage.

@maninblack
Bonjour Charlie, je vois que tu es rentrée.

@noisygirl
Oui je viens juste d'arriver.

@maninblack
C'est donc pour cela que tu as posté il y a cinq minutes, tout s'explique.

@noisygirl
Me surveillerais-tu ?

@maninblack
Non, je guettais ton arrivée.

@noisygirl
Appelle ça comme tu veux.

Pas de réponse durant les six prochaine minutes. J'avais donc fini mon verre de jus de fruit, allumé la télévision, mis mon jogging et attaché mes cheveux.

@maninblack
Racontes-moi ta journée, Charlie.

Je m'attardais donc sur mon clavier comme tout les soirs à la même heure depuis ces cinq derniers mois. Je tapais sans regarder mon écran, comme si je me dépêchais par peur d'oublier chaque mots auxquels je pensais. Je tapais vite ce qui permettaient aux fautes de s'inviter dans mon récit.

Je lui racontais ma banale vie du matin lorsque je me réveillais les cheveux décoiffés pour ensuite me rendre à la douche tel un zombie, pour ensuite y passer dix bonnes minutes, pour ensuite déjeuner, m'habiller, me coiffer et sortir en fermant la porte derrière moi, pour ensuite finir la première étape de la journée dans ma petite voiture.

Je reprenais rapidement mon récit sur la deuxième étape de la journée, mon travail. Je prenais plaisir à lui expliquer la façon dont je gérais le bar, le ménage, la préparation des tables à moi toute seule, jusqu'à midi. J'enchainais ensuite sur l'arrivée épique de ma collègue et amie déjantée. Ce qui pimentait généralement ma journée monotone de serveuse dans le diner du coin. Je lui racontais aussi la façon dont certains client prenaient un malin plaisir à me draguer ou encore ceux qui ne pouvaient s'empêcher de critiquer mon travail.

Je m'agaçais généralement en écrivant cette partie là. Je tapais fort sur mes touches d'ordinateur comme si cela y changerait quelques choses, mais rien. Mise à part le risque de casser celui-ci, c'était inutile. En plus de ça, il se moquait de moi. Me répondant deux, trois smileys qui rigolent.

Je continuais ensuite mon récit par la fin de mon service ou mon patron me demander toujours de rester cinq minutes de plus. Cinq minutes de plus qui se transformaient en heures, mais je ne disais jamais non car je savais qu'il me paierait ces heures en plus ou qu'il m'offrirait mon dîner ce soir là. Lorsque cela arrivait, je prenais juste trente petites secondes pour prévenir mon partenaire de discussion qu'il fallait repousser notre discussion du soir à plus tard, ce qu'il acceptait. Mais d'un côté s'il refusait cela n'y changerait rien.

@noisygirl
Voilà ma journée des plus épique comme tu peux le voir.

@maninblack
Journée forte en émotion pour notre Charlie. Comment vas-tu ? Tu as l'air exténuée.

@noisygirl
Ça va, je suis juste fatiguée. Être serveuse est bien plus sportif que tu le pense.

@maninblack
Je veux bien te croire ! Je te conseille de manger vite et d'aller te coucher pour passer une nuit tranquille.

@noisygirl
Serais-tu en train de faire comprendre que tu as plus important à faire ce soir ?

@maninblack
Rien n'est plus important que toi, Charlie.

@noisygirl
Disquette.

@maninblack
Passe une bonne nuit, Charlie

@noisygirl.
À demain, Stan.

Je ferme mon ordi et le remet en place. Discussion courte pour ce soir. Parfois mon partenair ne semble pas très bavard, il a surement bien plus important à faire que de discuter sur internet avec une serveuse de vingt-sept ans. Mais c'était devenu un rituelle. Je l'avais rencontré sur un site de débat en ligne. J'aimais sa façon d'argumenter, sa façon de voir les choses, sa façon dont il te faisait voir les choses, et sa façon de s'exprimer. C'était un homme correct d'une trentaine d'année, s'il ne m'a pas menti sur son âge. Je ne sais pas à quoi il ressemble, mais ce que je sais c'est qu'il est doux, agréable, gentil, drôle, arrogant, calme et j'en passe. Après des mois à débattre ensemble sur notre site préféré,nous avions échangé nos twitter pour discuter plus intimement. Je suis pourtant méfiante envers les réseaux sociaux, mais cet homme me paraissait juste et droit dans ses bottes. Une certaine confiance c'était installé, mais il restait mystérieux. Jamais il ne me racontait sa journée, jamais il ne me parlait de lui, ou alors très peu. C'était bizarre, mais agréable de se sentir intéressante. Ou du moins avoir quelqu'un à qui se confier.

Je ne connaissais pas son vrai nom, il était juste Stan.

man in black ↯ sebastian stanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant