CHAPITRE 21

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Pour L.D, in memoriam.











MARIAMA DIOP

C'est la première fois que je vois le mari de Aïcha mais mon Dieu, ce mec n'est pas que beau. Il est juste parfait : grand, un corps d'athlète, super classe et une voix qui vous met dans tous vos états. J'étais sans voix quand Aïcha nous a présenté. Il venait juste de rentrer du travail.

-Abdou, ce sont des copines. Je pense que tu as déjà vu Astou. Elle, c'est Mariama. Les filles, voici mon mari, fit-elle avec un large sourire

-c'est un plaisir Mariama. Astou, J'espère que tout va bien?

-oui oui ça va Abdou. C'est un plaisir partagé ! répondis-je.

Et il est monté se changer. Je ne l'ai pas quitté pas des yeux jusqu'à ce qu'il disparaisse en haut des escaliers.

En plus d'être beau, il est riche. Ça se voit rien qu'en entrant dans sa maison.

Daba disait que Aïcha avait un mari qui s'occupait bien d'elle et qui ne lui refusait rien mais je ne pensais pas que c'était à ce point là.

Je me demande bien comment elle a osé prendre le risque de quitter tout ça juste pour des histoires de coépouse.

Bakhna.

-wa Aïcha wakhooma wone ni sa xalei bou goor bi ni la tiotio wé degeuntane. Ay photom daniou ko niawal. Iow ki kene dinako am diko bayi ak kénène. Ah yiiii wéré nga (tu ne m'avais pas dit que ton mari était si beau. Et il l’est plus en vrai que sur ses photos. Comment as-tu pu partir et le laisser avec une autre? Tu as vraiment déconné).

-kholé ko ndank deih ( regarde le doucement), plaisanta t-elle. C'est vrai que tu ne l'as jamais vu. Wa guisnga deih, je ne me plains pas dal.

-oui Daba me disait sans cesse qu'il était non seulement beau mais qu'il s'occupait bien de toi. Et ça se voit. Mais raconte moi, ana sa djiné dji? Ba yangui kay wane sa bopou rek ( où est ta coépouse? J'espère que tu lui fais voir de quel bois tu te chauffes?)

-soko guissé wakh ma (si tu la vois, tu me diras). Elle est comme une locataire ici. Je ne la vois presque jamais. Mais ne t'inquiète pas tu me connais n'est ce pas?

-ne la laisse pas respirer. Fais lui vivre l'enfer dans cette maison, mou abal leuh (qu'elle foute le camp).

-ay ! Souma khamone ni wakh dji ngafiy indi doma topou (si je savais que tu allais venir pour ça, tu n’allais pas me suivre). Aïcha, ne l’écoute surtout pas. Toutes ces choses qu’elle te conseille de faire ne font que te retarder. Occupe-toi de ton mari et de tes enfants et si tu ne peux pas composer avec ta coépouse, traite la par le mépris mou diekh. Lep louniou la wakh lénéne rek wahou nioula deeg nak.

Celle là, elle me sort de partout avec ses prêches. Je lui fis un long tchip : yaw lane la Astou ? Lou tah nga seytané ? (Qu’est ce qui te prend ?)

Aïcha se contenta juste de rire avant de changer de sujet mais je ne la suivais plus.

Il me fallait le mec. C'est celui là que je veux même.

Pendant que Aïcha s'occupe à s'entretuer avec sa coépouse comme elle le dit si fièrement, je vais bien voir comment faire pour l'attirer à moi. Ce ne sera pas facile de le ferrer. Mais le fait qu'il soit polygame va beaucoup m'aider car ça prouve que dafa beug djiguéne donc je vais user de mes charmes pour l'attirer.

Il redescend quelques minutes plus tard, en short et T-shirt et j'avais juste qu'une envie, c'était le manger, le toucher.

Quel homme!

Il s'assoit en face de moi. Son parfum avait embelli toute la pièce dés qu'il était redescendu. Purement masculin, viril, excitant, doux, enivrant.

Oh mon Dieu.

-alors Mariama, dis moi tu habites où? Me dit-il en s'emparant du bol de cacahuètes qui était posée sur la table.

-Fass. J'habite à Fass.

-Fass mo dakheu fi deih!

-Même pas. Ici c'est calme. J'aime bien.

-oui ça c'est vrai. C'est pourquoi j'ai même pas hésité quand j'ai eu l'occasion d'y construire. J'adore. Khana doléne nieuw ma diay léne fi terrain, comme ça on pourra être voisins, plaisanta t-il en souriant.

Je découvrais ainsi sa magnifique et parfaite dentition toute blanche et son sourire qui ferait fondre n'importe quelle femme. Et en plus c'était un charmeur, super sûr de lui.

Un peu plus tard, la coépouse de Aïcha est arrivée. On a même pas été présenté mais j'avoue qu'elle a été assez cordiale avec nous.

J'ai vu les enfants d'Aïcha la suivre quand elle montait et elle semblait s'entendre avec eux. Mais, rien qu'en regardant l'expression de Aïcha quand elle est entrée dans la pièce, on sent nettement qu'elle a une haine profonde pour elle.

Chose qu'elle ne cherche même pas à cacher d'ailleurs. Et y a de quoi. Le mec est devenu une autre personne dés qu'elle est entrée dans la pièce, c'était comme si c'était elle qu'il attendait pour être illuminé. J'en avais même la chair de poule. Il avait ce sourire bête qu'avait les mecs quand ils sont fous amoureux.

Je donnerai ma vie pour qu'un homme me regarde comme ça.

Aïcha a du pain sur la planche. Moi encore plus. Cette fille est comme leur mari, juste parfaite. On se sent même diminuée devant elle.

Mais dara, goor goor la rek (un homme reste un homme). Si ça n'avait été que ça, il n'aurait jamais pris une deuxième parce qu'Aïcha n'a rien à lui envier.

J'ai compris en la voyant préparer le diner que c'était son tour aujourd'hui moi qui me demandais bien pourquoi Aïcha n'était pas montée avec son mari quand il est rentré. Ils respectent scrupuleusement les tours alors. Ben dis donc.

-bon, on y va là. Il se fait tard et on n'habite pas la porte à côté, avait dit Astou.

Non mais qui lui a permis même de parler à ma place. Je veux pas rentrer moi.

-mais non restez. Fass n'est pas si loin que ça. En 30 minutes vous serez chez vous. Restez diner avec nous, avait insisté Aïcha.

-oui. Vous allez rater le diner chez vous si vous partez à cette heure car il y aura un bouchon terrible sur la route. alors mieux vaut que vous restiez diner avec nous après vous prendrez un taxi.

J'avais espérer qu'il dise qu'il nous déposera mais bon... Je veux rester rien que pour avoir le plaisir de le contempler encore plus. Il nous a laissé quelques minutes pour aller à la cuisine puis il est revenu. Sûrement pour dire à sa femme que nous restons diner.

Un peu plus tard, elle est venue habillée d'une magnifique robe en voile coton. Ça lui allait à merveille. Elle a étalé une nappe devant nous, amener un magnifique panier en osier contenant des cuillères, des torchons et des verres qu'elle a ensuite disposées sur un plateau. Elle est ensuite revenue avec un pichet contenant du jus et la bonne en avait amener un contenant de l'eau. Et après tout cela, elle avait amené le diner.

-j'espère que vous aimez le couscous les filles? nous dit-elle tout sourire.

-han nioune deih khamnani souniou défoulé ndank rek souniou biir yi dina sakhi garabou dougoup ndah tiéré. Abdou dafa beug tiéré rek sak jour niou forcé niouko...khayiii (si on ne fait pas attention, des champs de mil vont pousser dans nos ventres. Parce que Abdou aime le couscous, chaque jour on nous force à le manger) avait dit Aïcha tout bas.

J'avais envie d'éclater de rire. Aïcha a failli me tuer avec ça. Elle est pas possible celle là.

-qui n'aime pas le couscous? Avais-je répondu en étouffant mon rire difficilement.

Et elle souleva le plateau, ça sentait tellement bon.

C'était du tiéré mboum. J'en avais jamais mangé un aussi bien fait. La go est sérère c'est pourquoi elle fait le couscous si bien. Et je n'ai pas dit non quand Abdou a proposé qu'elle en rajoute ni Astou encore moins Aïcha d'ailleurs, elle qui s'était moquée un peu avant.

Et le jus était tout aussi exquis. Le mec doit être aux anges: deux superbes femmes qui en plus d'être des merveilles de la nature, sont des cordons bleus. Mais bon, on dit bien que l'appétit vient en mangeant et il l'a bien prouvé lui. D'abord Aïcha, puis sa coépouse. Qui sait?

-bon, c'est pas qu'on s'ennuie mais il se fait tard, fit de nouveau Astou en regardant l'heure sur son téléphone.

Non mais OOOOOHHHH !


Je la regardais du coin de l’œil mais elle se leva tout bonnement en prenant son sac.

-attendez, je vais vous déposer à la station de taxi, parce que c'est la croix et la bannière pour trouver une voiture à cette heure ici, avait proposé Aïcha.

-non, on y va tous, je les dépose. C'est pas sûre de laisser trois dames seules à cette heure. Mossane, on y va? Avait dit Abdou.

Il aurait juste fallu qu'il le fasse lui seul, sans Aïcha ni l'autre dont j'arrive pas à retenir le nom, pour que tout soit parfait. Comme ça, j'aurai un prétexte pour lui demander son numéro de téléphone. Je lui dirai que c'est pour le prévenir qu'on est bien arrivé.

-non allez y, je suis exténuée. Je vais montée me reposer. Mariama, Astou ça a été un plaisir. Rentrez bien. Répondit la coépouse de Aïcha.

Courtoise en plus. Tu verras. Vous verrez même. Bientôt, je vais venir occuper la troisième place, nguéne khamni lolene man malene ko dakh fouf.

Ils nous ont déposé à la station et il nous a donné le prix du taxi, de gros billets d'ailleurs, aka kham téranga sakh.

Une grande équation venait de naitre dans ma tête: comment faire pour avoir le numéro du mec?

Je me dis que j'aurai dû demander à Aïcha de me prêter son téléphone pour appeler quelqu'un et comme ça je pourrai chercher le numéro. Mais c’était trop tard.

Mais je l'aurai. Il me faut ce mec, à tout prix. Il est tout ce que je cherche: il ne court pas les rues comme tous ces vauriens avec qui je sors, il semble savoir ce qu'il veut et par dessus tout, dafa talii (il est généreux).

Il est tout l'opposé de ce que j'ai en ce moment. Je n'ai pas de mec fixe. J'en ai qui subviennent à mes besoins. Des imbéciles de rien du tout, des vauriens de la pire espèce.

J'arrive toujours à les duper mais il arrive que je rencontre quelqu'un à qui je ne peux échapper et là je ferme les yeux et prie pour que ça passe vite tout en ayant comme consolation les nombreux cadeaux que j'aurai en retour.

L'amour, je n'essaie même pas d'y penser. Ce que je veux c'est vivre. Je n'ai pas fait d'études poussées, j'ai grandi dans un environnement où toutes les femmes autour de moi se font entretenir par des hommes riches, des femmes qui du matin au soir vont à la chasse pour trouver un mari riche qui pourrait leur donner la vie dont elles rêvent tant.

Y en a qui y sont arrivées. Mais me marier avec un homme que je n'aime pas, juste pour du fric, c'est pas mon truc. Paradoxal non? Mais je préfère mille fois ce que je fais à passer ma vie à subir les assauts d'un homme que je n'aime pas.

Je préfère changer de mec dés que l'ennui me gagne. Qu'est ce qui ma mené à ça?

Un papa mort alors que je devais avoir sept ans, une mère qui ne parvenait pas à joindre les deux bouts pour nous nourrir mes deux grandes sœurs, mon frère et moi.

Très tôt, j'ai dû faire face à la dure réalité de la rue. Mes copines s'habillaient bien alors que moi j'avais toujours la même paire de sandales pour aller à l'école. Après avoir échoué deux fois au Bfem, j'ai commencé à fréquenter les autres filles du quartier qui vite m'ont appris que je pouvais tout avoir en sortant avec des hommes en usant de mes charmes.

C'est ainsi que j'ai commencé à faire du mbaran, rien de bien méchant. Juste des mecs qui m'invitaient au resto, me payer quelques fois des habits et en échange, je flirtais avec eux.

L'appétit venant en mangeant, j'ai rencontré d'autres hommes plus fortunés et j'ai du passer à la caisse pour avoir ce que je voulais.

J’ai connu Aïcha juste comme ça dans le quartier à travers Daba Ndoye qui elle fréquentait Astou. Cette dernière est plus amie avec Aïcha que nous autres et je la soupçonne d’être à l’origine du retour se Aïcha dans son foyer car elle lui disait sans cesse que son mari était quelqu’un de bien et qu’elle ne devait pas laisser sa jalousie penser pour elle.


Et je comprends tout maintenant. Son mari là, il est celui qu'il faut à tout le monde et tel que je l'ai vu, il est le genre de mec à te faire perdre tous les moyens en une nuit.

Aïcha et moi, on est pas des amies. Elle est amie avec Daba et surtout avec cette idiote d’Astou. Elles ont presque grandi ensemble à ce qu'elle raconte et Aïcha avait été la copine du cousin de Daba.

A ce qu'elles racontent, elle a jamais trempée dans leurs trucs de mbaran car elle était obsédée par le cousin. Mais ça s'est mal terminée entre eux. Comment ? Je ne sais pas mais je vais le savoir.

Aïcha était toujours super classe et quand on sortait, elle payait toujours pour nous et nous prêtait ses affaires quelques fois. J'avoue que je l'enviais quelques fois quand je voyais la facilité avec la quelle elle dépensait son argent ou donnait ses affaires, sacs, bijoux, chaussures, perruques et j'en passe.

Et c'était toujours sans problème quand on lui disait qu'on allait garder telle ou telle chose qu'elle nous avait prêtée, elle ne disait rien. Son gros problème est qu'elle trop crédule. Et ce que je vais faire en premier, c'est faire en sorte qu'elle s'en prenne à sa coépouse. Telle que j'ai vu cette dernière elle est pas du genre à se laisser faire. Et si j'arrive à faire en sorte qu'elles passent leur temps à se disputer, leur mari sera accessible car il en aura marre d'elles.

-Mariama, tu es bien silencieuse. Depuis qu'on a quitté Rufisque, tu n'as pas dit un mot. Que se passe t-il? Me demanda Astou

-je suis éreintée. Je veux juste rentrer me coucher. Thiéré bakhoul, daflay nelawlo grave ( le couscous me fait dormir grave) et j'en ai trop pris. Mentis-je.

Il ne faudrait surtout pas qu'elle sache que je m'intéresse au mari d'Aïcha. Elle n’hésitera pas une seule fois à aller lui en parler. Déjà qu’elle ne voulait pas que je la suive ici. J’ai insisté parce que j’avais envie de voir où vivait Aïcha. Et je n’ai pas le moindre du monde regretté.


LES TURPITUDES D'UN MARIAGE POLYGAMEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant