Lorsqu'elle entendit son nom se répercuter en écho dans le silence de la nuit, elle sortit instantanément de ses pensées. Elle reconnaissait cette voix, d'un habituel si réconfortant qu'elle en avait, de nombreuses fois, pleuré dans ses bras, bercée par le doux son de ses propos. Et bien qu'elle connaisse pertinemment les raisons de sa présence ici, elle ne pouvait se permettre de se laisser aller devant lui. Elle se devait d'assumer ses erreurs et de grandir par ses propres moyens, même si pour cela, le passage par la solitude était obligatoire. S'allongeant à même le sol de sa chambre, ses cheveux blond détachés et brouillons, elle se contenta de fixer ce plafond blanc dégarni de couleurs. Rien ne semblait lui apporter de la chaleur, ni ses murs recouverts de graffitis, ni sa coiffeuse surchargée de maquillages pourtant si colorés et tape-à-l'œil, ni même ses draps beige, immaculé de poids blancs.
Les yeux fermés, elle parvenait sans mal à percevoir le léger clapotis de la pluie sur le battant de ses volets. Le vent, plus calme que d'ordinaire, soufflait un air mélancolique, bousculant les arbres et kidnappant leurs feuilles dont l'ombre valsait sur les cloisons de l'immeuble.
Tournant la tête sur la droite, les yeux empreint d'une lueur vacillante et lointaine, elle observa les quelques mots inscrits sur ses murs d'un œil distrait. Elle ne les connaissait que trop bien. Pour les avoir lu des tas de fois, elle était capable d'indiquer la position exacte de chacun d'entre eux, même les yeux clos. Quelques fois, il lui arrivait même de ne bloquer que sur l'un d'eux, cherchant à déterminer sa réelle signification. Et en ce moment-même, un seul semblait attirer son attention. Celui de Mattias.
31 Mars 2013
April aurait donné cher pour tout effacer et recommencer ce jour-là. Les appels qu'elle avait reçus plus tôt dans la matinée avaient achevé sa bonne humeur d'une manière inexplicable. D'une main brusque et presque violente, elle reposa son téléphone, le laissant presque tomber à terre. Le souffle erratique et les pensées virevoltant comme un cerf-volant pris au piège par le vent, elle ne pouvait poser de mots sur la sensation qui l'envahissait. Dans sa gorge, l'air semblait si lourd et avoir tant de mal à se frayer un chemin jusqu'à ses poumons qu'elle se demanda un instant si elle n'était pas sur le point de faire un malaise. Alors, d'un bond, elle avait quitté l'établissement scolaire sans prévenir qui que ce soit. Ses pas, incertains et non contrôlés, l'avaient mené hors de ce lieu, la guidant au seul endroit où elle pourrait étancher sa peine sans que personne ne puisse la déranger ou s'en moquer. Chez elle. Ne réalisant que très mal ce qui se déroulait, elle sentit le sang couler timidement dans sa bouche lorsqu'elle mordilla sa lèvre inférieure, tout en traçant sa route sans prendre en compte aucun autre piéton.
Elle balaya son salon d'un regard, comme si quelqu'un s'apprêtait à surgir de l'ombre, l'épiant dans la discrétion la plus absolue. Mais inspirant un grand coup, elle réalisa l'absurdité de ses pensées. Elle déposa toutes ses affaires à la volée, et se hâta de rejoindre son lit douillet. Se jetant la tête la première, dedans, elle se décida néanmoins à ouvrir l'historique de son téléphone, bien que la peur de découvrir la vérité soit présente dans sa poitrine, menaçant d'exploser à tout moment. A côté de ce qu'elle ressentait, avoir imaginer toute la scène et passer pour une folle s'avérait être un choix plus que convenable et acceptable. Cependant, il en fut tout autre. En voyant le premier numéro s'afficher, son souffle se coupa derechef, pris d'un automatisme qu'il semblait ne connaître que trop bien. Si l'appel le plus récent ne datait que de cette matinée-là, il lui donnait pourtant l'impression de retourner des années en arrière. Et ce numéro-là, c'était celui de Jerry. Depuis sa mort, plus personne n'avait jamais réutilisé son numéro, et bien que sa ligne n'eût jamais été coupée, il demeurait impossible de l'employer.
VOUS LISEZ
Les Apparences Illusoires - TOME 1 : Jeux Malsains.
RomanceTandis qu'elle pense mener Josh par le bout des doigts, April se rend rapidement compte que la seule personne à faillir dans leur histoire, c'est elle. Elle, et personne d'autre. Sa petite comédie de midinette n'a donc plus aucun intérêt auprès de l...