Funambule

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Je suis debout. Je ne sais même pas comment cela peut être possible après ces secousses qui nous ont secoué. La corde sous mes pieds frémis encore et mon équilibre reste instable. Je voudrais m'asseoir, faire une pause, mais je ne peux pas le faire, je ne peux pas me le permettre. Si je m'arrête, je tombe.

Une fois de temps en temps le fil de ma vie croise une passerelle assez large pour que je puisse me reposer, mais on ne peut jamais rester bien longtemps dans ses petits cocon de sérénité : la vie trouve toujours un moyen de nous en chasser, une raison pour nous forcer de continuer à se battre et d'avancer.

Je viens à peine de quitter un de ces abris, je sais donc que je devrais encore marcher longtemps avant d'en croiser un autre : la vie n'est pas clémente, elle ne nous accorde pas énormément de pauses. Et puis évidement, faire demi tour n'est pas une option.

Je l'ai appris très vite : remonter le temps est impossible, ceux qui essaient trouve plus de douleurs que de réconforts en le faisant.

Je repense à l'accident de tout à l'heure. C'est comme si des fils c'étaient rompu brutalement. Ce genre d'évènements nous a malheureusement souvent secoué ces dernières années. Mais là ce n'est pas comme d'habitudes, ce qui vient de se passer n'aurait jamais dû avoir lieu. Je ne dis pas que c'est plus ou moins juste que le reste, mais cette fois personne n'est responsable, du moins pas directement. La Terre entière frémis encore, et des vagues continueront à nous secouer pendant longtemps.

Je ne connaissais aucunes des personnes qui sont si soudainement tombés, alors pourquoi j'ai si mal quand j'en entends parler ? Pourquoi mon cœur s'est-il à ce point fendu quand j'ai appris la façons dont la vie a décider de couper leurs fils, leurs chemins.

J'ai envie de hurler, je ne comprends pas comment on peut être si cruel, parfois j'aimerais tant me rebeller, me battre contre la vie. Mais elle est maligne, elle a trouvé le moyen d'éviter que trop de gens se révolte. On ne peut la vaincre que d'une seule façon : couper le fil sous nos pieds. Seulement, j'ai bien trop peur de la chute pour faire ça, alors je baisse la tête, je sers les dents et je continue de marcher. Et autour de moi, j'entends le rire sadique de la vie qui me regarde refouler ma colère au plus profond de mon être.

C'est paradoxal, j'en veux à la vie, mais je m'accroche à elle pour continuer... à vivre.

C'est qu'elle prouve encore une fois son intelligence en nous donnant des petits fragmentents, de bonheur. Elle nous donne des raisons d'avoir peur que le vide sous nos pieds nous avale, des choses auxquelles on tient on point d'avoir la force de toujours garder l'équilibre.

Et puis quelques fois, elle nous rappelle à quel point elle peut être cruelle, elle nous montre qu'elle est le maître du jeu, qu'elle contrôle tout. Elle coupe un fil, fait tomber quelques personnes. Elle nous laisse dans le doute et dans la tristesse un moment, puis quand elle juge que c'est assez, elle refait briller tousses trésors face à nos yeux pleins de larmes, elle nous montre qu'il faut recommencer à marcher, à franchir les obstacles qu'elle nous impose.

Je sens la colère monter à cette idée : pourquoi est ce qu'on la laisserais se jouer de nous comme ça, qu'est ce qui nous empêche de nous soulever contre elle, de nous battre ? Et puis mon regarde rencontre le vide sous mes pieds et je me souviens, la colère fait marche arrière pour laisser la place au désespoir et à la lassitude. Je recommence à mettre un pied devant l'autre pour repousser le moment où je chuterais.

Après quelques pas hésitants je comprends. Je comprends que rien ne sert de se battre puisque l'on ne peut pas gagner sans perdre, il suffit de tendre la main, de faire la paix avec la vie et nous-même, de continuer à avancer jusqu'à la prochaine passerelle, jusqu'aux prochains moments de bonheur.

Il ne sert à rien de se battre, il suffit de vivre.

* * * * *

Un texte court se soir en rapport avec les derniers événement. Une pensée pour toute les victime causé par la chute de ce viaduc, et je ne parle pas que de se qui sont mort, mais aussi de leur proches, de ceux qui ont perdu leur maison et de tout ce qui souffre pour une raison ou pour une autre de cette catastrophe.

Je n'ai qu'une seule chose à dire : même si se n'est pas évident : continuez à vivre!!

Les Mots du VentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant