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Je me faufile entre les tables, plateau chargé en main, levé au-dessus de ma tête, sourire sur les lèvres. J'arrive finalement à la table de huit personnes et dépose habilement leur verres entre eux. Une véritable habitude. Je repars avec un dernier sourire et pars attendre derrière le bar, coudes sur le marbre. Claire me rejoint en s'asseyant elle sur le comptoir et me sourit. Je lève les yeux vers elle.

-Pourquoi tu souris comme ça Claire ?

-Tu sais pas qui va venir aujourd'hui hein ?

Je peux sentir sa joie rien que dans le ton de sa voix. Je lève un sourcil.

-Si tu me poses la question c'est que je ne dois pas le savoir !

-Sérieusement Hana faudrait que tu te tiennes un peu au courant des dernières nouvelles !

Je rigole et me tourne complètement vers elle, main sur la hanche.

-Le genre de nouvelles auxquelles toi tu t'intéresses sont les potins de stars alors non merci !

Elle fait mine de se vexer en posant une main contre sa poitrine. Puis son sourire revient bien vite sur son visage, j'en conclus donc qu'elle est vraiment heureuse, sans que je ne sache, pour le moment, pourquoi.

-Robin McGregor vient au restaurant aujourd'hui !

Je plisse légèrement les yeux puis demande :

-Qui ?

Son sourire s'efface et elle me jette un regard qui semble dire «sérieusement ?». J'hausse les épaules avec un petit sourire et elle pousse un long soupir, signe que je l'exaspère vraiment cette fois-ci. Elle claque des doigts à côté de mon oreille tout en criant :

-Robin McGregor, McGregor !

-C'est pas en le répétant que je vais deviner Claire.

-Hana c'est l'homme le plus riche, le plus connu, le plus beau, le plus sexy de la ville !

Je ne dis rien.

-Et donc ?

-Sérieusement tu n'as rien compris ?

J'éclate d'un grand rire devant sa mine dépitée.

-Il est célibataire Hana !

-Et alors ? Tant mieux pour lui mais je me fiche un peu de sa vie.

Elle me fixe un moment puis lâche en descendant du bar :

-Effectivement tu n'as rien compris.

Je rigole.

-Hana tu peux aller servir la 8 s'il te plaît ?

Je me tourne. Le patron, Max, a passé sa tête par la porte menant aux cuisines. J'hoche lentement la tête et prépare la commande de la table 8. La machine à café fait un bruit si infernal derrière que Claire ne peut pas s'énerver contre moi. Je la vois se remettre du rouge à lèvres alors je lui jette un regard interrogateur. Elle tapote sa montre comme indiquant que son homme le plus sexy de la ville va bientôt être là. Je lève les yeux au ciel. J'adore Claire, mais sa manie de draguer tout les hommes est parfois agaçante. Elle mérite quelqu'un de vraiment bien après tout. Je prends les trois cafés et sors pour aller les servir. Je vois Claire qui du coin de l'oeil me fait des gestes très bizarre. J'ai toujours été très habile en service, je fais ça depuis un moment et j'adore ça. Alors je peux la regarder me faire des gestes de la main de plus en plus grand sans problème. Enfin, presque. Un choc c'est plutôt rapide me direz-vous. Comme au ralenti je me recule de la personne que je viens de percuter et voit les trois cafés brûlant se renverser tranquillement sur mon bras. Le plateau tombe au sol dans un bruit qui me semble assourdissant. La brûlure est intense et je vois mon bras devenir rouge instantanément. Je lève les yeux vers l'homme qui n'a pas bougé d'un centimètre. Je le vois me fixer, sans aucune expression sur le visage. La douleur intense n'était rien comparé a la colère qui monte comme une flèche en moi.

-Vous vous prenez pour qui ?

L'homme lève lentement un sourcil et se recule de quelques centimètres.

-C'est vous qui ne regardiez pas devant vous, dit-il tranquillement.

Je jette un regard derrière lui. Je travaille dans un restaurant très réputé et très grand. L'allée où il vient de passer entre les tables est longue d'une bonne dizaine de mètres. Ce qui veut dire qu'il avait largement le temps de me voir et de m'éviter tranquillement, c'était pas la place qui manquait.

-Oh oui et un minimum de respect c'est impossible ? C'est quoi cet égoïsme à deux balles où c'est à la serveuse de faire tout les compromis pour les clients ? J'étais occupée, vous pas. Se décaler de deux pas ne vas pas vous tuer je crois alors votre remarque vous la gardez pour vous c'est clair ?

Voyant qu'il ne dit rien, ma colère grandit encore plus. Je tapote durement son crâne avec mes doigts et continue :

-Dites-moi vous avez tellement rien là-dedans que vous êtes incapable de parler à part pour faire des reproches aux autres. Dégagez de mon chemin ou la prochaine fois ces cafés iront dans votre pantalon, de manière encore plus volontaire que la façon dont vous m'êtes rentré dedans !

J'ai crié à la fin de ma phrase mais cela n'avait aucune importance. Je ramasse brusquement le plateau qui était au sol, avec une irrépressible envie de lui frapper le crâne avec, mais je n'en fis rien et partie comme une furie à l'arrière du restaurant. Arrivée près de mon casier je frappe dedans puis m'arrête et souffle doucement. Je pars près du lavabo et passe mon bras sous l'eau froide. Je grimace sous la douleur et retire brusquement mon bras.

-Viens.

Je me retourne vers Ben. C'est un cuisinier. Il me fait signe et m'applique une crème sur le bras. Je lâche un petit cri mais il me tient fermement le bras.

-C'était dans la boîte à pharmacie si tu te demandes, dit-il. Ta petite scène n'a échappé à personne, tout comme ton bras défoncé.

Je lève un sourcil. Rien de tout ça n'était drôle alors pourquoi ne retirait-il pas ce fichu sourire de son visage ? Claire entra dans la salle et me jeta un drôle de regard.

-Quoi ? Qu'est-ce que j'ai fais ?

Elle souffle.

-Oh rien mis a part hurler sur Robin McGregor !

Je la regarder sans ciller.

-Oh c'était lui. Et bien au moins il arrêtera de se prendre pour le roi du monde ce conn-

Je fis bien exprès de hurler pour que ce McGregor puisse m'entendre mais Claire ne m'a pas laissé finir ma phrase. Elle me fait des gros yeux et elle part pour prendre sa commande me semble-t-il. Avant que la porte ne se ferme je le vois me jeter un regard. Je le fixe avec colère jusqu'à ce que la porte soit fermée.

-C'est vrai que perdre ce client n'est pas vraiment appréciable mais...

Je regarde Ben qui s'arrête pour me regarder en rigolant.

-Hé t'en fais pas je ne le soutiens pas forcément. Rien qu'à voir l'état de ton bras le virer du restaurant me démange.

-Ca brûle. Beaucoup, je lâche.

Une fois la colère passée je peux sentir mon bras entier qui semble brûler. Ben grimace.

-Je ne sais pas si mettre un bandage serait très utile, ça risque de frotter et d'être encore pire.

Je souffle. Remarque, quoi de pire peut-il m'arriver aujourd'hui ?

Coffee [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant