«Par la guerre, ils prétendent vouloir trouver la paix, mais la réalité, tout le monde la connait.»
__________Je m'arrête, épuisée par cette course sans issue. Je me laisse tomber contre un rocher et mon regard se perd à l'horizon. Les centaines de maisons brûlées, les tonnes de litres de sang écoulées, les corps inanimés gisant sous les décombres, à en faire perdre la raison, c'est ce qui se trouve sous mes yeux. Et inconsciemment, mes larmes coulent, et coulent, et coulent. Mon cœur se serre, et les sanglots reprennent, de plus belle. La force me manque, l'énergie a prit la fuite, quand à l'espoir, il n'existe déjà plus, et ce depuis bien longtemps.
Quand d'autres vivent leur vie de rêve, je ne fais que survivre. Quand d'autres achèvent leur dernier caprice, je soigne ma dernière blessure. Quand d'autres reviennent de l'école, je sors des décombres. Quand les enfants finissent leur dernier devoir, je pleure la dernière nouvelle de mort. Quand cette soeur crie sur son frère, je n'ai plus que le souvenir du mien pour me bercer la nuit, avant de m'endormir. Et quand les restes de nourriture sont jetés, je pleure mon dernier morceau de pain. Je vis dans une dystopie. Mon monde n'a rien à voir avec le vôtre. Mais dans mon monde à moi, malgré les destructions, le sang, les morts, il y a de l'amour, de l'entraide, de l'amitié, de la fidélité. Dans mon monde à moi, malgré la soif, la faim, la maladie, il y a du bonheur. Alors à choisir, entre un monde plein de vices et un plein de morts, je ne saurais dire. Mais je sais qu'un jour on goûtera aux plaisirs de la vie terrestre que nous n'avons jamais connu, je le sais, car ça m'a été promis, ça nous a été promis, c'est une promesse divine, inéluctable.
Mes larmes cessent de couler, je me redresse, chancelante, je suis épuisée. Comment vous expliquer que je tiens depuis plus de deux jours debout, sans n'avoir ingurgité ne serait-ce qu'un bout de pain. C'est ironique, comment comprendriez-vous, si vous avez le droit à plus d'un repas par jour...c'est plus que moi en trois. Je vacille, mais je ne tombe pas. Le regard rivé sur les feux, qui peu à peu s'éteignent, j'aperçois les maisons écroulées et les corps d'enfants innocents.
D'enfants innocents.
C'est alors qu'un souffle d'agonie me surprend, et je m'empresse de courir vers l'endroit qui a retenu mon attention. Je soulève la pierre la plus proche d'une maison en ruine, et ce qui est offert à ma vue me répugne. Ma haine grandit, sans que je ne puisse l'arrêter. Un enfant d'une dizaine d'années tout au plus, gît, devant moi, sous les décombres. Le sang est tout ce qui recouvre son corps. Ce dernier est perforé, je ne peux rien faire pour ce pauvre enfant, je ne peux rien faire pour cet être humain qui aurait pu être mon frère. Mes larmes coulent encore une fois, et les sanglots me secouent. Je caresse son visage et dégage ses beaux cheveux blonds de son front. Sa beauté est frappante. Ses yeux verts sont larmoyants de douleur et son visage est plein de cicatrices bien fraîches.
Cet enfant s'est fait torturer.
Mes larmes ne cessent de rejoindre mon cou. Il tourne dans un dernier effort son regard vers moi, le visage défiguré par la douleur. Pourtant, quelque part, loin dans ses pupilles, une lueur brille, et cette lueur transperce mon coeur et y amène un espoir qui ne l'avait plus habité depuis la mort de mon père.
«—Ne pleure pas, madame, je te promets de tout raconter à Dieu. Tu verras, Il les puniras. Je Lui dirai tout, je Lui dirai comme ils nous font souffrir, et Il vous aidera. Je dirai tout à Dieu, c'est une promesse, et j'atteste qu'il n'y a pas de divinité en dehors de Dieu.»
Dit-il dans le dernier souffle de sa vie. Sa phrase me fait frissonner entièrement et je tombe à genoux, à ses côtés, agonisante. Oh, mon Dieu. Oh, aide-nous, éloigne de nous ces malfaisants. Éloigne de nous ces démons à l'apparence humaine. Mais oh mon Dieu, sache que nous te sommes reconnaissants pour tout. Oh mon Dieu, nous prions pour que tu nous aides, mais sache que nous sommes reconnaissant de toute chose venant de toi tant que tu es satisfait. Et continue à prendre de nous tout ce que tu désires, et ce jusqu'à ce que tu en sois satisfait. Amin.
Et c'est alors que, dans un moment aussi désespéré que celui-là, je reprends vie. Cet enfant, cet enfant innocent aux yeux de tous, connaîtra le paradis, il sera heureux auprès de son Créateur. Il rencontrera le bonheur, la félicité, alors je ne dois pas être malheureuse pour lui, bien au contraire, sa situation est meilleure que bien des humains au sein de cette terre qui ne se doutent pas de ce qui les attend.
Je remercie mon Dieu de Sa bienfaisance et lui demande de faire oublier à cet enfant tous les malheurs qu'il a pu connaître sur cette terre d'enfer, et de l'accueillir, près de Lui, de la plus belle des manières.
J'essuie mes larmes tout en grimaçant de douleur après avoir touché mes brûlures au visage.
«Ils payeront, ils payeront, seulement après que l'on ai tous perdu espoir, mais ils payeront, n'est-ce pas ?»
-Xinnocent, un enfant qui aurait pu être le vôtre.
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«Et la mort les fait vivre»
Historical Fiction«Sur ce papier, glisse ma plume, assombrie par l'encre de mes pensées noires. Mes pensées, voilées par les mirages me consumant, tournent en boucle et meurent avant même d'avoir laissé place à une once d'espoir.» -Xinnocent -Conformément aux droits...