Le vent balayait les vastes forêts autour du petit village de Belmont, s'infiltrant entre les feuilles, sifflant entre les branches qui craquaient doucement. Une fine pluie tombait sur l'herbe grasse qui en étouffait les échos. Au loin, un éclair déchira le ciel obscur, projetant l'ombre de l'arbre auquel était adossée une petite silhouette noire sur le sol, tel un colosse s'érigeant au firmament.
Les yeux fermés, emmitouflée dans sa cape, Lyra écoutait les sons que les bourrasques portaient à ses oreilles. Son épée reposait contre elle, rassurante, des gouttes glissant le long de son fourreau nacré. La nuit était fraîche, et de petits frisons traversaient son corps de temps à autre. Elle tremblait légèrement, sujette à la morsure glaciale qui s'écrasait sur elle sans jamais s'interrompre. Un nouvel éclair s'abattit, plus proche cette fois, donnant à la lande l'allure d'un austère champs de bataille, ses arbres figés pareils aux carcasses sanguinolentes sur lesquels on marcherait le jour d'après. Pourtant, la jeune fille se sentait bien au milieu du chaos.
Elle avait toujours trouvé du charme à ces sons, qui, au delà de la crainte qu'ils inspiraient aux paysans, renfermaient une sorte de beauté. Comme si, l'espace de quelques heures, la nature exprimait sa colère avec violence.
Lyra frissonna à nouveau, avant de lever les yeux vers la cime de son compagnon sylvestre. Le toit de feuille la protégeait à peine de la pluie, de fines gouttes glissant sur son visage cerné. Elle bailla, avant de laisser sa tête retomber le long de son buste.
Elle et Ivy n'étaient rentrées que quelques heures auparavant, et la jeune fille n'avait pas encore pu se reposer. Elle refusait de se laisser aller au sommeil, ce qu'elle aurait pourtant aimer faire avec un plaisir non dissimulé. La route avait été longue, et ni l'une ni l'autre n'avaient engagé la conversation.
Elle repensa aux paroles de la petite fille... "Vous êtes des héros !" s'était-elle exclamée. Ce compliment avait un goût amer. Des relents fades. Des sensations que Lyra éprouvait chaque jour depuis plusieurs mois...
L'herbe à sa droite crissa, et des bottes apparurent devant elle. Lyra releva la tête, plongeant son regard dans les yeux d'émeraudes d'Ivy, qui la fixait en souriant :
– Je me doutais que tu serais là.
De larges poches soulignaient son regard, et malgré son sourire, elle semblait aussi épuisée que Lyra.
– Allez, ne restes pas sous la pluie, continua-t-elle en lui tendant la main.
L'enchanteur accepta l'aide, et se releva, avant de jeter un coup d'œil au village en contrebas :
– Où sont les autres ?
– Elise et Alexius sont déjà à l'auberge. Duncan ne devrait pas tarder à nous rejoindre.
Elle soupira, avant de frisonner :
– On est vraiment au printemps ? On se croirait en hiver... Rentrons, je n'ai pas envie de m'éterniser sous la pluie.
Lyra hocha la tête, et suivit Ivy qui descendait déjà la pente douce menant à Belmont, laissant derrière elle l'arbre solitaire, posée au milieu du champ de bataille.
***
Lorsque qu'elles ouvrirent la porte de l'auberge, les deux jeunes femmes furent accueillies par les grognements de mécontentements des clients, qui durent affronter les courants d'air d'une fraîcheur mal vue en ce lieu chaleureux. Ivy s'excusa en riant, discutant avec certains des pochtrons, plaisantant avec eux, avant de leur faire signe qu'elle les laissait. Certains en furent déçus, mais n'insistèrent pas.
Presque toutes les tables étaient occupées, et la beuverie allait bon train, les chopes s'emmagasinaient, et certains étaient déjà au bout de leur soirée. Ivy et Lyra se dirigèrent vaille que vaille vers le comptoir, jouant des coudes, traversant la foule qui se tenait devant.
VOUS LISEZ
L'Enfant aux yeux blancs - Libération [Inachevé]
Fantasía/!\ /!\ ATTENTION ! Ceci est le deuxième tome de "L'Enfant aux yeux blancs" ! Si vous n'avez pas lu le premier volet, je vous invite à quitter cette page et, si vous le souhaitez, à revenir une fois votre lecture terminée ! /!\ /!\ En tant que nouv...