Louise

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           Je sais qu'il me regarde. Il ne devrait pas. S'il me regarde c'est qu'il fait attention à moi et s'il fait attention à moi, c'est qu'il s'est attaché.

Je ne veux pas qu'il s'attache. Il ne comprend pas. Il croit comprendre mais il ne comprend pas, il ne comprendra jamais. Et s'il comprenait, il fuirait sans attendre une minute de plus. S'il comprenait, il verrait que je détruis tous ceux qui s'approchent de moi.


           Il ne faisait pas partie du plan. Le plan, c'était de me détruire moi pour ne plus détruire les autres.


Pourquoi fallait-il que je tombe sur un mec aussi gentil, qui rappelle le lendemain au lieu de juste me sauter et de continuer sa vie ensuite ?

Pourquoi fallait-il qu'il me fasse me sentir importante à nouveau ?

Pourquoi fallait-il que je tombe sur celui qui me donne envie de rester ?


          En entrant dans ce bar ce soir là, je pensais tomber, comme tous les soirs précédents, sur un mec à la con. Un du genre qui profiterait de la soirée, et ferait comme si de rien n'était le lendemain. Un du genre qui me virerait de son appart' dès le réveil.

           Mais au lieu de ça il était allé acheté quelque chose pour le petit déj', il m'avait préparé un thé et laissé prendre une douche, il m'avait posé des questions, il s'était intéressé. Il s'était vraiment intéressé et ça m'avait fait du bien. Ça faisait longtemps que personne n'avait été comme ça avec moi, que personne n'avait eu un geste attentionné envers moi.

           Adam avait changé en quelques heures ce que j'avais fait de moi pendant des mois. Je voulais ne plus rien ressentir, me vider de toute envie, de tout sentiment, devenir presque mécanique pour ne plus faire de mal à personne d'autre qu'à moi même et pourtant, la vie l'avait mis sur ma route et j'avais éprouvé du bien être ce matin là, un bien être que j'avais chercher à éviter depuis longtemps mais que je ne pouvais me résoudre à abandonner maintenant qu'il était revenu en moi.


          Il est gentil. Il est vraiment gentil et même en le repoussant depuis 4 mois il ne part pas. Il veut être là, ou plutôt il veut que je sois là. Je ne lui rend pas la tâche facile, je ne lui parle ni de moi, ni de mes pensées, ni de mon passé, je ne fais rien pour qu'il me laisse rester mais il me laisse rester quand même. Il me laisse rester et il gratte petit à petit les couches de ma coquille, il fait tomber un à un les murs que j'ai dressé autour de moi.

Parfois je me dis que j'ai droit à ça, à ce bonheur. Parfois, comme ce matin, j'ai envie de m'allonger avec lui et de rester au lit, et de lui parler, de lui parler de tout, même de Valentin. Mais au lieu de ça je suis allée sous la douche et maintenant je fixe la ville. Je fixe la ville, submergée par la pluie et je pense à Val.


Parlez-moi de la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant