Mary se regarda dans un miroir en miettes jonchant le sol. Elle avait une mine affreuse et du sang séché sur le visage. Elle réarrangea ses cheveux roux en un chignon bâclé et se dirigea gentiment vers le cimetière. Elle rencontra quelques ennemis en chemin. Elle les élimina en soupirant, ses yeux devenant livides à chaque nouvelle victime. Mary savait qu'elle n'était pas à sa place ici, dans sa robe noire raffinée. Alors... pourquoi savait-elle si bien se défendre? Pourquoi était-elle si forte? Gehrman le lui avait dit. Aucun autre Pâlesang n'avait réussi à chasser le Monstre Clérical. Et elle l'avait fait sans trop de difficultés. Et si c'était dans ses veines? Elle se remettait en question alors qu'elle arrivait enfin au cimetière surmonté par une magnifique tour délabrée. Un homme habillé tout en noir découpait des cadavres à l'aide de sa grosse hache. Mary pensait que son estomac remontait le long de son oesophage à chaque coup de hache.
- Alors finalement, vous êtes venue... lança l'homme d'une voix vaporeuse. Vous vous mentez à vous-même. Tôt ou tard, vous vous transformerez en monstre vous aussi. On ne peut pas échapper à cette malédiction.
Mary fronça les sourcils et empoigna fermement sa canne.
- Comment ça?
- Ha! Ne soyez pas dupe, mademoiselle. Si vous êtes ici, c'est parce que vous voulez rejoindre le rang des âmes damnées. Les morts se relèvent, les monstres pullulent. Il n'y a aucun endroit sûr. Seule la Rédemption Divine pourra vous sauver, mademoiselle.
- Mary. Est-ce que j'ai l'air d'une « mademoiselle »?
- Personne n'a l'air de rien en ces temps troublés, je puis vous l'assurer.
- Ça suffit, trancha Mary. Vous êtes sur la liste des proies.
Mary observa sur le sol le corps d'une femme. Les coups de hache l'avaient totalement défigurée et Mary fronça les sourcils.
- Elle était un monstre, elle aussi?
- On n'est jamais trop prudent!
L'homme se jeta sur Mary et tenta de lui planter sa hache dans le visage. Mary para le coup grâce à sa canne et roula pour se relever.
- Putain! Quel enfoiré!
- Que voilà des paroles crues! Le Seigneur n'apprécie pas ce genre de langage, surtout provenant de la bouche d'une femme.
Mary se défendit comme elle put des assauts de l'homme, reculant un peu à chaque coup.
- Je ne suis pas une simple femme. Je suis une Chasseuse. Et devinez quoi? Vous êtes ma prochaine proie.
- Pour ça, il faudrait que vous arriviez à m'atteindre.
L'homme attrapa un fusil à pompe caché derrière une tombe et visa la jeune femme. Mary écarquilla les yeux et plongea au sol lorsque le coup partit. Les balles rebondirent sur les scépultures sans toucher Mary qui se releva.
- Putain de tricheur!
- Je suis un Chasseur!
- Quoi?
Un nouveau coup partit et Mary s'abrita derrière un arbre. Quand Mary voulut observer la position de l'homme, une nouvelle détonation se produisit, la forçant à revenir à sa cachette. Mary trouva une branche d'arbre au sol et sourit. Elle s'en saisit et la balança au loin. La détonation qui s'en suivit lui indiqua que son leurre avait fonctionné. Elle se rua sur l'homme et donna un violent coup sur le fusil à pompe. L'homme lâcha son arme et se tourna vers Mary. Cette dernière aperçut un bandeau sur ses yeux. Elle fronça les sourcils et donna un coup de boule au vieil homme. Elle prit le contrecoup en secouant la tête et se remit en garde. L'homme attrapa sa hache et balaya la zone d'un coup puissant. Mary se baissa très rapidement et planta sa canne dans la cuisse de son ennemi. L'homme hurla et frappa une nouvelle fois dans le vide pour chasser Mary. Elle se faufila entre deux rangées de tombes et se plaqua contre le sol. Le vieil homme grogna en balayant son visage de droite à gauche. Mary s'aperçut qu'il était vraiment très proche.
- Ça ne sert à rien de vous cacher, dit-il. Je sens l'odeur de la peur.
Mary se releva avant de venir discrètement derrière lui. Elle lui enfonça sa canne dans sa nuque et cette dernière ressorti par la bouche.
- Ce n'était pas ma peur, c'était mon extase, répondit-elle.
L'homme cracha un peu de sang avant de s'effondrer lourdement sur le sol. Mary sourit et fit tournoyer sa canne avant de commencer à marcher gracieusement. Puis, elle fronça les sourcil en s'arrêtant. Peut-être que quelque chose clochait. Quand elle se retourna, elle aperçut le vieil homme, debout, regardant dans sa direction. Elle vit subitement sa stature croître et devenir mastoc, énorme. Ses bras étaient si puissants qu'ils arrachèrent une des pierres tombales. Mary écarquilla les yeux et se baissa lorsque la scépulture vola dans sa direction. La pierre lancée rebondit contre une autre avant d'aller heurter un mur. Mary se releva avant de constater les dégâts et fronça les sourcils.
- Saloperie!
Le monstre réitéra une nouvelle fois son exploit, Mary commençant à se déplacer à grandes foulées. La pierre lui tomba tout de même droit dessus. Elle plongea une nouvelle fois, esquivant le projectile de peu avant de remarquer le fusil à pompe. Elle sourit et se rappela mentalement le nombre de coups tirés. Trois. Parfait. Elle se rua sur l'arme en vérifiant la position de son ennemi. Ce dernier avait encore soulevé une pierre tombale au-dessus de lui.
- « Veuillez me pardonner, Seigneur, car j'ai péché... »
Elle appuya sur la détente et le coup de feu envoya l'ennemi contre l'un des murs, puis il se retrouva face contre terre. Mary se hâta lui planta sa canne dans l'omoplate.
- J'ai tué un enfoiré.
Elle tourna son arme et l'enfonça d'avantage afin de transpercer le coeur du Chasseur. Il s'immobilisa pour de bon. Son sang coula jusqu'aux pieds de Mary et la recouvrit entièrement. Elle aperçut un bibelot briller dans la paume de la main de son ennemi inerte et fronça les sourcils. Une fois que le sang eût fusionné avec elle, elle s'empara du bijou. C'était une bague avec une grosse pierre rouge, comme l'avait décrite l'enfant en peine rencontré un peu plus tôt. Elle regarda au-dessous de la bague et lut « Rose Gascoigne ». Elle observa le cadavre de la femme, resté au milieu des tombes, son visage quasiment scindé en deux par la hache de l'homme.
- Qu'avez-vous fait, espèce de salopard?
Elle serra la bague dans sa main et s'assit contre une tombe, soupirant longuement. Une légère brume blanche parcourait le terrain, quelques monceaux de terre le rendaient inégal et quelques ossements décoraient sinistrement le tout. Mary laissa ses yeux livides se balader sur cette vision de désespoir. Elle entendit un cliquetis métallique et aperçut Gehrman dans son sempiternel fauteuil roulant. Elle roula des yeux et se releva avant de frotter la terre sur sa robe.
- J'ai vaincu votre proie.
- Oh, ce n'était nullement ma proie, miss Mary. C'était la vôtre.
- J'en ai assez de cette Chasse, Gehrman. Je souhaite rentrer chez moi.
- Ce que vous souhaitez réellement, miss Mary, c'est guérir.
- Je ne suis pas malade, Gehrman.
Gehrman resta interdit et croisa ses doigts noueux.
- Veuillez me suivre, miss Mary. J'ai quelque chose à vous montrer.
La poupée apparut alors, sortant de la pénombre, tractant le fauteuil de Gehrman. Mary soupira et suivit l'homme dans les rues sombres de Yharnam. Ils repassèrent par des chemins empruntés auparavant par Mary. Gehrman était maintenant témoin de son petit massacre et sourit.
- Attendez, dit Mary.
La poupée stoppa et se retourna.
- Qu'y a-t-il?
- Je reviens.
Elle bifurqua à sa gauche et toqua à la fenêtre. Cette dernière s'ouvrit et elle entendit de nouveau la voix de l'enfant.
- Qui est-ce? Oh c'est vous, madame. Vous avez vu ma maman?
Mary posa la bague sur le rebord de la fenêtre sans rien dire, laissant un immense soupir sortir.
- J... je vois... elle... elle est morte, n'est-ce pas?
Mary acquiesça et des larmes roulèrent le long de ses joues.
- Je... je vous remercie de me l'avoir dit. Je... je ne sais pas ce que je vais faire... Mon père est devenu un monstre, alors... elle l'a rejeté et... après... il l'a enlevée. Quoiqu'il arrive... je veux que mon père paie...
- Je l'ai tué, petit, répondit Mary en sanglotant.
- Vraiment? M... merci madame la Chasseuse! Je vais... je vais essayer de me débrouiller...
- Sois courageux, petit.
Elle quitta la fenêtre et retourna vers Gehrman en essuyant ses larmes.
- Vous avez des sentiments, finalement, remarqua-t-il.
- Fermez-la! On y va!
Gehrman eut un petit rire et ils poursuivirent leur chemin. À un moment la poupée traversa un épais brouillard blanchâtre peu rassurant. Mary s'arrêta une petite seconde avant de le traverser à son tour.
Elle se retrouva entièrement entourée de brume un long moment. Seuls les pas de la poupée, ceux de Mary et le grincement du fauteuil emplirent l'atmosphère. Ils marchèrent pendant un long moment. Il n'y avait aucun moyen de vérifier le temps passé ici. Enfin, un bout de terre, puis une petite île tout entière apparut. Au sommet de l'île se tenait une grande bâtisse en très bon état. Mary fronça le sourcils tandis que la poupée emmena Gehrman près d'une fontaine.
- Où sommes-nous? demanda la jeune femme.
- J'appelle cet endroit « Le Rêve du Chasseur ». Ici, personne ne peut vous faire du mal. C'est un endroit sûr, miss Mary. Il n'y en a pas beaucoup à Yharnam. Ni nulle part ailleurs. Cet endroit est relié à toutes les zones de ce monde dépravé. Il vous suffit de suivre le brouillard. Héhéhé...
Mary secoua la tête et regarda la poupée dans les yeux. Ses mouvements étaient très mécaniques.
- Et elle? C'est votre toutou?
- Oh, je suis navrée...
Mary écarquilla les yeux. La poupée venait de parler, elle en était sûre. Une voix douce, mélodieuse, rassurante.
- Je ne suis qu'une poupée abandonnée. Monsieur Gehrman m'a remise en état.
- E... Excusez-moi, je ne voulais pas vous... enfin... j'ignorais que vous étiez...
- Vivante? Je ne sais pas si je le suis vraiment.
- Miss Mary. Savez-vous pourquoi vous êtes ici?
- Parce que vous en tirez profit?
- Parce que vous êtes une Pâlesang. Seuls les Chasseurs avec des capacités hors du commun peuvent traverser le brouillard. J'ai su que vous étiez spéciale à l'instant où j'ai posé les yeux sur vous, miss Mary.
- Je suis une fillette qu'on a condamné à mort, Gehrman. Mourir ou souffrir, c'est le choix qu'on m'a laissé. Je veux arrêter. Je n'en peux plus, c'est beaucoup trop dur.
- Vous avez prêté serment.
- En effet...
- Vous y ai-je forcé?
Elle secoua la tête.
- La verité, Mary, c'est que tout ça vous arrive à vous. Ce n'est pas juste, mais c'est ainsi. Vous cherchez un coupable. Moi, je vois les choses telles qu'elles sont. Vous êtes la Chasseuse la plus douée que j'aie vue depuis des décennies.
- Cet homme... le père Gascoigne... C'était un Chasseur lui aussi?
Gehrman acquisça gravement.
- Devenu fou. Il a chassé jour et nuit les monstres. Il a fini par en devenir un lui-même. Reposez-vous, miss Mary. Vous êtes la bienvenue ici. Vous pouvez aller où bon vous semble, toucher à ce qui vous plaît et rester autant qu'il vous plaira.
Mary esquissa un petit sourire.
- Je vous remercie Gehrman. Vous êtes toujours un sale type mais je commence à vous apprécier.
Elle sourit en se dirigeant vers l'imposante bâtisse. Gehrman sourit lui aussi.
- Elle ne vous dira jamais qu'elle tient à vous, dit la poupée.
- Je n'en ai nul besoin. Ce qui provient de toi me suffit amplement.
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Bloodborne
FanficLa Chasse est ouverte! Les Cauchemars envahissent les esprits et déferlent sur le monde. Seule la Chasseuse de Sang est habilitée à rétablir l'ordre et la paix, mais acceptera-t-elle cette mission? Pour bannir les Cauchemars, il faut un pouvoir plus...