Chapitre 19 : « Encore et encore... »

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Des mois s'étaient écoulés. J'étais devenue plus belle et plus forte que jamais. Je sortais toujours avec Omar. Ce dernier m'avait confié qu'il était amoureux de moi, mais cela m'avait laissé indifférente. Tous mes ex disaient la même chose et vous avez vu comment cela s'était terminé. Je ne croirai plus un mot de ce qu'un homme me racontera. Je lui avais dit que cela me touchait mais que ce n'était pas encore réciproque. Vous trouverez surement cela méchant mais j'ai préféré être honnête avec lui. J'espère ne plus jamais tomber amoureuse de ma vie. Je ne faisais rien pour retenir Omar. Si je suis sortie avec lui c'est uniquement pour oublier rapidement Papy. Je m'en voulais à chaque fois que je pensais à lui. Parce que je pensais encore à lui. Le mal qu'il m'avait fait, n'avait en rien contribué ou facilité le fait de l'oublier.

Ses parents étaient venus présenter personnellement des excuses à ma famille. Mon père en bon musulman, les avaient acceptées sans la moindre hésitation ; Contrairement à maman qui n'avait pas manqué de montrer son mécontent. Elle se sentait humiliée et avait très mal pour moi. Vous savez quoi ? Les parents de Papy avaient demandé à me voir ce jour-là, mais j'avais catégoriquement refusé de sortir de ma chambre, même si mon père me l'avait reproché après. C'est trop facile. Ils avaient laissé leur fils faire n'importe quoi et pensaient que de simples excuses pouvaient changer quelque chose à la douleur que je pouvais ressentir. Pour qui se prenaient-ils ? Ils étaient partis tout autant gêné par le fait que j'avais refusé de les recevoir.

Aissatou m'avait envoyé un message audio sur WhatsApp à cet effet ; Elle y disait qu'elle ne savait pas quoi me dire. Elle ignorait juste comment m'annoncer que son frère avait subitement décidé d'épouser son ex de longue date alors qu'il avait déjà demandé ma main.

Ce qu'elle avait à dire ne m'intéressait guère. Je suis très rancunière, je sais. Je n'aime pas les demi-mesures. Je vais m'arrêter là car si je continue de parler de Papy et de sa famille, je risquerai de provoquer à nouveau mes crises d'angoisse. Pour beaucoup, ce sont des maladies de blanc mais je vous jure que non. C'est tellement douloureux. On a l'impression de ne plus contrôler son corps, encore moins son cœur. C'est vrai que ce n'est pas mortel mais cela peut provoquer de graves maladies si l'on ne fait pas attention.

J'avais arrêté de me torturer l'esprit en me disant que c'était moi le problème. Mes ex avaient jusque-là tous un point en commun, qui était le fait qu'ils m'avaient tous trahi. Tous, tels qu'ils étaient. J'étais restée des jours durant à essayer de trouver la raison pour laquelle ils m'avaient tous traité de la sorte. J'essayai de trouver un lien. Ce n'était qu'après en avoir parlé avec Mamy qu'elle m'aida à ouvrir les yeux. Elle avait fini par raconter des histoires d'amis en commun qui avait traversé des moments semblables aux miens. Le problème ne venait pas de moi. Je n'ai ni mari de nuit ni quelque chose à me reprocher. Je suis juste tombée sur des hommes peu sérieux. Ces zouaves m'avaient fait complétement douter de l'existence des hommes bons...

Omar avait voulu me passer sa mère au téléphone à plusieurs reprises mais j'avais refusé. Je ne voulais pas impliquer nos familles.

J'avais téléphoné à Abdallah afin de prendre de ses nouvelles vu qu'il ne le faisait jamais. J'avais le sentiment que mon frère n'était pas heureux. Il n'avait même pas besoin de me le dire mais je le sentais. Je parie que s'il avait eu le choix, il n'aurait jamais épousé Khalima. Etant donné que je m'ennuyais, je décidai de rendre une petite visite inopinée à Karina. Avais-je déjà précisé que cette dernière vivait seule ? Ses parents vivent en Guinée Bissau. Elle avait donc loué un petit studio. Karina était très débrouillarde. Elle travaillait comme commerciale dans une société agroalimentaire. A cet effet, ils avaient mis un véhicule à sa disposition. Elle aidait beaucoup ses parents. Son père était adorable mais avait un problème majeur avec les femmes. Ils avaient des enfants à chaque coin de rue de Bissau. Il n'était marié qu'à la maman de Karina mais avait beaucoup d'enfants hors mariage. Certains avaient été reconnus, d'autre non. Je me demandais comment faisait sa femme pour tenir toutes ces années. Faut vraiment le faire hein ! Chaque personne a un seuil de tolérance différent. J'étais en congé mais je ne savais même pas comment utiliser mon temps. J'avais prévu d'aller passer quelque jour chez Stéphanie mais cette dernière part ce soir en France, pour rencontrer la famille de son chéri. Il avait demandé sa main. Pourquoi les européens sont plus romantiques que les africains ? Il avait fait une très belle demande de main, digne de celle que l'on trouve sur YouTube. Il était en déplacement professionnel à ce moment. Il avait attendu le jour de son anniversaire pour faire une magnifique vidéo qu'il m'avait ensuite envoyée. Sur la vidéo, il avait demandé à ses collègues de tenir chacun une lettre et, tous rassemblés, ils avaient formé :

« Steph, veux-tu m'épouser ? »

Il avait également rajouté qu'il se mettrait à genou dès son retour. Cette demande avait subitement animé son anniversaire. C'était la déche, et j'étais juste allée lui rendre visite et apporter mon PC pour faire jouer la vidéo. Devinez quoi ? Je serai le témoin lors de son mariage civil. N'était-ce pas magnifique ?

Steph ne pouvait qu'avoir un mari blanc. Elle était « je m'en foutiste de nature ». Elle faisait tout ce qui lui passait par la tête et assumait pleinement ses responsabilités. Elle avait perdu sa virginité lorsqu'elle avait dix-huit ans avec son premier amour. Il le lui avait proposé plusieurs fois, elle avait donc décidé de se lancer lorsqu'elle fut prête. Curieuse de nature, je lui avais posé des tonnes de questions. Je voulais savoir si c'était aussi douloureux qu'on le prétendait ? Je lui avais également demandé comment s'était-elle sentie après vis-à-vis de ses parents ? C'est une grande responsabilité de se donner à quelqu'un. Ce que j'aimais bien chez elle, c'est qu'elle ne faisait pas comme celles qui se faisaient passer pour des saintes nitouches alors qu'elles ont des vies sexuelles très actives.

Bon assez parlé de Steph...

Arrivée chez Karina, je constatai qu'il y avait une voiture semblable à celle de mon frère garée à l'extérieur de l'immeuble. Je parle bien d'Abdallah. Je ne connaissais pas sa plaque d'immatriculation par cœur mais j'étais presque sûre que c'était la sienne. J'étais essoufflée à cause des escaliers. A peine étais-je arrivée au cinquième que j'entendis des voix familières : celles de Karina et d'Abdallah. J'avais vu juste alors. C'était bien sa voiture. Je me cachais délicatement, histoire de comprendre ce qui se passait. J'entendis Karina supplier mon frère de rester plus longtemps :

-KARINA : Restes encore un peu BB stp.

Je pensais avoir mal entendu mais ce n'était pas le cas. Mon frère répondit avec une voix remplie de regrets :

-ABDALLAH : Je te jure que je pars à contrecœur et tu le sais. Je ne peux malheureusement pas rester plus longtemps, mais je reviendrai demain mon amour.

Après ces quelques mots, il serra Karina très fort contre lui. Devrai-je blâmer mon frère ou mon père ? Qui l'avait tout bonnement forcé à épouser une femme avec qui il avait commis une bêtise ? Moi qui croyait qu'il aimait Khalima ou même qu'il aurait fini par l'aimer en vivant avec elle. Ce n'était visiblement pas le cas. J'avais de la peine pour lui. Tous les soirs, il rentrait se blottir contre une femme qu'il n'aimait pas. Karina m'avait-elle raconté des bobards ? Avaient-ils un jour cessé de sortir ensemble ? Etait-ce la raison pour laquelle Karina était déboussolée lorsque mon frère lui avait confié qu'il était contraint d'épouser Khalima ? Je me posais de nombreuses questions. Pourquoi ne m'avait-elle rien dit à ce sujet? J'ai toujours cru qu'il n'y avait aucun secret entre nous. Dès que j'entendis la porte se refermer et mon frère descendre, je sortis de ma cachette puis attendit dix minutes avant d'appuyer sur la sonnette. Karina prit tout son temps avant d'ouvrir. Elle avait l'air si joyeuse. J'ignorais si c'était parce que cela faisait un moment que je n'avais pas mis les pieds chez elle ou si c'était le fait d'avoir vu mon frère. Elle me fit entrer rapidement. Je m'attendais à ce qu'elle fasse allusion à ce qui se passe entre eux mais ce ne fut pas le cas. Elle me parla de son soit disant autre copain puis me demanda comment est-ce que je me sentais depuis lors. J'étais un peu frustrée. Moi je ne lui cachais rien. Elle sait très bien que je ne suis pas une menteuse. Pourquoi ne m'a-t-elle rien dit ?

« Il n'y a pas plus prude que celui qui a un secret à cacher », George Sand.

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Mon rêve à tout prixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant