Chapitre 21 : « Le repos éternel... »

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Steph était enfin de retour. Elle m'avait ramené pleins de belles choses dont des chocolats. Elle avait adoré son baptême de l'air. Sa belle-famille était adorable et l'avait vraiment gâtée. Il y a des personnes qui sont nées avec la chance : c'était le cas de Steph. Elle n'avait eu de déception qu'une fois dans sa vie. Elle n'avait aucun problème pour obtenir ce qu'elle voulait. Chaque personne naît avec son étoile. La mienne est sûrement bloquée quelque part...

Mamy était allée voir un spécialiste comme convenu qui, après plusieurs observations, lui avait assuré que tout était normal. Il avait demandé à voir Talla. Si également c'était le cas, il faudrait juste de la patience. L'idée d'en parler à nouveau à Talla la stressait beaucoup. Il n'allait tout de même pas la manger. Et puis c'est quelqu'un de compréhensif. Elle connait son homme mieux que quiconque et devrait donc être en mesure de trouver les mots justes pour le convaincre. Et puis, avoir un enfant leur serait profitable à tous les deux ; Mamy n'avait plus le temps d'écouter mes problèmes personnels. A chaque que j'essayais de dire quelque chose, elle m'interrompait pour parler encore et encore de la même chose. Cela m'agaçait. Elle n'était pas la seule à avoir des problèmes quand même. J'avais décidé de la fuir pendant quelque temps. J'avais également besoin de me confier à une personne. Steph n'avait pas de temps à cause des préparatifs du mariage. Il ne me restait plus que Karina ; Mais honnêtement, depuis que j'avais découvert son secret, je n'arrivais plus à me confier à elle comme avant. Je n'ai aucun secret pour elle alors je ne sais pas pourquoi en aurait- elle pour moi ?

Le grand frère de mon père avait fini par être admis à l'hôpital. Il n'allait pas bien du tout. Mon père était tellement inquiet qu'il en était devenu désagréable. C'était son unique frère, quelque part je le comprends. Mon oncle était très riche avant. Il était PDG dans une société de la place, mais, avait également d'autres petits business. Un beau jour, il finit par avoir de gros problèmes. C'était comme s'il ne pouvait plus supporter son bureau. Il y plantait son travail puis rentrait tranquillement chez lui. Le navire finit alors par couler et il se fit renvoyer. Petit à petit, les autres de ses business subirent le même sort. Il était endetté et finit même par perdre sa villa avec piscine à Dakar. C'est ainsi qu'il finit par s'installer à Kaolack, au sein de leur maison familiale. Toute cette histoire le rongea. Il commença par se consoler dans l'alcool. Il était tellement habitué à la belle vie, que tomber à nouveau dans la misère lui était insupportable. Sa femme et ses enfants avaient tout fait pour lui faire comprendre que c'était la volonté divine et qu'il se devait de l'accepter. Après avoir été ramassé plusieurs fois ivre mort, sa femme menaça de le quitter juste pour qu'il y mette un terme. Il tenait beaucoup à elle alors il finit par y renoncer mais sombra ensuite dans la dépression et fut évacuer à Dakar pour être hospitalisé dans un centre spécialisé. Il y fut admis pendant deux mois. A sa sortie, il n'était plus le même. Mon oncle était une coquille vide. On dirait que la vie ne l'intéressait plus. Il se terrait chez lui. C'est comme s'il était en prison. Il mangeait à peine et pensait beaucoup. C'est là que le cauchemar commença. Il se sentait mal et se plaignait de douleur par ci et par là. Mon père l'emmena voir les meilleurs professeurs à ses frais. Et c'est ainsi que nous avions découvert qu'il était atteint d'un cancer. Cette maladie sournoise qui avait le pouvoir de transformer et détruire presque toutes les personnes qui en était atteint. Cela bouleversa tout le monde surtout mon père. Son grand-frère était tout pour lui. C'est la raison pour laquelle, presque chaque weekend, il se rendait à Kaolack afin de lui rendre visite. Cette nuit, sa femme avait téléphoné au vieux à 2H du matin sur le fixe. Elle était paniquée ; Elle avait essayé de le joindre sur son portable mais celui-ci était éteint. Le fixe fut sursauter tout le monde lorsqu'il sonna à pareille heure. Nous étions tous persuadés que c'était pour nous annoncer un décès. Tata Adja expliqua au vieux que mon oncle n'allait pas bien du tout et qu'il saignait beaucoup du nez. Elle rajouta que la manière dont il était soigné ici était assez déplorable. Mon père lui demanda d'appeler immédiatement une ambulance afin de le faire évacuer sur Dakar. Qu'il téléphone de ce pas au spécialiste qui a l'habitude de le suivre à Dakar. Pr Ndiaye, il s'appelle. Il avait fini par être proche de la famille car c'était lui qui suivait mon oncle ici. Il était très brillant et très disponible. Nous étions tous assis au salon. Maman avait fait ses ablutions et avait son chapelet avec elle. C'est ce que j'admirais le plus chez elle. Quel que soit le cas de figure, elle ne s'affole jamais. Elle se contente juste de prier. Mon père faisait les cent pas. On sentait nettement que ça n''allait pas. Le lien de sang est très fort. Je ne le souhaite pas, mais si cela devait arriver à l'un de mes frères, je serai tout aussi abattue. Pr Ndiaye avait donné son accord à papa. Ils vont admettre mon oncle à son hôpital. C'était un ouf de soulagement pour nous tous. Tata Adja attendait l'ambulance qui ne devait pas tarder. La pauvre, ce qu'elle traversait était terrible. Elle était passée de la richesse à la pauvreté pratiquement, de la santé à la maladie, malgré ça, elle est restée aux côtés de mon oncle. C'est ça une VRAIE femme. Elle ne se contente pas de prendre la poutre d'escampette au moindre problème. C'est elle qui cuisinait pour lui, c'est elle qui le lavait quand ça n'allait pas. Elle ne le laissait jamais seule. Elle savait trouver les mots justes pour réconforter son mari. Jamais elle ne lui avait laissé entendre qu'elle avait pitié de lui, ou qu'elle souffrait. Maman me racontait qu'elle pleurait le plus souvent sous la douche. Voir son mari autant souffrir et se dégrader de jour en jour était douloureux. Mon oncle avait choisi une très bonne femme, en voilà la preuve. Après avoir fait son chapelet, ma mère se rendit dans la cuisine afin de faire un peu de café pour nous ainsi que des amuses bouches à grignoter. Mon père avala son café d'un trait et toucha à peine aux amuses bouches. Il retirait ses lunettes toutes les 10 minutes puis essuyait ses yeux. Ma mère me fit un geste discret pour me demander de les laisser seuls. Je retournais alors dans ma chambre. J'entendais ma mère essayer de le calmer et de le rassurer.

Le fait de rester dans ma chambre était encore plus stressant. Cela faisait bientôt une heure que j'y étais. Aucune nouvelle ni rien. J'espère seulement que s'il y a du changement, maman m'en informera. J'entendis le téléphone portable de papa sonner. Je sortis immédiatement de ma chambre. Quand j'arrivai au salon, je vis une larme couler sur la joue de mon père. C'était la toute première fois que je le vis pleurer. Je compris alors que c'était fini. Maman qui ne voulait pas que je le vois dans cet état, me demanda de retourner à nouveau dans ma chambre. Mon père avait donc des sentiments au point de pleurer ? C'était tout simplement surprenant.

Mon oncle était mort pendant l'évacuation, dans les bras de sa tendre et chère épouse qui l'avait accompagné et soutenu jusqu'au bout. Je me mis à pleurer. Je sais qu'il allait enfin pouvoir se reposer mais mon oncle était quelqu'un de très bien. Mes frères et moi étions même plus proches de lui que du vieux. C'était lui qui avait l'habitude de nous sortir lorsque nous étions plus jeunes. Il nous gâtait. Il passait son temps à nous offrir des cadeaux et à nous donner de l'argent. Tout ce que le vieux nous interdisait, lui nous l'autorisait. Nous nous taquinions mutuellement. C'était notre père. Il comblait l'affection paternelle que nous n'avons jamais eue avec mon père et qui pourtant, on donnait chaque jour aux enfants d'autrui. Je fis comme maman, j'essuyai mes larmes puis alla faire mes ablutions. La meilleure chose que je pouvais faire pour lui, c'était de prier et non de pleurer. Le souhait de mon oncle était qu'il soit enterré à Dakar. Savez-vous pourquoi ? Parce qu'il disait qu'il avait tout obtenu ici et que ses problèmes lui avait fait quitter Dakar pour Kaolack, contre son gré. Nous n'avions pas fermé l'œil de la nuit. J'avais téléphoné à Mohamed et Abdallah pour les prévenir. Ils étaient tout aussi tristes que nous. Mohamed avait alors décidé de prendre le premier avion. Il avait demandé à papa de lui donner le temps d'arriver avant d'enterrer notre oncle. Il tenait absolument à l'accompagner dans sa dernière demeure. Papa accepta. J'étais contente de revoir mon frère, mais j'aurai également préféré que ce soit dans de meilleures circonstances. J'avais remis plusieurs fois le fait d'aller lui rendre visite à Kaolack. Tout cela parce que j'avais la flemme de me taper presque trois heures de route. Je m'en voulais tellement. Et Dieu sait que ce n'était pas l'occasion qui me manquait. Lorsqu'il avait appris que le mariage avait été annulé, il m'avait téléphoné pour me réconforter. Ses mots résonnent encore dans ma tête :

-TONTON : Maman (c'était ainsi qu'il m'appelait, je n'ai jamais su pourquoi), c'est dur, mais dis-toi juste que le Bon Dieu ne fait que ce qu'il y a de meilleur pour chacun d'entre nous. Aujourd'hui tu as mal, mais plus tard, tu lui rendras grâce. Tu aurais pu te marier ce jour-là comme prévu et en allant en lune de miel, faire un accident sur la route et mourir. Il y a plusieurs autres scénarios à envisager. Ne soit pas pressée, ton timing arrivera.

Il se mit à me taquiner avant de raccrocher. Si jamais j'avais su...

Si j'ai bien retenu une chose dans tout cela c'est « qu'il ne faut jamais reporter au lendemain ce que l'on peut faire le jour même ».

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Mon rêve à tout prixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant