La première chose à faire en terrain inconnu, c'était d'étudier l'ennemi. Et en l'occurrence, l'ennemie de Brunehilde se trouvait être une blonde d'un mètre soixante-dix aux courbes sculptées. Elle faisait régulièrement les pages de la presse people adolescente grâce à un sens du style inné. C'était la petite-amie de l'héritier. Et le pire, c'est qu'elle était d'une gentillesse et d'une générosité rares, rendant sa popularité tout à fait légitime. Autant de qualités dans une seule personne, cela ne pouvait que cacher quelque chose de louche.
Cependant, ce n'était pas ça qui faisait de Jessica de Jolibois une cible à abattre. Non, c'était plutôt ses résultats scolaires.
Si Brunehilde avait réussi à obtenir une place dans ce lycée après deux ans de tentatives infructueuses, c'était bien grâce à ses notes exceptionnelles. Elle pulvérisait ses camarades avec une facilité déconcertante. Néanmoins, là, elle sentait que ce serait différent. Après une rapide recherche et une interrogation en règle, elle avait appris que Jessica était la meilleure de la promotion, toutes classes confondues. Et ça, ce n'était pas tolérable.
C'était pour ces raisons que Brunehilde poignardait en rythme, avec son couteau, la pomme qu'elle avait prise comme dessert à la cantine, imaginant sans doute à la place du fruit le visage parfait de Jessica.
« Qu'est-ce qu'elle t'a fait, cette pauvre pomme ? »
Son bras suspendu dans l'action, prêt à continuer son méfait, Brunehilde bougea simplement les yeux et tomba sur le visage circonspect de Sixtine, toujours accompagné de ses boucles blondes et de son regard chocolat. Elle était mignonne, mais pas à se rouler par terre. Pas une rivale potentielle, donc... à l'inverse de Jessica.
Sixtine était la fille d'un des plus grands fabricants de nourriture pour animaux du pays. Elle était riche, mais elle était une nouvelle riche et ça, cela semblait être préjudiciable si l'on voulait rentrer dans certains cercles très select. Par chance, Sixtine n'en avait pas envie : elle était très bien dans son coin, à papillonner amicalement (et surtout pour les potins) de groupe en groupe, sans avoir à s'attacher.
Toujours de mauvaise humeur (ce qui ne changeait pas de son habitude), la jeune fille ne répondit pas. Pour le moment, elle n'avait pas comme ambition de s'occuper du côté social. Cela viendrait, néanmoins, son plan n'était pas encore assez finalisé.
Cependant, cela n'empêcha pas du tout Sixtine de venir s'asseoir face à elle, avec son plateau alors vide. Il y avait certaines personnes qui ne savaient pas quand l'affaire était perdue d'avance.
« Je peux m'asseoir là ?
- Pourquoi tu me poses la question alors que tu l'as déjà fait ? grogna Brunehilde.
- Par politesse, j'imagine... Enfin... Est-ce que c'est vrai ? »
L'avantage qu'avait Sixtine lorsqu'il s'agissait d'approcher notre amie aux cheveux criards, c'était qu'elle n'en avait strictement rien à faire de se faire envoyer promener. Et puis pour être honnête, elle avait un intérêt certain dans cette affaire : elle aimait les ragots et la nouvelle avait l'air d'en être une source particulièrement abondante. Surtout vu l'événement qui s'était passé quelques jours plus tôt.
« Qu'est-ce qui est vrai ? demanda la cible en découpant avec méthode le reste de sa pomme. »
Brunehilde avait une petite idée de ce dont elle parlait. Toutefois, il ne fallait pas attendre d'elle qu'elle avoue. Elle s'était rendu compte après coup qu'agresser l'héritier du trône, fût-il maladroit et inutile, n'était pas la meilleure des méthodes pour arriver à ses fins. À savoir, conquérir le lycée. Pour le monde, elle verrait plus tard.
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Fuck you, royalement vôtre
ChickLitLa première fois que Jolan de Barbon, héritier du trône de France, rencontra Brunehilde Leroy, roturière invétérée et magouilleuse à ses heures perdues, elle lui fit un doigt d'honneur. Alors comment, après une entrée en matière aussi catastrophique...