Chapitre 30

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Martina

Je ne sais pas à quoi je m'attendais. Je pensais vraiment qu'il aurait réagi différemment. Je suis anéantie, tout est fini... Je l'ai vu à son regard ; je le dégoûte. Il ne me pardonnera jamais. Il a raison, je n'ai même pas pensé à Ylana, qui n'a pas eu de papa. Je vais le laisser seul avec elle ce weekend. La dernière chose que je veux, c'est me disputer davantage avec lui. Il est blessé, je le sais, je le connais. Il faut que j'attende que sa colère s'atténue avant de pouvoir lui reparler calmement. Donc, c'est mieux que je m'en aille.

Je ramasse mon sac rapidement, et récupère ma veste. La famille de Jorge sort de la cuisine petit à petit. La tension est palpable, tout le monde est vraiment mal à l'aise. Sa mère me regarde, l'air désolée. Je sais qu'elle le savait. Je ne sais juste pas comment elle le savait, car monsieur Blanco n'avait rien dit à personne. Je me dirige vers la porte d'entrée et là, je sens qu'elle essaie de me rattraper.

- Attends... Ne t'en va pas, il va redescendre, j'en suis sûre.

Je passe mon sac sur mon épaule en la regardant désolée.

- Je ne pense pas, dis-je en reniflant. Je préfère le laisser tranquille pour ce soir, je reviendrai chercher Ylana dimanche soir. Je vais apporter son sac de change.

- D'accord, mais laisse-lui du temps. Je comprends que tu aies voulu le laisser accomplir ses rêves, et tôt ou tard, il comprendra que tu as agis de la sorte parce que tu l'aimes.

Les larmes coulent à nouveau. Elle a toujours été merveilleuse avec moi, et elle me le démontre encore en ce moment. J'enfile mon veston, il ne fait pas froid en Argentine en ce moment, juste un peu frais quand le soleil est couché. Je fais glisser la lanière de mon sac sur mon épaule.

- Merci beaucoup pour le repas... Je suis désolée, pour tout vraiment.

Ana me sourit doucement. Je sais qu'elle m'a toujours considérée comme sa belle-fille. A l'époque, quand nous étions adolescents et totalement fous amoureux l'un de l'autre, elle faisait tout pour nous et notre relation. Jusqu'à ce que cet imprévu fasse tout changer, et que Jorge parte à Paris. Si je n'étais pas tombée enceinte tout aurait été différent, mais s'il n'étais pas parti cela l'aurait été aussi.

Elle m'embrasse sur la joue tandis que je passe la porte d'entrée. Je sors la clef de ma voiture et sors le gros sac d'Ylana du coffre. Je suis obligée de l'emporter partout où je vais car c'est miss catastrophe. Elle renverse toujours tout partout. J'ouvre à nouveau la porte et donne le sac à Ana, qui me sourit doucement. Je sais que je lui fais pitié, mais je sais aussi que son regard est rempli de compréhension. Je sais que tout le monde est en colère contre moi, et maintenant que cette vérité a fait l'effet d'une bombe, je n'ai plus qu'à attendre que les blessures cicatrisent. Je la serre dans mes bras et elle me frotte doucement le dos.

- Je vais essayer de lui parler, je te le promets, dit-elle doucement dans mon oreille.

Je renifle encore, et m'écarte doucement.

- Ne prenez pas parti pour moi... Il est en colère et c'est justifié. Prenez soin de lui, et d'Ylana, s'il-vous-plaît.

- Bien évidemment.

Je rebrousse chemin et retourne à ma voiture. Je me sens terriblement mal, et je ne peux en vouloir qu'à moi même. Mais quelle idiote bordel ! Je donne un coup de pied dans le pneu de ma voiture, et cet excès de violence m'apaise étrangement, mais je sais que tant qu'il ne m'aura pas pardonné je ne serai pas en paix.


Jorge


Une fois dans ma chambre, je dépose la petite sur mon lit. Elle me scrute intensément, car j'ai toujours des larmes qui roulent sur les joues, et je ne pleure jamais. Je m'accroupi devant elle, et prends ses petites mains. J'adore les mains des enfants, ça montre que toutes les petites choses ne peuvent saisir que l'essentiel.

- Tu es triste, et maman aussi.

Elle parle d'une mine boudeuse.

- Tu as raison. Je suis triste, et ta maman aussi. Mais mon ange, tu ne dois pas t'inquiéter pour nous.

Elle me fixe, j'oublie des fois qu'elle n'a que trois ans.

- Tu te souviens, que tu m'avais dit que tu ne savais pas où était ton papa ?

- Oui, il n'est jamais venu à mon anniversaire.

Elle dit ça sur un ton neutre, mais mon coeur se resserre tellement que ça en est douloureux. J'ai raté trois de ses anniversaires, c'est énorme. Et sa naissance... J'aurais tellement voulu être là. Putain Tini.

- Eh bien, tu sais, bien avant que tu ne sois là, maman et moi on était amoureux.

- Comme maintenant ? dit-elle en penchant légèrement la tête sur le côté.

- Oui voilà. Mais quand tu étais dans le ventre de maman, que tu n'étais pas encore vraiment là, j'ai du partir à Paris, tu sais avec l'avion, et c'est vraiment très loin d'ici.

- Et maman ?

Comment expliquer cette histoire à un enfant de trois ans ? Je ne veux pas faire passer Martina pour la méchante de l'histoire, je ne peux pas risquer que sa fille lui en veuille. La seule chose qu'elle a besoin, c'est de combler enfin ce manque de paternité, béant depuis toujours pour ce petit être innocent.

- Maman a du rester ici. Après, tu es née, et maman est restée ici pour s'occuper de toi pendant que moi je suis resté là-bas.

Elle ne dit rien. Elle n'a que trois ans Jorge, il faut le lui dire clairement.

- Toute cette histoire pour te dire que je sais qui est ton papa.

Elle saute légèrement du lit et se met sur ses pieds, souriant comme une folle.

- Vraiment ? C'est qui, c'est qui ?

Elle sautille comme une folle, comme si le père noël était passé une deuxième fois. Mais en fait non, ce n'est pas comparable. Je ne saurais pas savoir ce que ça fait d'enfin savoir l'identité de son père, trois ans ou pas.

- Mon ange, je suis ton papa.

- Toi, papou ?

Elle fait une drôle de tête.

- Oui, je ne le sais que depuis aujourd'hui.

Elle me saute dans les bras et rit aux éclats. Forcément, elle ne se rend pas compte des conséquences derrière toute cette situation.

- Trop géniallllll ! Tu viendras à mon anniversaire, hein papou ?

Une larme coule instantanément le long de ma joue.

- Bien sûr mon coeur, je ne raterais ça pour rien au monde.

Je la serre contre moi. Je suis père, c'est complètement irréel, et contrairement à ce que certaines personnes pourraient penser, c'est la meilleure sensation dans le monde.

¿Dónde está tu mamá ? {JORTINI} Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant