||Souper de famille||

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19 août

Une fois par mois, environ, nous nous réunissons en famille pour souper. Même si ma grand-mère vit avec nous et que ma tante, mon oncle et leur fils vivent en haut, on ne mange jamais ensemble. Nous sommes tous des épaves solitaires.

D'abord, il y a ma mère. Figure de proue de la famille, c'est sensiblement elle qui décide de tout : ce qu'on peut et ce qu'on ne peut pas faire, ce qu'on doit faire surtout. Elle nous mène tous par le bout du nez et nous l'écoutons tous. Mais personne ne la connaît vraiment... Comme moi au fond.

Mon père, c'est à peine si je connais la couleur de ses yeux. S'il n'est pas en train de travailler comme un fou - du moins, c'est ce qu'il dit-, il dort sur le divan. S'il na pas un verre dans le nez.

Et puis mon frère, c'est un zombie. Il se déplace dans la maison pour manger, aller aux toilettes, ce genre de chose, mais la plupart du temps, il s'enferme dans sa chambre pour jouer à ses jeux vidéos. Nous nous sommes peut-être échangé dix mots depuis sa naissance.

Ma tante et mon oncle ont un comportement assez similaire à celui de mes parents. Enfin, je crois, je ne les croise pas souvent. Tout ce que je vois d'eux, c'est ce qu'il veulent bien montrer à ces fameux soupers.

Finalement, leur fils qui a toujours le nez plongé dans ses livres et qui fera certainement un grand médecin. Il faudrait cependant qu'il arrête d'avoir peur du monde.

Nous formons une belle clique de misérables. Mais pour se donner l'apparence d'une superbe famille unie, nous organisons un souper de famille de temps à autre, généralement à tous les mois, pour échanger les dernière mondanités. Et cette fois-ci, j'ai gaffé. J'ai terriblement gaffé.

J'ai osé interrompre ma mère tandis qu'elle parlait pour la contredire. Je savais bien qu'elle serait furieuse, que son regard désapprobateur me suivrait partout pendant une semaine au moins. Sauf que je n'ai pas pu m'en empêcher. Un mal-être me m'oppressait la poitrine et si je la laissais poursuivre son baratin, je sentais qu'il allait me tuer.

Mais maintenant, j'ai l'impression de n'être rien aux yeux de ma mère. Rein de plus qu'un déchet encombrant. C'était peut-être une mauvaise idée. Je suis peut-être trop faible? Non, je le refuse. Je doit lui prouver qu'elle a tort, qu'elle n'a pas à être déçue de moi.

-Constance

ConstanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant