Les Chroniques "un point c'est tout."

Tout un monde à aimer

Je suis un grand voyageur et j'ai toujours pensé que je le serai jusqu'à ma dernière heure...

J'ai déjà fait plusieurs fois le tour de la planète. Un peu partout dans le monde, j'ai fait des fêtes pendant lesquelles j'ai chanté jusqu'à pas d'heure à tue-tête. Au cours de mes voyages, j'ai rencontré des gens intelligents et des gens bêtes, des gens bons mais aussi des gens malhonnêtes, ou encore d'autres qui avaient la grosse tête. Et, toutes ces années, c'est le bonheur qui fut le seul guide à ma quête.

J'ai croisé des gens pauvres et des gens riches dont certains vivaient bien et d'autres voyaient leur vie partir en friches. J'ai arpenté des sentiers escarpés qui m'ont mené jusqu'aux plus hauts sommets enneigés que notre monde puisse compter. Sur les plus belles vagues j'ai glissées et dans les eaux les plus pures du globe je me suis baigné. J'ai visité les plus incroyables cités que les Hommes aient jamais créées. J'ai tour à tour enlacé des filles aux yeux plissés, à la peau marbrée, au teint halé et au corps métissé ; comme si j'avais voulu épouser cette formidable diversité.

J'ai habité dans des bâtiments délabrés et dormi dans des chambres aux murs échancrés. J'ai campé au cœur de natures préservées, je me suis perdu dans l'immensité de déserts immaculés et j'ai marché sur des banquises qui se fissuraient sous mes pieds. J'ai admiré des animaux sauvages menacés en me désolant que plus tard les enfants de l'humanité ne sauraient peut-être même pas qu'ils ont un jour existés. J'ai respiré des airs bien oxygénés et d'autres beaucoup trop pollués ; et c'est là que j'ai compris que la terre était en train d'étouffer, que ses jours étaient comptés, et que nous avions le devoir de la sauver et de réparer tous les dommages que nous lui avions causée.

J'ai pris des avions dans plein d'aéroports, j'ai vogué sur des bateaux allant de port en port et je suis monté dans des trains qui fendaient les campagnes en un temps record. Et, tout ce temps, je ne me suis jamais questionné sur mon sort ni sur le sens de mon existence, cela sans doute parce-que je l'ignorais encore.

Je suis allé très loin à tel point que j'ai exploré ce monde dans chacun de ses recoins. Et, depuis toujours, je n'ai rien qui me retient, aucun endroit qui soit vraiment mien et dans lequel vivre le quotidien jusqu'à ma fin.

Pendant longtemps, je m'en moquais mais maintenant je souffre de n'avoir personne à qui dire que je m'en vais, de n'avoir personne avec qui me disputer puis faire la paix, de n'avoir personne avec qui dépenser plus de temps que je n'en ai, et de n'avoir personne qui me dise « aujourd'hui je t'aime et pour toujours je t'aimerai ».

Je craignais de ne faire qu'errer sans jamais trouver quelqu'un avec qui me poser. Et puis, finalement, la hasard de la vie m'a fait la rencontrer et cette planète que j'ai découverte pour satisfaire mon instinct d'aventurier a soudain cessé de tourner quand son regard sur moi s'est posé. Elle m'a appris à aimer avec plus d'amour encore que je n'aurais imaginé en posséder. Elle m'a donné une maison dans laquelle j'ai eu envie d'habiter, un lit dans lequel m'abandonner à nos étreintes passionnées, une épaule sur laquelle me confier, un chemin que je veux emprunter et un destin que je me rêve d'embrasser avec elle à mes cotés.

Si je me suis installé au creux d'une vallée dans les Pyrénées ce n'est pas pour autant que j'ai cessé de voyager. Seulement, désormais, je le fais accompagné de ma bien-aimée et, chaque fois, nous revenons nos bagages remplis de souvenirs que nous partageons avec notre enfant avant qu'il ne devienne lui-même un jeune aventurier sur le point de s'en aller pour découvrir ses propres contrées.