Chapitre 8

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L'amour est une chose douce et amère. La plus agréable des tortures qui soient. L'amour porte dans une danse longue et effrénée, sans que l'horizon, sans que la fin ne se fasse jamais voir. C'est pour cette raison que l'amour fait si mal. Simplement car nul être humain ne peut prédire quand amour nous abandonnera. Nul ne peut dire quand cette danse terminera, comment cette somptueuse mélodie prendra fin. Il est des choses au-dessus de notre temps, au-dessus de notre volonté, qui contrôlent les désirs qu'amène l'amour. C'est pour cette raison que les amants s'éloignent parfois, plongent, s'oublient, se haïssent, avant de retrouver le chemin des bras de l'autre.

Jade soupira et brûla la note. Elle espérait quelque chose de plus pertinent qu'un des nombreux délires d'Archibald. La jeune femme n'avait jamais su déchiffrer ses paroles. Il parlait de choses qu'elle n'entendait pas, qu'elle ne percevait pas. Un comble aux yeux de celle qui parvenait à voir des fantômes, bien malgré elle. Depuis quelques jours, personne ne lui était apparu, et elle en remerciait le Ciel ou la quelconque force qui lui envoyait ces maudits spectres. Jade les savait toujours proches d'elle, à la suivre, à lui murmurer des paroles souvent indéchiffrables. Ils lui parlaient, lui glissaient des mots incohérents de leurs voix glacées au creux de son oreille. Elle y était habituée, mais ils avaient pour don de la faire frémir. D'horreur sans doute, de peine peut-être. Jade n'avait jamais compris cette idée de lire en soi, il y avait longtemps que la jeune fille n'avait plus rien ressenti.

— Bonsoir Jade.

— Tu ne m'avais pas manqué, murmura la femme.

— On sait tous les deux que c'est faux, tu relèves la tête dès que je reviens, tu te détournes de tout pour moi.

Jade pinça les lèvres. Le spectre était des plus désagréables, mais il avait raison. Elle cessait presque de respirer quand elle sentait sa présence. Mais pas de peur, d'espoir. Elle brûlait d'un espoir fou et irréalisable.

— Je suis mort Jade, tu dois l'accepter.

— Tu es mort à cause de moi, articula-t-elle, si j'était simplement restée à la maison...

— Qu'est ce que je te disais à propos des « si », petite sœur ?

— Qu'avec des « si » tu aurais pu changer le monde.

— Si tu étais restée à la maison, tu serais morte, tu aurais péri comme nous tous.

— Tout est ma faute.

— C'est la culpabilité du survivant petite sœur, sort toi ça de la tête. Mène Archibald à travers les décombres qui restent dans son monde, et rejoins-nous si tu as le courage de le faire.

A ces mots, le garçon lui adressa un dernier regard, ses cheveux se soulevèrent au souffle d'une brise qui n'existait pas et sa bouche se tordit en un sourire pâle. Ses yeux toujours noirs malgré la mort suivirent la larme sur la joue de sa petite sœur. A une époque il se serait penché pour lui essuyer délicatement avant de la prendre dans ses bras. Ce soir-là, il se contenta de se laisser tomber par la fenêtre ouverte. Il aimait les sorties théâtrales.

***

Mary avançait dans le couloir glacé. Pourquoi avait-elle accepté de le voir ? Il était minuit passé, elle aurait mille fois préféré rester dans son lit. De toute manière il n'était même pas là. Le couloir était entièrement vide. Il l'avait roulée ! Et elle crédule, elle l'avait crue. Elle avait été persuadée qu'il viendrait. Comme il le lui avait dit, naïve qu'elle était.

— Tu es en avance McDonald.

Elle se tourna vers la voix. Il sortit de l'ombre, fumant tranquillement une cigarette. Il avait dû se cacher du potentiel passage de Rusard.

I Love You To The Moon And Back (Tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant