Dix-sept

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« - C'est trop nul. J'ai pas envie que tu partes ! », Maude fait la moue pendant que je boucle ma valise.

« - C'est seulement trois jours et deux nuits. », je roule des yeux, « Tu peux venir avec moi, si tu veux. Ma mère sera contente. »

« - J'ai trop de travail, tu le sais bien. », elle hausse ses épaules, « Mais tu lui passeras le bonjour de ma part, ok ? Et achète lui une boîte de chocolat à l'aéroport de ma part aussi. »

« - Ok. », je dépose un baiser sur ses lèvres, « Je vais y aller, maintenant. »

« - Je ne te dépose pas à Bruxelles ? »

« - Non. Je vais prendre un taxi. Repose-toi. »

« - Bon ok. », elle enroule ses bras autour de mon cou, « Tu vas me manquer, mon ange. »

« - M'appelle pas comme ça. », je roule des yeux.

Quand j'arrive en Irlande, il est quatorze heures. Il fait pas trop mauvais alors ça me met tout de suite de bonne humeur.

Quand je rejoins ma mère sur le parking, elle se jette dans mes bras et m'arrose tout de suite de baisers.

« - Maman ! », je rigole, « Un peu de tenu. »

« - T'es tout beau. », elle s'éloigne un peu de moi pour me regarder, « T'es pas venue avec ta chérie, finalement ? »

« - Non. Elle a trop de travail. »

« - Et bien, Dieu merci ! », elle m'ouvre la portière de sa voiture, « Je ne peux pas la saquer. »

« - Maman... », je roule des yeux.

« - Je suis désolée, chéri, mais c'est physique. Je ne l'aime pas. »

« - T'es une belle faux-cul. »

« - Il faut bien, parfois. »

« - On va avoir un enfant, hein. Et on va se marier aussi je te rappelle. »

« - Tu peux encore changer d'avis, tu sais ? Pour le mariage, je veux dire. Le bébé, t'as plus trop le choix. »

« - Je suis très sûr de moi. »

« - Dommage. »

On se met en route jusque chez elle et Yvan, mon beau-père.

« - Tu vas adorer la maison. Elle est magnifique. », ma mère me dit, « Ça te donnera peut-être envie de venir me rendre visite plus souvent. »

« - Vous changez de pays chaque année, maman. C'est pas de ma faute si j'ai du mal à vous suivre. »

« - Cette fois-ci c'est la bonne. », elle sourit, « Je me sens bien ici. »

« - Je suis content pour toi, alors. »

« - Tu vas adorer. », elle ébouriffe mes cheveux.

Effectivement, c'est magnifique chez eux. C'est presque une maison de vacances mais pour toute la vie. Si ça a du sens ce que je dis.

« - Nicolas ! Hey ! », mon beau-père me prend dans ses bras.

« - Ça fait longtemps. », je souris.

« - Tu devrais venir nous voir plus souvent. », il dit comme ma mère.

« - Si vous vous décidez réellement à vous poser ici, j'essaierai de passer le plus de fois que je le pourrais. »

« - Parfait, alors, parce qu'on ne compte pas partir d'ici de sitôt. », se réjouit ce dernier en passant un bras autour des épaules de ma mère.

« - Comme je te le disais, » dit ma mère, « C'est vraiment le pays parfait. Tu devrais venir t'installer ici, aussi. »

« - Merci mais je passe mon tour. », je rigole, « La Belgique, c'est très bien pour moi. »

Pendant toute cette journée, on reste enfermé tous les trois dans la maison à parler et rigoler. Ils m'avaient vraiment manqués tous les deux.

« - Ta mère rentre tard, aujourd'hui. », m'annonce mon beau-père le lendemain matin au petit-déjeuner, « Et moi, j'aurais pas fini avant un bon moment aussi. Tu devrais en profiter pour aller visiter un peu. »

« - Ouais, je vais faire ça. Je dois ramener des cadeaux pour tout le monde, de toutes façons. Ça m'obligera à faire un peu de shopping. »

« - Je t'accompagne en voiture au centre ville ! »

Je passe quand même presque deux heures à tourner dans tous les magasins à chercher des trucs plutôt sympa à ramener à Fiona et sa famille. Et puis, un petit quelque chose pour mon père aussi.

Je décide finalement d'aller me poser dans un café. Une pause très bien méritée comme on dit.

Je commande un thé et une part de cake tant qu'on y est. Je m'assois non loin du comptoir parce que c'est un peu la seule place libre, en fait.

Je sirote mon thé calmement en regardant par la vitre. C'est vrai que c'est vraiment jolie ici. Un bel endroit où vivre.

Je suis dérangé dans ma contemplation quand quelqu'un entre en furie dans le café. J'ai pas vraiment eu le temps de voir la personne tellement elle est passée vite. Mais c'est une fille, je peux la voir de dos. Une africaine, elle a de longues tresses noires qui lui tombent jusqu'au bas du dos.

« - Coucou Louise ! », elle dit essoufflée, « Je suis super pressée. Il me reste vingt minutes de pause. Tu peux me faire un café comme je les aimes, s'il te plaît ? »

Mais putain ! C'est trop étrange, sa voix me dit quelque chose. C'est un souvenir lointain mais ça me dit vraiment quelque chose. C'est frustrant, putain ! Je l'ai sur le bout de la langue.

« - Merci, t'es la meilleure. », elle dit après que la blonde lui ait répondu quelque chose comme "bien sûr".

La Louise s'en va quelques instants alors la fille se met à scruter un peu les gens qui se trouvent dans le café. Je la vois de profil, maintenant. Enfin non, je ne la vois pas. Son visage est cachée par ses tresses.

Elle est à quelques secondes de poser son regard sur moi et mon souffle se coupe instinctivement mais à la seconde où j'allais enfin voir son visage son téléphone sonne alors elle se retourne à nouveau pour répondre. Merde !

« - Allô ?... Oui, c'est moi... Oh non.. Qu'est-ce qu'il a encore fait ?... Écoutez, je suis vraiment désolée. Je vous promets que je vais l'engueuler, ce soir. Ça ne se reproduira plus... Je sais. Oui, oui. Il n'y aura pas de troisième avertissement. Il va se calmer, je vous le promet... Merci, monsieur le directeur. Bonne journée à vous aussi. »

C'est ce que j'ai cru comprendre de la conversation. Elle parle en anglais et mon anglais est comme qui dirait assez médiocre donc voilà.

« - Aaron, encore ? », demande la Louise de retour avec le café de la demoiselle en main.

« - Ouais. », souffle la fille, « Je sais pas quoi faire. Dans toutes les écoles c'est pareil. Il est vraiment difficile. »

« - C'est un enfant, c'est normal. Ça va s'arranger. »

« - Mouais. », elle avale sa boisson presque d'une traite, « Je sens que je vais encore devoir le changer d'école si ça continue. »

Puis, elles parlent encore d'un truc mais j'ai du mal à déceler ce qu'elles racontent.

« - Bon, j'y retourne ! On se voit demain. », la fille dépose un billet.

« - À demain, ma belle. »

C'est le moment de vérité. Je vais enfin pouvoir mettre un visage sur cette voix.

La fille se retourne (enfin) et sans faire attention à moi, elle sort du café une expression plutôt contrariée sur le visage.

Moi, je reste comme pétrifié sur ma chaise.

Attendez.

Je rêves ou c'était... Selen ?

MON ANGE (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant