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matin salé sur les toits de la ville alors que la pluie remplace le bleu des hauts horizons
et même cela, ça n'arrête pas yoongi qui, par le bras , tire hoseok dans la salle de musique du lycée parce que le couloir est trop bondé et que les cœurs qui s'aiment sont en trop grand nombre

les mains qui s'écrasent sur ces courbes féminines, ces bouches qui se heurtent si forts à résonner dans son crâne
tous ces visages déformés par le cœur battant au rythme des paroles langoureuses
foutu 14 février, n'est-ce-pas?

mais au loin, cachée, la salle de musique
yoongi seul savait et avait la clé de la salle, comme un secret qu'il avait gardé pour lui avant de trouver cette personne
cette personne à qui faire confiance pour de bon,
à qui montrer.
sa tête était tellement brouillée par sa faiblesse de raisonnement qu'il ne se souciait plus des blocs de pierres en papier trop lourds de son sac qui lui maltraitaient l'épaule; de ces yeux qui dans son dos criaient d'aller moins vite et de ce souffle qui ne le suivait plus.
tout ce qu'il voulait, c'était isoler le bonheur dans une capsule,
même si ce n'était que pour quinze insignifiantes minutes.

souffle, sourire, souffle
pourtant la salle n'était pas spécialement belle mais qu'est ce qu'elle lui plaisait, vraiment fort
ce qui lui faisait étrangement penser à hoseok: quelque chose que personne ne soupçonne être bien, et qui pourtant surpasse tellement d'actes et de promesses, un peu comme les baisers fous des couloirs et les je t'aime égarés

yoongi se sentait normal en courant vers le piano et hoseok avait l'air épuisé d'être triste à en voir ses pommettes levées vers le ciel alors qu'il marchait vers le fond de cette salle
tout conduisait à l'amour

mais aux yeux du musicien, une chose bloquait: le piano?
hoseok au fond de la salle peut-être?
ou cet air douloureux que celui-ci avait de lui faire lire dans ses pupilles "laisse moi écouter", cet air de quémander silencieusement une preuve qu'il serait seul à savoir, à l'avoir vu
pour l'imprimer à l'encre d'or dans son crâne,
pour que son esprit se rappelle,
que c'était lui, yoongi

une note s'élève

« -j'ai juste jamais vraiment joué de piano pour autre chose que ces murs, alors excuse-m-
-si

un do pour être précis

-pour qui?
-pour moi, ça résonnait dans le couloir gris »

et le coup de grâce qui décroche un sourire
pour que le piano se mette à crier des sentiments
pas ceux qu'on a l'habitude de connaître, non
des sentiments silencieux qui veulent dire "tu es loin et pourtant si près"
qui signifient tellement et pourtant rien quand on y est extérieur
qui soulignent ce visage d'ange aux mains si vives sur les carreaux blancs et ses supérieures noires
ceux qui reflètent le visage de yoongi et la larme de sa joue;
c'est le bonheur qui déborde

il l'aime vraiment bien
il aime
et peut-être que l'autre aussi

s'il me laisse du temps, l'avenir
pour m'étendre près de toi
alors passion s'écoulera
jusqu'au soir où les cieux
me prieront la déchirure
de ce qu'on appelle adieux

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