Sur le trajet, nous étions silencieux. Je voulais comprendre son histoire, mais je n'avais plus aucune envie de lui parler. Elle, elle se contentait de regarder droit devant elle et m'ignorer. Au bout d'un moment, nous arrivâmes dans un quartier chic de la ville. J'observai avec attention les anciennes maisons de pierres, avec de hautes fenêtres et de hautes cheminées. A certains étages, des balcons en fer forgé donnaient une impression de remonter dans le temps. Agathe tourna subitement à gauche, ouvrit le portail d'une grande bâtisse, et s'engouffra dans l'allée. Je poussai un léger sifflement admiratif.
- Eh bah ! On se refuse rien !
- Sois pas stupide, c'est une maison avec plusieurs appartements.
- Ouais, bah, néanmoins, ça n'a rien à voir avec les logements étudiants, excuse-moi.
Elle déverrouilla la porte d'entrée et s'engouffra à l'intérieur. Je la suivis en regardant partout. Les escaliers étaient en bois, avec une sublime rampe sculptée. Le sol au carrelage coloré était poussiéreux et abîmé, laissant ainsi deviner son ancienneté. Nous gravîmes les marches jusqu'au premier étage, puis Agathe s'arrêta devant une grande porte verte, avec un sautoir en fer noir. Elle fit tourner les clés dans la serrure et me laissa passer devant. Je m'attendais à un endroit sombre et déprimant, mais ce n'était pas le cas. Elle avait un petit salon avec des fauteuils anciens de couleur bordeaux, avec une table basse en bois, sur laquelle reposait une pile de livres. Elle avait une étagère remplie d'autres bouquins, de différents âges, et je me demandai avec curiosité si certains étaient des grimoires de magie. Les hautes fenêtres donnaient sur l'arrière de la bâtisse, où un luxuriant jardin s'étendait. Dans un coin, il y avait une kitchenette toute simple, avec de la vaisselle sale et une magnifique théière en fonte. Il y avait deux autres portes. Agathe posa son sac dans un coin et défit son long manteau noir tout en me jetant un coup d'oeil. Je ne fis aucun commentaire sur son espace, mais demandai plutôt :
- Tu aurais du thé ?
- Je suis pas ta mère.
- Encore heureux ! J'ai juste soif.
Elle me regarda, agacée, puis alla dans sa cuisine pour aller en préparer.
- Ne mets pas de poison dedans, ajoutai-je.
- Ça me rassure de voir que tu es méfiant.
Je l'ignorai et m'approchai de ses livres. Contre toute attente, je trouvai vraiment beaucoup de choses d'un genre différent. Oui, il y avait des livres étranges (« La magie des druides », « le livre complet sur les monstres », « le fantastique du XIXème siècle » ...) mais pourtant aussi des classiques de fantasy, et même des romans à l'eau de rose.
- Beurk ! m'exclamais-je. Tu as lu la saga Twilight ? Je te croyais plus mature.
Elle me jeta un vague coup d'oeil et expliqua :
- Voir comment les auteurs de ce siècle envisage les monstres comme moi m'intéresse, oui. Et arrête de te plaindre, tu sembles en tout point semblable à Bella.
- En quel cas ?
- T'intéresser aux mauvaises personnes.
- Dieu merci, tu sembles moins niaise qu'Edward en tout cas.
Elle soupira. Elle arriva avec un plateau, sur lequel trônait deux tasses fumantes et un bol de gâteaux, qu'elle posa sur la table basse. Elle s'installa dans un fauteuil, mais je ne la rejoignis pas tout de suite.
- La façon dont notre siècle voit les sorcières est-il proche de la réalité ? Demandai-je.
- Il y a beaucoup de choses similaires et différentes, dit-elle, en haussant les épaules.

VOUS LISEZ
Agathe
FantasyIsmaël rentre en deuxième année de licence anglais. Il reprend l'habitude de ses amis, de ses cours, de ses sorties. Pourtant, il rencontre Agathe, la mystérieuse, Agathe, que tout le monde semble apprécier, Agathe, qui semble à l'aise au milieu des...