Chapitre 15

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Derek arpentait sa chambre comme un animal en cage. Goran était près de la porte fermée, silencieux. Soudain, on toqua contre le panneau et il entrouvrit la porte.

— Nous sommes prêts.

— Nous arrivons.

Il referma la porte et avisa la jeune garçon, figé au milieu de la pièce. Il avait revêtu ses plus beaux vêtements pour l'occasion, tout comme Goran ainsi que la vingtaine de personnes qui étaient entassés dans la salle du trône.

— Nous y allons, Heda ? dit alors l'Intendant.

— Je peux encore m'enfuir ?

— J'ai peur que non.

Derek souffla par le nez. Goran traversa la chambre et posa ses mains sur ses épaules.

— Cinq minutes, dit-il. Prenez votre courage à deux mains, cela ne dure que cinq minutes. Évanouissez-vous, si vous voulez, ainsi Tylo vous évacuera et vous serez tranquille.

— Je ne peux pas m'évanouir sur commande...

— Allons, vous voyez très bien ce que je veux dire...

Goran esquissa un sourire en coin et Derek inspira en se frottant les mains. Il se redressa alors et hocha la tête.

— Très bien, qu'on en finisse. J'espère vraiment qu'après cela, on me fichera la paix !

— N'y comptez pas trop...

Derek gémit en laissant tomber sa tête contre son torse. Goran lui prit alors le bras puis le poussa dans le couloir et ils traversèrent l'appartement de Clarke, entièrement vide et silencieux. Tout se passait en haut de la tour, au dernier étage, là où Heda avait son trône. Il n'avait d'ailleurs jamais compris pourquoi, car si l'on désirait une audience, il fallait se taper des centaines de marches ou bien prendre un vieux monte-charge actionné par des gens qui risquait de tomber à tout moment... Sans doute pour calmer les plus énervés, songea alors le jeune homme. Pendant une brève seconde, il pensa à déménager la salle du trône quelques des étages plus bas, mais son propre commentaire lui revint et il grimaça. Non, c'est mieux là-haut, en fait, j'ai aucune envie de me faire tabasser tous les quatre matins...

— À quoi pensez-vous, Heda ? demanda alors Goran.

— Au moment où je pourrais retourner dans ma chambre et reprendre mon livre.

Le ton était sec et l'Intendant baissa le nez en pinçant les lèvres. Du point de vue de Rijant, faire de cet enfant leur Commandant Suprême était une bonne chose, il était malléable, il lui faisait confiance, il pourrait ratifier toutes ses demandes ou presque, mais de son point de vue à lui, père de quatre enfants, c'était une hérésie. Derek était orphelin, Natblida, et la seule « famille » qu'il avait désormais, c'était Wanheda et Haiplana, les deux pires personnes, sentimentalement parlant, pour élever un gamin de douze ans traumatisé par la guerre.

Après une longue montée totalement silencieuse – c'était comme si toute la ville avait cessé de respirer – Goran arriva à l'étage de la salle de trône, juste en-dessous de l'appartement de Heda, et avisa aussitôt Tylo, Roan et Clarke sur le palier. Quand Derek posa le pied au haut des marches, il se crispa et traversa la zone pour s'enfoncer dans les bras de Clarke qui l'enveloppa des siens et de sa grande cape de fourrure. Elle l'embrassa sur le front en lui caressant la tête.

— Tout va bien se passer, d'accord ? dit-elle. Tu verras, ça ira très vite ; tu vas avoir mal, mais cela va passer.

— Et si je renonce au dernier moment ?

— C'est fini, répondit Roan. Tu n'en a plus le droit désormais. Il fallait le faire avant.

Derek grimaça et s'éloigna soudain de Clarke. Quand il se dirigea vers les portes fermées derrière lesquelles des voix étouffées s'entendaient, Tylo se précipita devant lui et lui barra le chemin.

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