5. GRÉDÈSCA

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Souviens-toi Burt...

Vingt-quatre ans dans le passé. Ère des hommes, an 557

                        Burt a cinq ans. Ce jour-là, il se trouve en plein cœur du continent principal, dans une grande tente aménagée comme une maisonnette de fortune, relativement à l'abri du froid de par la densité de celle-ci, et confortable en son sein. Il vit ici depuis une semaine, et comme tous les jours, il attend. Il patiente dans sa chambre ; une pièce séparée par de longs rideaux de tissu épais, et illuminée par une bougie consistante, qui produit assez de clarté pour en éclairer l'espace de nuit. Étendu sur son lit en bois brut érigé lui aussi de façon provisoire, il écoute ce qui se dit de l'autre côté. On chuchote, et il est difficile pour lui de mettre des mots sur ce qui parvient à son oreille, d'autant plus que son tout jeune frère Legna, né très récemment pleure sans lui donner l'impression de vouloir cesser.

— Burt ? Peux-tu venir s'il te plait ?

La voix de sa mère. Il s'exécute sans attendre, lassé de cette solitude.

Il pousse le rideau et se retrouve dans la pièce principale où se trouve une petite table ronde, sur laquelle est apposée une lanterne, ainsi qu'un lit, en bois massif, mais bien plus grand ; celui de ses parents.

Burt se souvient de ce jour.

Il se souvenait des visages de ces derniers, notamment du sourire de Grédèsca ; sa mère. Ce sourire, qui était rare chez celle-ci, elle qui était souvent épuisée et qui parfois peinait de soulever Legna dans ses bras. À la différence de son mari ; Gildman, elle ne faisait pas partie des élus révélés par Aïsa pour lutter aux côtés de celle-ci. Bien avant les conflits, elle tenait déjà les armes en tant que mercenaire, exécutant diverses chasses ou missions à travers le continent principal, avant d'être recrutée par les troupes du roi lorsque la guerre éclata. Elle partageait un point commun avec Gildman ; ils étaient tous deux, chacun à leur manière, des combattants de renommée. Burt se souvenait de la beauté naturelle de sa mère, ses cheveux courts et blonds, aussi clairs qu'un champ de blé, et son allure charismatique. Grédèsca était assise au bord du lit, et avait trouvé la force ce soir-là de tenir Legna dans ses bras.

Lorsque Burt s'approcha, Gildman l'attrapa par surprise afin de le soulever dans les airs en criant :

— Je te tiens !

Ce qui provoqua un rire chez l'enfant.

La joie.

Burt aimait énormément son père.

Gildman donnait à son fils l'impression le faire voler à travers leur demeure de fortune. Tout en planant, Burt aperçut alors les amis de ses parents ; Martha et Harrod, à l'entrée. Ils les regardaient eux aussi avec le sourire, ne se lassant pas de ces courts instants de bonheur, à l'intérieur d'une époque de guerre. Le couple salua d'un au revoir tout le monde et sortit, laissant les quatre membres de la famille entre eux. Gildman reposa son fils à terre et lui dit avec étonnement :

— Mais c'est que tu es de plus en plus lourd toi ! Tu deviendras un grand et robuste guerrier à n'en pas douter ! le tout suivi d'un petit clin d'œil qui amusa Burt.

Grédèsca finit par calmer les pleurs de Legna, et l'apposa dans un berceau en bois, monté sur pied, sur le côté du lit.

— Allez, viens voir ta mère toi ! dit-elle une fois libre.

Burt s'empressa de courir vers elle et sauta dans ses bras.

– Oh, mais c'est que ton père a raison ! répliqua-t-elle, encore quelques mois, et je n'aurais plus assez de force pour te soulever !

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