Je ne pensais pas devoir parler un jour de mon viol. Je pensais encore moins que la première fois que j'en parlerais serait devant un inconnu.
Je ne suis pas prête à affronter son regard de pitié. Si tenté qu'il ait de la pitié pour moi, cet homme semble ne jamais ressentir aucune émotion, à sa place j'aurais déjà rigolé du ridicule de la situation, ou j'aurais déjà demandé plus de détails.
Le silence était trop gênant et je ne pouvais pas le regarder alors je fis la seule chose que je sache faire ces dernières années : fuir la situation.
Je sortis en trombe de la salle de classe et mes pas me guidèrent d'eux-mêmes vers la porte du lycée. Étrangement, la voie était libre, il n'y avait plus aucune trace de ce surveillant énervant.
Une fois dehors, je me retrouvais entourée d'une masse de lycéen et je compris alors la raison pour laquelle la porte était ouverte ; c'était l'heure de la récréation.
Le début de ma journée avait été tellement forte en émotion que j'en avais perdu la notion du temps.
De toute manière, j'avais réussi à sortir, je pouvais maintenant mettre mon plan à exécution.
Il me suffisait d'aller au commissariat et de tout leur dire.
Alors que je commençai à marcher le doute commença à m'envahir. Ne venais-je pas déjà de parler à un adulte ? Et quelle avait été sa réponse ? Rien, il n'avait rien dit. Qu'est-ce qui me dit que les policiers me croiront ?
Je les imaginais déjà en train de me rire au nez quand je leur dirai que mon viol avait eu lieu il y a déjà 2 semaines.
A bien y réfléchir, je n'avais de toute façon aucune autre solution. Si je laissai faire les choses, comme ces dernières années tout ce que j'y gagnerai c'est de perdre le peu de confiance que mes parents avaient encore en moi. Et même si ils n'étaient vraiment pas les meilleurs parents du monde, ils étaient tout ce qui me restait.
Je me remis donc en marche, essayant de faire taire mes pensées pour me concentrer sur mon objectif.
Lorsque j'arrivai enfin devant la porte du commissariat, je sentis mon souffle s'accélérer et une nouvelle onde de panique me paralysa en me tordant les boyaux.
Un policier m'invita à entrer en me tenant la porte, je me forçai donc à entrer, parvenant tant bien que mal à retrouver mon calme. Une fois à l'intérieur, on vérifia que je n'ai rien introduit de dangereux puis on me dirigea vers le bureau des plaintes.
Je m'assis sur les sièges de la mini salle d'attente en regardant autour de moi, pressée de ressortir de cet endroit.
Au moment, ou j'allais me dégonfler, un policier vint me chercher pour enregistrer ma plainte.
- Bonjour mademoiselle, pour quel motif voulez vous porter plainte ?
Je me figeai en entendant sa question. Pour quoi je porte plainte déjà ? Pour avoir été violée ? Ils ne me croiront pas...
- Je...
Le policier me regarda, l'air de se dire que je venais lui faire perdre son temps. Je me dépêchai donc alors de lui répondre.
- Pour...harcèlement.
Il ne broncha pas et tapa sur son ordinateur sans m'accorder un regard.
- D'accord, pouvez vous préciser quel genre de harcèlement vous subissez ?
- Et bien, dernièrement il y a une vidéo de moi qui circule et cela fait des années que l'on colporte des rumeurs à mon sujet.
Il m'observa alors plus attentivement. Il me semblai qu'il essayait de juger si je lui mentais ou pas, je me senti donc obligée de rajouter.
- Je reçois également des insultes à l'occasion.
- Je vois... Avez-vous des preuves ?
- Euh... Oui bien sûr.
Je me saisi de mon téléphone et ouvrais facebook. J'avais seulement désactivé mes notifications pour ne plus être gênée par ce flot de messages que les gens postaient sur mon mur ou m'envoyaient en privé. J'ouvris mes messages privés et tendis mon téléphone au policier.
Il s'en saisit et se mit à lire les gentils messages qu'on m'envoyais régulièrement. Après un certain temps il me dit.
- Tu n'en aurais pas des plus récents ? Les plus récents datent d'un mois, c'est étrange que tu portes plainte alors que tu ne reçois plus de messages.
Je blêmis à ses mots. Non je n'avais rien de plus récent. Les gens avaient arrêtés de m'insulter lorsqu'ils avaient vu que Yan s'intéressait à moi. Bien sûr au début, ils avaient cru qu'il faisait parti de mon tableau de chasse ou je ne sais quoi. Très vite, comme nous nous rapprochions, ils ont fini par croire que l'on était en couple et alors, ma réputation de pute ne pouvait plus tenir, ça m'arrangeais. Enfin jusqu'à ce qu'il me...
Le policier me regarda, l'air désolé en me rendant mon cellulaire. Je m'en saisi et cherchait tout de même si je n'avais pas des publications sur mon mur. Il y en avait bien une. Il s'agissait de la vidéo.
Avais-je un autre choix ?
En voyant le policier commencer à parler, je sus qu'il allait s'excuser de ne rien pouvoir faire pour moi. Cela me décida.
- Il y a bien quelque chose de récent, ça date d'aujourd'hui.
Je lui redonnai alors mon téléphone et lorsqu'il vit de quoi il était question, il me regarda avec surprise puis avec pitié et je ne pus soutenir son regard bien longtemps.
- Tu sais qui a publié cette vidéo?
- Celui qui l'a filmé.
- Est-ce que tu l'as autorisé à filmer ?
- Non.
- Pourtant tu as l'air de savoir que tu étais filmé pourquoi tu ne l'en a pas empêché ?
Je ne pus empêcher une larme de dévaler mes joues à ces mots. Je me préparai à devoir alors à devoir le dire.
- Je... Je n'ai pas réussi à l'empêcher... Je ne pouvais pas...Il m'a...
Je n'y arrivais pas. Les sanglots m'empêchaient d'en dire plus.
- Est-ce qu'il t'a violé ?
Je me contentai d'hocher la tête pour lui faire comprendre.
- Qui est-ce ?
Je ravalai mes larmes pour lui avouer.
- Yan. Il s'appelle Yann Gilbert.
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Remords, regrets & bordel
Mystery / ThrillerBailey regrette un bon nombre de ses choix passés. Harcelée, elle pense avoir une chance d'être heureuse quand Yann s'intéresse à elle, si différent de tout ces garçons seulement intéressés par son corps. Mais Yann n'est pas si différent des autres...