The clock is ticking, so stay with me

2.3K 221 129
                                    


   Le soleil menace de se coucher sur la ville emplie de couleurs les plus vibrantes les unes que les autres. Rouge, orange, rose et même jaune. À travers le hublot, on peut le voir tomber au fur et à mesure dans l'eau, cet astre qui lui brûle la rétine. Il est prêt à y couler jusqu'à toucher le fond. À n'importe quel moment. Et de là-bas, lui aussi, il a l'impression qu'il va se noyer d'un instant à l'autre tant l'avion semble arriver vite depuis le ciel vers la terre. D'aussi haut, il regarde, les yeux plissés pour faire passer le moins de lumière possible, le peu d'horizon que lui permet de voir la petite vitre à côté de son siège. Il y observe les vagues grossir de plus en plus, les arbres se multiplier et immeubles se rapprocher. S'il tend la main, il peut presque les frôler tant ils semblent transpercer l'atmosphère qui, elle, commence à engloutir toutes les lumières du monde. Et la première étoile apparaît, au plus haut du dégradé, dans le léger bleu qui remplace doucement le feu du ciel.

   Et l'eau finit par disparaître, pour laisser place à la piste de goudron infinie sur lequel l'avion se pose. Ce n'est pas doux comme atterrissage, c'est même plutôt violent. Ça secoue dans tous les sens. Et même que le verre à moitié plein de son voisin se renverse sur lui. Il n'y a pas grand chose donc ce n'est pas si grave. Mais ça le fait quand même chier, parce que c'est humide maintenant. Alors il sort un mouchoir pour essuyer le bord de sa chemise et le haut de son pantalon, sous les excuses du vieil homme qui semble désolé par la situation. Il ne lui répond pas, il sourit juste. Et les portes s'ouvrent. Son voisin se précipite pour sortir, bouscluant le monde au passage mais lui il patiente. Quand l'avion devient vide, il sort à son tour. Enfin. Il peut se dégourdir les jambes.

   Armé de son sac à dos, il avance jusqu'au hall, celui où les voyageurs vont pour passer d'un avion à l'autre. Il n'a pas plus de bagages, elles sont déjà toutes en direction de Séoul. Alors c'est le coeur léger et les bras vides qu'il arrive devant le panneau d'affichage lumineux pour voir vers quelle porte d'embarquement il doit se diriger.

Seoul...Incheon. Gate 40H. Cancelled.

   Avion 4419. Annulé. Ça lui prend quelques secondes pour comprendre ce qu'il lit. Ou alors il comprend, mais il ne veut juste pas l'admettre, inconsciemment. Parce qu'il veut rentrer chez lui, parce qu'il ne veut pas attendre. C'était simple normalement : une heure d'escale puis six heures de vol et voilà. Pas plus. Et comme il ne veut pas rester ici, il court vers le centre d'information le plus près. Il court, son sac à dos valsant avec lui, il slalome, entre les corps et les valises, il court encore et il arrive.

   C'est la femme de l'accueil, chignon serré et tailleur fermé, qui lui brise toutes ces chances de rentrer à Séoul le lendemain. Et entre quelques balbutiements d'anglais, il comprend enfin. Enfin, il ne fait plus semblant d'être perdu quoi. No more planes tonight. Juste un demain, à la même heure que celui qu'il était censé prendre. Alors il accepte et sa place est réservée. Demain, à 20 heures, il s'envolera pour de bon vers chez lui.

   C'est enveloppé dans les 29 degrés ambiants qu'il sort enfin après une bonne trentaine de minutes à régler des papiers administratifs. Parce qu'il ne se voyait pas rester vingt-quatre heures dans un aéroport, enfermé, à ne rien faire à part regarder les secondes s'écouler à une lenteur extrême, il décide de s'enfoncer dans la jungle citadine complètement inconnue pour lui. Il ne comprend pas les panneaux en mandarin alors il se concentre sur ceux en anglais. Un panneau où est écrit en lettres capitales vertes « Subway line », ou le métro, tombe devant ses yeux. Et c'est tout ce qu'il lui faut.

86400 | HyuninOù les histoires vivent. Découvrez maintenant