Chapitre 20

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Je marche lentement vers ma moto garée sur le parking du lycée en songeant à la mine déçue de Mila. Elle m'a touché en plein coeur. Je me sens gêné. Elle a mis en route ma conscience qui tourne maintenant à plein régime. Vais-je trop loin avec Margaux ? Pourtant ce n'est rien en comparaison de ce qu'elle m'a fait subir pendant deux ans. Je n'aime pas cette fille et c'est réciproque, mais les petits yeux désappointés de mon amie sur moi me déstabilisent.

J'accroche mon casque sur le guidon de ma moto, le temps de chercher la clef de mon antivol. Elle n'est pas dans les poches de mon blouson et je commence à me demander si je ne l'ai pas perdue, car je les range toujours au même endroit. Putain ! Comment peut-on être aussi tête en l'air que moi ? Je file même un coup de pied dans la roue de ma moto. Mince, je recommence à m'énerver. Je souffle bruyamment pour tenter d'extérioriser la rage qui m'envahit...

Je m'accroupis pour fouiller plus intensément dans mon sac quand j'entends mon prénom.

— Baudry, tu me raccompagnes, j'ai loupé mon bus ?

Je soupire au son de la voix mielleuse que je reconnais parfaitement. Je ne prends pas la peine de lever la tête, je continue de chercher mes clefs, en choisissant d'utiliser les grands moyens : je vide mon sac sur le bitume en marmonnant à l'intention de Mila :

— Appelle tes parents !

— C'est déjà fait, monsieur je-suis-désagréable ! Mais ils ne répondent pas !

Les deux Stan Smith blanches de Mila s'imposent parmi toutes mes affaires. Je lève les yeux vers elle pour lui adresser un regard contrarié mais au lieu de la décourager, elle l'ignore et s'agenouille à côté de moi pour m'aider à chercher.

— Impossible de remettre la main sur mes clefs, je lui indique, irrité. Je peux pas t'aider...

— Si je les trouve, tu me raccompagnes ?

Trop obstinée pour moi, cette fille ! J'arque les sourcils en me demandant par quel tour de magie elle pourrait faire apparaître mon trousseau.

— J'ai tout vérifié !

— Donc, si je les trouve, tu acceptes !

Mila s'active sur mes affaires. Elle déplie même mon maillot de bain, je suis terriblement gêné.

— Pas mal... commente-t-elle amusée.

— Mais jamais tu lâches l'affaire, toi ?

Je lui arrache des mains mon shorty bleu encore tout mouillé et le jette au fond de mon sac. Mila étouffe un rire et se met à ranger, une à une, chaque chose jusqu'à la dernière. Évidemment, elle ne trouve rien. Je la dévisage, satisfait mais tout de même contrarié.

— Alors, Sherlock ? je l'interroge en me relevant.

Une fois debout, elle mime de tenir un pistolet braqué sur moi.

— Haut les mains !

— Hein ?

— Fais voir tes poches !

— J'ai déjà vérifié !

Mila pose mon sac par terre et s'avance d'un pas décidé. Elle commence à tâtonner les poches de mon blouson, puis ses mains descendent sur mon jean's. Nous échangeons un regard mais je suis beaucoup trop embarrassé pour la laisser continuer.

— Y a rien, tu vois, ralé-je en dégageant ses doigts de mon corps.

— Les poches arrière !

— Rien non plus !

— Fais voir !

— Va te faire voir, dis-je en reculant.

— Allez Baudry, fais pas ta chochotte, tu sais que c'est moi la plus forte ! Je dois vérifier tes poches !

Avant que Mila ne me saute dessus, je mets instinctivement mes deux mains sur mes fesses. Merde, je sens quelque chose qui ressemble à des clefs, dans ma poche gauche.

— C'est bon ! Tu as gagné, lancé-je en brandissant le trousseau.

— Tu vois !

Mais d'un coup de main agile Mila m'arrache le trousseau et part en courant.

— Tu me ramènes, Baudry ?

— Rhooo, j'ai pas de deuxième casque ! Rends-moi ces putain de clefs...

Je marche d'un pas volontaire vers mon amie, bien décidé à les récupérer coûte que coûte. Mila rit et pense que j'ai envie de m'amuser, mais c'est faux. Je veux juste qu'elle me rende ce qui m'appartient... Je commence à être énervé pour de bon, surtout que je n'ai pas du tout envie qu'elle monte sur ma moto. Elle glousse et sautille au fur et à mesure que je me rapproche d'elle quand son petit jeu est interrompu par l'arrivée de Margaux.

L'adolescente semble perdue dans ses songes. Elle marche, en direction de l'arrêt de bus, le visage fermé sans vraiment prêter attention à nous. Mila s'accroche à elle et lui tourne autour pour m'éviter. Cela éveille la curiosité de Margaux qui l'interroge :

— Qu'est-ce que tu fais ?

— C'est Baudry, il veut récupérer les clefs de sa moto ! Tiens, Margaux, elles sont à toi ! dit Mila en lui mettant mon trousseau dans les mains.

Margaux est désarçonnée par le geste de Mila, qui continue de rire sans se douter de ce qu'elle vient de déclencher en moi. Je ne vais pas me contrôler d'avantage. Margaux m'exaspère au plus haut point. Je ne la supporte plus et la voir détenir quelque chose qui m'appartient me rend furibond.

— Encore des clefs, entre nous deux ! maugréé-je entre mes lèvres.

Je les lui arrache des mains et la pousse si brutalement qu'elle tombe par terre sur les fesses.

— T'es hyper chiant Baudry ! rage Margaux.

— Mais il se passe quoi encore ? m'interroge Mila. Pourquoi tu t'en prends à elle ? Elle n'avait rien fait !

Je tourne le dos aux deux filles pour enfin regagner ma moto. C'était sans compter sur Mila, qui ne lâche pas l'affaire.

— Baudry, espèce d'enfoiré, tu t'excuses !

— Dans tes rêves !

— Et tu me ramènes ! C'était le deal !

J'enfile mon casque et mon sac puis monte sur ma moto. Sans me demander mon avis, elle bondit à l'arrière et s'agrippe dans mon dos.

— Je t'ai dit que je n'avais pas d'autre casque !

Mila me met une tape dans le dos et insiste :

— Pas grave, j'habite à côté !

Elle veut vraiment que je la raccompagne ? Pas de soucis, mais elle va s'en souvenir toute sa vie !

— Accroche-toi ! lui ordonné-je en tournant la clefs de contact.

Bouche cousue (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant