Chapitre I - After-show

132 9 2
                                    


Le flic me plaqua contre le mur, sa matraque sous ma gorge, m'empêchant de parler, tandis qu'un autre approchait.

'What's your name?'

'...'

'I said: what's your fucking name?!'

'Ich verstehe nicht,' dis-je.

'What the fuck?'

'I think that's German, David,' lança l'autre.

'Is the guy German?'

'It seems so.'

'And that guy? What's his name?'

'Driving licence says...Patrick Taylor.'

'Okay. Let the ambulance drive him away but I want you to interrogate him as soon as he wakes up.'

'Got it.'

'And you! Yeah, you, the German guy. You come with me to put the light on that shit! Is that clear?'

(1)

***

Je faisais les cent pas devant la porte de service de la salle de concert, mon cigare collé aux lèvres, repensant à tous les ratés de la soirée, des effets qui n'avaient pas fonctionné aux remarques désobligeantes des guitaristes – d'habitude, je m'en préoccupais peu, mais cette fois-là, la colère avait pris le dessus – quand je fus saisi par l'idée saugrenue de m'éclipser pendant la nuit, sans rien dire. Je surveillai du regard les quelques fans attroupés derrière les grilles et trouvai un passage loin des réverbères, qui semblait mener à un entrepôt. Je balançai mon cigare, puis enfilai ma capuche pour m'y diriger tranquillement, sans attirer l'attention.

Soudain, j'entendis un bruit bizarre qui semblait venir du parking de l'entrepôt. M'approchant des voitures et des camions sagement garés dans la pénombre, j'identifiai des marmonnements. Je regardai derrière chacun des véhicules – rien. J'étais sûr de ne pas avoir rêvé. J'entendis un bruit de métal tombant sur le goudron et une voix grognant :

'You bitch!' (2)

Je m'élançai vers le dernier camion, derrière lequel un homme était accroupi au sol, sur quelqu'un d'autre, une femme ?... Oui, une femme – j'aperçus ses cheveux longs. L'homme, qui avait entendu mes pas précipités, leva la tête en me voyant, et attrapa son poignard avant de se lever. Je me jetai sur lui – instinctivement, sans réfléchir. J'ai toujours eu la fâcheuse tendance d'agir avant de réfléchir. Je n'avais qu'une seule idée en tête, celle de l'attraper par la gorge, de l'éloigner de la femme, mais le salaud brandit son poignard vers moi avant, déchirant ma chemise. J'esquivai le coup à temps, en partant sur la gauche. Je mis la main contre mon abdomen. Je sentis un peu d'humidité sous mes doigts, mais pas trop, donc ce n'était pas profond. Non, je ne sentis pas la douleur. Enfin, si, je la sentis sûrement. Mais comme toujours, je l'ignorai, ou je l'assimilai – à moins que je ne la conçoive pas comme les autres gens ?... Je n'ignore pas le danger – je l'anticipe de manière efficace. Je ne me jetai pas sur lui totalement sans réfléchir, en fait – je savais juste que la priorité était de lui chopper son couteau, et on aviserait après.

Il se jeta sur moi ; je saisis son bras droit de mes deux mains fermes ; je ne le regardais plus lui – je ne voyais que mon visage reflété dans la lame, et l'angle de vue qui différait suivant ses mouvements pour se libérer, et des taches dessus, sur le reflet de mon nez, puis celui de ma joue, puis à nouveau sur mon nez. Après l'avoir épuisé à se débattre inutilement, je lui donnai un coup de coude dans le nez et le fis pivoter sur lui-même ; il essaya de me donner un coup dans le genou, celui que j'avais blessé il y a longtemps ; j'enserrai son cou avec mon bras gauche. Et je serrai en lui criant de lâcher le poignard, secouant la main avec laquelle il le tenait toujours dans l'espoir de me transpercer les tripes avec. Je serrai aussi fort que possible.

Ich verstehe nicht (Incompréhension)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant