Hauteroche II : La Mercenaire

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Un trompe résonna quelque part dans la brume matinale qui baignait la campagne environnant Taillemont, la plus grande cité du royaume breton de Fendretour. Shaiélaè ouvrit les prestement les yeux , comme si elle ne faisait que semblant de dormir en attendant d'entendre ce signal. Elle resta couché sur le dos un instant, immobile, avant de se décider dégager sa couverture. Elle étendit ses muscles en frottant sa nuque endolorie. Les autres personnes avec qui elle partageait sa tente s'éveillaient également, autour d'elle baillant et rassemblant leurs affaires. Les voix d'abord rares et basse se multiplièrent et s'élevèrent, achevant de sortir du sommeil les derniers récalcitrant. Shaielaè plia sa couverture, laça sa chemise, enjamba un corps allongé et sortit de la tente, sa veste de cuir roulé en boule sous son bras. Le camp prenait vie au dehors. Des silhouettes fourbues et hagardes s'échappaient lentement de leurs tentes et du brouillard. Ses bottes humides de rosées étaient entreposée sous la doublure de toile de la tente. Elle les attrapa en dégageant d'une pichenette la limace qui s'y était logé. La petite elfe sauta une ou deux fois sur place pour chasser les derniers restes de fatigue. Enfin pleinement éveillée et prête pour une journée de plus, elle s'approcha d'un feu de camps que déjà l'on s'affairait à ranimer, les uns soufflant sur les braises froides, les autres jetant des buches empilées à cet effet. La plupart des mercenaires trouvaient frustrant de vivre ainsi dehors, juste à l'ombre des murailles de Taillemont et des maisons confortable qu'elles protégeaient. Shaiélaè ne partageait pas l'avis de ses nouveaux compagnons d'arme. La vie au grand air lui plaisait. La ville était trop différente de tout ce qu'elle avait connu depuis lors, trop dépaysant. Elle préférait prendre ses repas autour d'un feu de camps que dans une auberge bondée et bruyante, pleine d'étrangers. Là, dehors, elle entendait le vent, le chant des oiseaux, le cris des crapauds. Après une vie passé dans un village minuscule au milieu de la jungle, la ville était trop exotique, intimidante. Elle pouvait s'habituer à la campagne façonnée par l'activité humaine et les près bordés de hais encerclant Taillemont sur plusieurs kilomètre. Elle s'était habitué au climat, humide comme chez elle, mais froid. Le ciel gris au dessus de la tête au lieu d'une voûte infinie d'arbre et de feuille, elle s'y était habituée. La ville, l'angoisse de la foule, les visages inconnus, la labyrinthe des rues dans lesquelles on se perd, ce n'était pas pareil. Jamais elle ne s'y habituerai.

Un feu joyeux crépita bientôt. Le petit groupe rassemblé autour le serrait de près pour chasser l'humidité de la nuit et la fraicheur du matin, évitant soigneusement de se placer dans le sens du vent où flottait l'épaisse fumée grise que le bois gorgé d'eau rejetait. Le camp tout entier était semé de dizaines de feux de camps autour desquels s'agglutinait des grappes humaines. Quelqu'un passa entre eux tirant un ânes charriant de lourds sacs de provisions. On les déchargea. Une voix quelque part réclama une casserole. Une autre assura qu'elles arrivaient. Une demi-heure plus tard, les mains avide faisaient passer les gamelles pleines de tambouille chaude et nourrissante.

Shaiélaè serra son écuelle entre ses mains engourdie. Elle grimaça en en regardant le contenue. Sarrasin bouilli avec du bœuf. Un plat simple, calorique et peu cher, parfait pour une armée de mercenaire affamés. Tous dévoraient leur rations. Sauf Shaiélaè. Elle fouillait son écuelle du bout du couteau, séparant méthodiquement les grains châtain de sarrasin et les filaments brunâtre de viande de bœuf. Deux tas distinct se formèrent de part et d'autre de son assiette. Elle touilla encore un peu le sarrasin à la recherche de morceaux de viande qu'elle aurait pu y oublier et entama son déjeuner.

" Tu fais encore le tris ? Arrête ça, tu va avoir faim ! " dit Ioreck derrière elle, qui venait de la rejoindre.

Shaiélaè reposa la cuillère de filaments de bœuf qu'elle s'apprêtait à avaler.

" Je fais ce que je veux ! C'est ma culture. Ma religion ! En plus, j'aime pas les végétaux !"

" Ce n'est pas assez pour un déjeuner !" s'entêta son ami. " Regarde, tu as peine trois cuillères de viande. Et c'est comme ça à chaque repas, tu vas te laisser mourir de faim ! Tu dois manger. T'adapter. Regarde les autres bosmers de la compagnie : aucun d'eux ne respecte plus ton Pacte stupide. "

Honneur et AmertumeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant