Les sans-tresses II : Vengeance pour Elena

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Le ventre gargouillant de Ioreck rapella au nordique que l'heure du repas approchait. Encore une journée peu productive... Il détestait cette inactivité, cette stratégie défensive adoptée par les gros bonnets de l'état-major qui refusait de chercher la bataille avec les elfes.  Le dernier combat remontait à quoi, deux mois ? Sans compter cette escarmouche, juste avant que Shaiélaè ne revienne de sa satanée mission-secrète dont elle refusait de lui piper mot. Tout ce qu'elle pouvait lui dire, c'est qu'elle repartirait bientôt, dans quelques semaines tout au plus... Ioreck feignait l'inintérêt à ce sujet lors de ses discussions avec la petite elfe. Tout juste osait-il quelques questions à mot voilé, mais son amie ne saisissait jamais la perche de ses allusion. Il craignait  qu'elle ne le juge jaloux d'être membre d'une escouade d'élite détachée en mission occulte. Comme s'il pouvait l'être ! Bon, en vérité il l'était. Un peu. Mais surtout atrocement curieux. La mission de Shaiélaè la conduisait dans le désert, les preuves l'attestaient. Mais que pouvait-elle donc y faire qui nécessite la supervision d'une agent des Lames ? Raaah... l'idée qu'il ne connaitrait sans doute jamais la réponse à cette question lui filait des démangeaisons... Peut-être qu'après la guerre, Shaiélaè accepterait de lever le voile recouvrant cette question...

Ca le démangeait, ca le démangeait, Shaiélaè se plaisait dans sa nouvelle unité. Il ne l'avait plus vue aussi épanouie depuis la mort de Saïd...  Le nordique voyait des étoiles briller dans les yeux de son amie avec un éclat qu'il avait cru éteint depuis bien longtemps. Finalement, c'est ce qui comptait, non ? Qu'elles soit heureuse, qu'il profite au mieux du temps qui leur était impartis ensemble avant son prochain départ. Lui n'était par contre pas prêt de bouger du camps, au train où les choses allaient. Les troupes de choc ne brillaient pas particulièrement pour leur discipline et la longue inactivité n'arrangeait pas les choses. Les officiers  se voyaient chaque jour qui passait contraint de redoubler d'imagination pour occuper les muscles et l'esprit de leurs soldats .  Ils se sentaient dans la peau de chiens affamés tirant sur leur laisse de toute leur force pour attraper un morceau de viande tout juste hors de porté, alors que leur maître s'épuise un peu plus chaque jour à réfréner leur effort.

Le moral s'en ressentait et les tensions se multipliaient au sein de bataillon. Suzanna, par exemple. La guerrière boudait Ioreck. Elle ne lui avait plus adressé la parole depuis ce bête incident avec la gamine qui soignait sa blessure reçue lors de la dernière escarmouche. Elle lui fit des avances que Ioreck écarta. Une gentille fille, mais plutôt laide. Dans le genre garçon manqué. Ca aurait pu s'arrêter là, mais Suzanna s'en mêla elle aussi. Pour une raison ou une autre, elle prit le refus comme un affront personnel. Elle essaya de l'intimider, avec ses airs de molosse et dès lors lui fit la tête en l'ignorant dès que le nordique tenait de lui parler. Ah, les femmes... Qu'est ce que ca pouvait lui fiche, par Talos, qu'il sorte avec telle ou telle fille et rejette celle là ? Shaiélaè aussi, tiens, avait semblé trouver ça révoltant. Comme à son habitude, elle ne lui fit la tête qu'un jour ou d'eux avant de revenir comme si rien ne s'était passer et d'oublier entièrement cet incident sans jamais en reparler. Il n'aimait pas les filles soldats, il faisait ce qu'il voulait, non ? Il passait ses journées dans un camps militaire, il avait bien le droit de rêver des filles étrangères à ce monde là. Il ne voyait pas de réconfort dans les mains caleuses d'une garçonne manipulant chaque jours la mort, mais dans celle d'une femme pure qui parviendrait à lui faire oublier ce qu'est la guerre. Elena ne pouvait être son amoureuse elle était déjà sa sœur. Le lien puissant forgé par la guerre et les épreuves les unissait l'un à l'autre, autant qu'il liait Ioreck à chaque homme et chaque femme de cette armée. Ioreck accepterait sans une hésitation de mourir pour Elena mais s'imaginer l'embrasser laissait dans sa bouche comme relent d'inceste.

Honneur et AmertumeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant