Chapitre 14

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Je passe le dimanche à me morfondre dans mon lit. Mes bras me font mal et je réalise que ce que j'ai fait hier était stupide et irréfléchi. Mais c'est tout moi, stupide et irréfléchie. J'ai peur de revenir en cours lundi. Je ne sais pas si Mia m'a pardonné et à tout oublier ou si elle va me faire la gueule. J'espère que personne ne verra à quel point je suis brisée de l'intérieur. Je songe un instant à sécher mais je me ferais tuer par mes parents donc non.
Je ne descends pas manger. Je ne fais plus rien. On dirait que je suis entrée en hibernation. Mes parents ne se préoccupent pas de moi ce qui est plutôt bien.
Je m'endors tôt car de toute façon je n'ai rien à faire. Demain j'essaierai de lui parler, de lui demander pardon.

Mon réveil sonne. Je l'éteins d'un coup sec. Je tente de me motiver. Aujourd'hui ce sera maquillage façon pot de peinture. Il faut que je cache mes cernes et ma pâleur. Je choisi un pantalon noir et un pull noir à manches bouffantes pour qu'on ne puisse pas distinguer mes bandages. Je fais mon sac à la va-vite et je descends. Je prends un croissant et le fourre dans ma bouche tandis que je mets mes chaussures et ma veste. L'air frais me revigore. J'inspire. J'expire. Je monte à mon arrêt. J'aurais du prendre une écharpe... Le bus arrive et je grimpe. Il est déjà bondé. Je suis gênée. Je ne sais pas pourquoi j'ai un sentiment de vulnérabilité. Peut être parce que je sens le vide de Mia dans mon cœur. Je baisse la tête et observe mes pieds pendant tout le trajet. Le bus s'arrête et je marche d'un pas que je veux assuré vers le lycée mais je suis tellement fatiguée et nerveuse que je trébuche tout les 10 mètres.

Je monte jusqu'à la salle de classe. Mia et Marc sont déjà là. Bien. Je vais pouvoir m'excuser. Je m'approche. Mia me voit mais ne dit rien en revanche son petit ami me parle :

- Alors on s'est calmé depuis samedi ?

Dès qu'il peut me rabaisser et me faire passé pour une conne il le fait surtout si il y a du public.
Les quelques élèves présents autour de nous relèvent la tête de leur téléphone et se mettent à nous observer. Leurs regards scrutateurs me mettent mal à l'aise mais j'opte pour de l'humour face à Marc :

- Merci de t'inquiéter, j'avais juste trop abusé sur le café et je ne voulais pas voir ta sale gueule.

Je sais, l'humour n'est pas mon point fort mais Mia se déride derrière Marc. Mais quand ce dernier croise son regard elle se reprend et affiche une mine sérieuse.
Je vois avec horreur la main de Marc descendre jusqu'aux fesses de ma meilleure amie de manière possessive. Je plisse les yeux. Ils n'étaient jamais allé "aussi loin" au lycée. Je pressens qu'il s'est passé quelque chose. Mia capte mon regard mais baisse la tête. Je fronce les sourcils.

- Depuis quand tu l'a touches comme ça ?! Demandé-je agressivement.

J'ai l'impression que mon amie se cache de plus en plus dans le dos de son mec.
Celui-ci me regarde amusée et me dit sans finesse :

- Si ça te dérange que je l'a touche de cette manière, alors tu aurais pété un câble samedi soir...

J'équarquille les yeux. Mon cœur s'arrête. Les élèves derrière chuchotent entre eux à l'annonce de cette nouvelle.

- Ça fait quelques semaines que vous vous connaissez et vous couchez ensemble !? Tu ne respectes pas Mia !

J'espérais sincèrement que se soit lui qui est forcé pour le faire.
Il me regarde l'air narquois.

- Qui te dis que ce n'est pas elle qui m'est supplié de le faire.

Je serre les poingts rageusement.

- Je peux te dire qu'elle a aimé ça, ajoute-t-il avec un clin d'œil.

Je hurle et lui saute dessus, mains en avant. Je le plaque contre le mur. J'entends à peine les cris surpris des autres élèves. J'assene un coup de poing sur le visage de Marc digne d'un coup de boxeur. Il réagit avec un temps de retard et me cogne la paumette gauche. J'étouffe un râle et entoure mes mains sur sa gorge. Je commence à serrer. Mia tente de s'interposer mais je l'ignore et la repousse ce qui permet à Marc de me jeter sur le mur d'en face. Il plonge vers moi mais je lui colle une droite. Mia crie. Fébrile de ne pas avoir mangé du week-end je ne part pas son cou de poing sur mon nez. Mes os émettent un craquement sec. Je me recule, grimaçant de douleur. Le sang perle sur mes doigts. Marc me regarde, toute rigolade disparue dans ses yeux. Si je ne pars pas il va me démonter. Pour sortir de la bagarre avec panache je lui donne un coup de pied dans l'entrejambe. Voilà qui calmera tes ardeurs. Aussitôt, une main se plaque avec violence sur ma joue. Je me retourne. Mia me regarde avec fureur. C'est elle qui m'a frappé.

- Espèce d'ordure ! Crache-t-elle, les larmes aux yeux. C'est quoi ton problème !?

Je vois que je l'ai déçu profondément.

- Salope ! Hurle-t-elle en me poussant. T'es vraiment tarée ! Jamais j'aurais du te faire confiance et devenir ton amie !

Ses mots sont comme un poignard dans mon cœur. Je suffoque.
Elle s'agenouille près de Marc et l'entoure de ses bras.
Au loin j'aperçois un surveillant, alerté par le bruit de la bagarre.

Je fais demi-tour sous les insultes et les regards noirs de mes camarades de classe. Je dévale les escaliers et percutent les jumeaux. Killian tente de m'attraper mais je me dégage. Je sors du lycée en trombe, les larmes brûlants mes paupières et les jambes en compote. Je décide d'aller dans le petit bois derrière le lycée. Un des endroits préférés pour les dealers et les couples.
Je me repasse en boucle la scène de ce matin et j'expose toute les conséquences dans ma tête dont l'exclusion du lycée et la perte de Mia. Mais je repense aussi à la tête surprise de Marc et je pouffe. Ce con ne s'attendait vraiment pas à ça de moi. J'éclate de rire même si mon nez me fait mal.
Les quelques personnes qui passent devant moi me regardent bizarrement mais j'en m'en fiche. Une fois toute hilarité disparue, je décide d'aller en centre-ville. De toute façon c'est inutile de revenir en cours autant sécher. Je sifflote tandis que je marche sur le trottoir en direction du carrefour au coin de la rue. Soudain, un sdf m'arrête.

- Excusez-moi mademoiselle, auriez vous une petite pièce que je m'achète du pain et un peu d'eau.

Je le regarde, méprisante. Et ma carte bleue tant que tu y est ? Le vieil homme me fixe avec de l'espoir dans les yeux. Il me sourit dévoilant ses dents jaunies par le temps. Il me dégoute surtout que ça doit faire longtemps qu'il ne s'est pas lavé. Après un dernier regard dédaigneux je passe mon chemin.
Arrivée au magasin, je choisi du coca et des bonbons. Une fois à la caisse, je repense à l'homme et de la tristesse pour lui se fait ressentir dans mon cœur.

- Attendez moi deux seconds, dis-je à la caissière en train de passer mes articles.

Je retourne dans les rayons et choisi un pack de petites bouteilles d'eau, de la nouriture en boîte et du pain.
La caissière me regarde mal mais encaisse mes derniers achats. Je sors du carrefour les bras chargés et retourne dans la rue ou j'ai croisé le sdf et pour la première fois depuis des mois, je suis contente de ce que je vais faire.

Une si jolie petite fleurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant