Chapitre 6 : Quand Franck s'en mêle...

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Médecin principal Leroix, psychologue au sein de l'équipe pluridisciplinaire RPS*.
Patient : Markus Faranti, adjudant-chef, sous-officier de carrière, numéro identifiant défense XX3105202X.
Entretien numéro cinq.
— Bonjour Markus, comment allez-vous aujourd'hui ?
— On va dire mieux.
— Nous en étions restés à cette jeune collègue, la dernière fois. Avez-vous suivi mes conseils ?
— Les vôtres et ceux de Franck. Vous savez, mon meilleur ami. Nos rapports se sont presque... normalisés, si je puis dire. Je n'ai pas trouvé le courage de lui demander de l'aide, ceci dit. Mais elle a été exceptionnelle lorsque je suis allé m'excuser.
— Exceptionnelle ? Voyez-vous cela.
— Oui. Elle ne m'a pas envoyé sur les roses...


— Moretti, tu prépareras le TRM 10000 de la section commandement avec tout le matériel de la popote. Appelle le gérant de l'ordinaire pour avoir un point de ce qu'il est en mesure de fournir. La sortie terrain fait moins de 36 heures, mais ça ne doit pas nous empêcher de bénéficier d'une amélio. Les gars auront besoin d'un truc chaud au retour de la marche de nuit.
— Reçu, mon capitaine, je passe le coup de fil, je récupère des bras pour porter le matos et j'y vais.
— Attends ! Étant donné que tu n'as pas touché un volant de camion depuis les manœuvres de Canjuers, c'est toi qui le conduiras. Prends d'abord contact avec ton chef de bord. Apparemment, ce sera l'adjudant Lacec. C'est bon pour toi ?
— R.A.S. Mon capitaine, je file prendre mes consignes pour demain matin.

Après avoir salué son commandant d'unité, Claire contacta l'ordinaire pour organiser la perception de denrées fraîches. Une fois le rendez-vous calé, elle enfila sa parka goretex, sortit et prit quelques secondes pour habituer son corps à la fraîcheur de cette fin mars. Le printemps arrivait, mais les matinées restaient encore fraîches dans la Marne. Puis elle se dirigea vers le bâtiment abritant les bureaux des opérations et de l'instruction. En pénétrant dans les locaux, elle sentit sa tension monter en flèche. En passant devant la porte ouverte de Faranti, la jeune femme accéléra le pas et sentit son cœur cogner un peu trop vite.

La barbe, Claire. Tu n'as plus sept ans. Tôt ou tard, il va bien falloir affronter ton dragon ! s'agaça-t-elle.

Les dernières semaines avaient été une succession d'insomnies.

Sors de ma tête, bon sang ! Et toi, change de film !

En houspillant son inconscient récalcitrant, elle regagna un semblant de calme. Identifier l'ennemi, se préparer à l'assaut, c'était un terrain connu. Aussi était-elle encore plus déboussolée par le sang-froid tout neuf que ce fichu Faranti arborait comme une médaille provocante, à chaque fois qu'ils se croisaient. Que ce soit au rapport du matin, ou par hasard dans les couloirs, il attendait qu'elle lui ait lancé le salut réglementaire pour le lui rendre d'une voix profonde.

Quant à sa poignée de main, elle aurait dû être interdite pour attentat à la pudeur tant elle créait de remous dans son ventre. Le pire, c'est qu'elle ne pouvait même pas lui reprocher d'avoir casser leur routine. Tout comme il lui était impossible de nier avoir été touchée lorsqu'il avait présenté des excuses. Fidèle à sa parole, il faisait désormais preuve d'une grande retenue à son égard. Une retenue teeellement agaçante ! Et Yann n'avait pas aidé à apaiser son esprit. Ses suppositions l'avaient tellement troublée qu'elle n'avait cessé d'y repenser, les tournant, retournant, déformant jusqu'à l'absurdité. Du coup, cette politesse presque indifférente mettait ses nerfs à rude épreuve, et le moindre contact la rendait folle. Elle ne savait plus sur quel pied danser et la fatigue accumulée ne l'aidait pas à avoir les idées claires.

Arrivée devant le bureau du fiancé de sa copine Alix, la jeune femme toqua et passa la tête dans l'entrebâillement en faisant un signe de la main à l'homme assis derrière une montagne de documents.

Cœur d'homme, âme de soldat 4 : L'homme enragé.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant