Livre 2, Chapitre 8

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Markus.

Comment a-t-on pu en arriver là ?

La course-poursuite m'a rendu complètement cinglé. Quand j'ai vu le sang sur son beau visage, j'ai presque eu une attaque qui m'a expédié vers les souvenirs les plus sombres de mon enfance. Ce n'était pas censé se passer ainsi. J'étais sûr qu'elle allait me hurler dessus d'avoir laissé faire, mais plus encore, qu'elle allait inciter Marianne à lâcher l'affaire. Je me suis planté en beauté et ça s'est retourné contre moi. Quel crétin, je n'ai jamais su comment manipuler une femme !
Claire en a profité pour s'enfuir et le temps de la rattraper, elle s'était déjà enfermée dans sa voiture. En la voyant vraiment terrifiée, j'ai su que je devais à tout prix l'empêcher de s'échapper. Parce que la scène n'avait rien d'une banale engueulade. Surtout quand elle m'a accusé de l'avoir trompée. Ça m'a rendu fou qu'elle puisse me voir comme un salaud infidèle.

J'ai cru me revoir plusieurs mois en arrière, quand je pétais les plombs au point d'aller chercher la bagarre dans les bars. J'étais à deux doigts de commettre l'irréparable. Le désespoir de la perdre a bien failli entraîner l'acte le plus abject. De ça, je ne me pardonnerai jamais. Si tous les violeurs justifiaient leurs actes par un coup de folie passager, aucune victime n'obtiendrait justice. Mais Claire ne s'est pas démontée alors que je me suis laissé diriger par mes émotions. J'en suis encore esclave, et ça me fout la trouille.
En m'acceptant dans cet état pitoyable, elle a renforcé son pouvoir sur moi. Cela devrait me déranger alors que ce n'est pas le cas. C'est même le contraire. Probablement parce que je sais qu'elle ne s'en servira jamais pour me faire du mal. Tout ce que je redoute, c'est l'image qu'elle va avoir de moi. Je suis déjà un tableau sacrément écorné, et j'en ai plein le cul d'être aussi faible.

Quant aux agissements de Marianne... Si j'ai longtemps refusé de la voir, c'était en connaissance de cause. Je crois que Marianne hait encore plus l'échec que son amour-propre. En acceptant le rendez-vous, j'ai eu peur qu'elle bouleverse ma relation avec Claire. Mes doutes étaient fondés, c'est arrivé. Elle aurait pu m'entraîner vers le fond de nouveau. Marianne a de l'expérience en la matière. Je réalise combien cette femme a besoin d'aide. Son comportement n'est pas plus normal que le mien. Si j'avais assez de bienveillance, je contacterais son mec pour la pousser à consulter. Peut-être que je le ferai. Je lui dois au moins ça.

Pour le reste, je n'ai aucune excuse. J'aurais dû me conduire en adulte en effaçant tous ses messages sans même les lire, et la bannir de mes contacts. Il est temps de le faire. Comme je le lui ai dit, c'est terminé.
Dans une certaine mesure, laisser mon portable sur la table m'a paru le moyen le plus facile d'aborder le sujet avec Claire. La connaissant, je savais qu'elle n'allait pas en rester là, et mettrait un terme définitif à cette histoire à ma place. J'ai agi comme un idiot, c'était puéril, et j'ai failli tout foutre en l'air. Peut-être l'ai-je fait malgré tout. J'ai obtenu ce que je désirais. Je l'ai rattrapée, je l'ai baisée comme un crevard, elle a accepté de revenir. Mais elle, qu'a-t-elle obtenu en échange ? Rien. Des excuses, des déclarations mais aucune explication.
Rien n'est arrangé. J'en suis presque à songer lui piquer sa contraception en espérant qu'elle tombe enceinte et ne puisse plus s'enfuir aussi facilement. À l'idée d'être le père de son enfant, mon cœur palpite. À l'évocation de ce plan ignoble, j'ai juste envie de vomir. Quoi que je tente, je pense toujours mal. Un vrai tocard...

La crise passée, nous sommes rentrés chacun de notre côté. Elle a refusé de laisser sa voiture pour monter avec moi, tout comme elle a refusé de me prendre à ses côtés. Une fois le seuil de notre logement franchi, nous n'avons plus décroché un mot. Moi de honte, elle par nécessité. Je lui ai laissé l'espace nécessaire qu'elle demandait.
Lorsqu'elle vient s'asseoir à mes côtés sur le canapé après avoir grignoté un truc d'un air absent, je respire légèrement mieux. Je n'ai pas osé l'inviter directement à m'y rejoindre ; j'ai préféré que l'initiative vienne d'elle. Je la sens déboussolée et agacée par mon silence. J'ai peur de ne pas trouver les mots pour l'apaiser, je me contente donc d'être proche d'elle, tel un garde du corps muet au désir inapproprié.

Cœur d'homme, âme de soldat 4 : L'homme enragé.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant