Chapitre 3 : Demain

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Même s'il avait su m'accorder une part de son temps, venait le moment où le village avait besoin de son chef. Ainsi, il dû partir, sans oublier de s'excuser au passage. Décidément, il était trop gentil mais c'était peut-être cela qui faisait de lui un si bon chef. Il ne connaissait pas l'arrogance de certains, et savait respecter mais aussi chérir son peuple. Moi qui ne pensais avoir personne à admirer comme beaucoup d'enfants par manque d'une figure paternel, je n'avais pas remarqué que déjà quelqu'un avait pris cette place à mes yeux.

- Trouver ma place hein...

N'avais-je pas déjà essayé ? En fait, peut-être pas tant que ça. Je n'avais fait qu'imiter les autres, et ce, toute ma vie, enfin, du plus loin que je me souvienne. Dès lors qu'on m'avait trouvé, simplement échoué et presque sans vie, je n'avais cessé d'avoir peur et de vouloir me confondre avec la foule, m'intégrer au point de ne plus avoir de différences aucunes. Mais à bien y repenser, j'étais le seul. Personne ne cherchait à ressembler autant à un autre. Ils étaient tous né au même endroit et se ressemblaient donc par une culture commune mais ça s'arrêtait là. Chacun préférait être unique. D'où m'était venu un tel besoin d'intégration ? Peut-être qu'inconsciemment, je ne voulais pas reproduire un événement passé dont j'avais malheureusement perdu le souvenir. On ne parvient pas toujours à comprendre les autres mais dans ce cas présent, c'est moi que je ne parvenais pas à comprendre. Alors comment trouver ce qui me correspondrait ? Avant de chercher ce que je pourrai bien accomplir, vers où me dirigeais, il fallait que je sache d'où je venais. Prendre le large m'inquiétait, l'inconnu me terrifiait mais la découverte et l'envie de comprendre faisait frétiller mon âme. Je devais partir.

Je me relevai enfin, portant un dernier regard vers l'horizon. Ce n'était pas la première fois que je venais ici, m'étendre pour prendre du recul, réfléchir ou simplement me détendre mais pour la première fois, j'avais la sensation d'avoir avancé. Ou plutôt d'avoir enfin la force pour le faire. Mon regard n'avait jamais été si déterminé, j'espérai qu'il ne s'imprègne plus de doute cette fois-ci.

***

À peine, avais-je laissé le chef s'en aller, que déjà, je devais partir à sa suite. La situation était assez ironique en y repensant. Le trouver, alors que ces tâches affluaient, promettait d'être éprouvant. Son bras-droit, mais aussi et surtout sa femme, Astrid Hofferson désormais une Haddock à part entière, n'allait pas être plus simple à approcher. Alors que tout était encore à faire, un soupir de découragement m'échappa déjà. Ça promettait d'être long. Sachant pertinemment que le mieux était d'attendre le soir, je décidais de me diriger vers ma hutte. Au moins, le temps ne serait pas perdu en vain.

C'est avec cette idée en tête que je franchis le seuil de ma maison, mon chez moi depuis désormais presque dix ans. Alors que mon regard s'attardait sur chaque détail, mon esprit réfléchissait déjà à quoi emporter pour ce qui, à n'en pas douter, aller être un long voyage. Rapidement, je me rendis compte que bien plus de choses me rattachaient à cet endroit que je ne le pensais. Beaucoup d'objets pourtant inutile pour un tel périple me paraissaient indispensables. A croire que je devenais nostalgique. Finalement, un objet attira particulièrement mon attention. Ce n'était qu'un bout de papier où les déchirures étaient encore apparentes. Loin d'être une peinture ou un dessin provenant d'un livre documentaire, c'était une simple esquisse, quelques coups de crayon. Pourtant, c'était sans doute le bien le plus précieux que je possédais.

Apparemment en héritage de son père, Zéphyr appréciait grandement dessiner, et il lui arrivait souvent de griffonner quelques croquis. C'était l'un d'eux. Elle représentait tout ce qu'elle voyait, que ce soit les paysages en passant par les visages ou les animaux. Son carnet à dessin était comme une pellicule de souvenirs. Si bien qu'elle ne le montrait que rarement. On peut dire que j'avais été un privilégier sur ce coup-là. En réalité, si je possédais ce dessin en particulier, c'est parce que j'en avais été le commanditaire. C'était lors d'une longue conversation que j'avais eu avec celle qu'avait été la jeune fille. En comprenant qu'elle ne dépeignait que ce qu'elle voyait de ses propres yeux, je me souviens avoir été déçu. Elle pouvait capter tant d'émotions et de belles choses, tant de souvenirs, sans pour autant qu'elle n'en fasse parti une seule fois.

Rolf - Une nouvelle épopéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant