Chapitre 3

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Les matins d'été sont toujours agréables, quand on daigne se réveiller tôt. La canicule ne frappe pas encore la nature, à peine éveillée et la bonne odeur du pain de la boulangerie, tout juste sorti du four, empli l'air. J'ai décidé de profiter du calme du village, à moitié endormi, pour faire une petite marche.

Tout semble tellement fragile, quand les humains décident de se retirer du paysage. La beauté de notre entourage est mise en exergue, les façades des maisons, les bancs, les arbres... Tous racontent leur propre histoire d'eux-mêmes, libérés temporairement du train-train quotidien des hommes.

Depuis l'annonce des fiançailles d'Alaric et ma mère, la bonne humeur règne à la maison, tout comme à la librairie. Les clients, -enfin surtout les clientes- se bousculent pour admirer la bague de la future mariée, sans lire une seule page de leur ouvrage. Je suppose qu'une boutique animée de commères vaut toujours mieux qu'un désert macabre...

Deux jours se sont écoulés depuis notre sortie à la crique avec Simon. Je ne l'ai pas revu depuis, il n'a donné aucun signe de vie après avoir aidé cette Dimitri. J'essaye de ne pas trop y penser, au risque de me morfondre, une fois de plus, sur mon sort. Je préfère dépenser toute cette énergie dans les préparatifs du mariage, prévu dans deux semaines.

Les tourtereaux veulent une cérémonie simple, "sans chichis", pour reprendre les termes d'Al, mais tout de même agréable et surtout inoubliable. Je suis chargée de partager quelques invitations et d'aider maman à se préparer pour le jour-J. Rien d'extraordinaire.

Ma promenade me mène jusqu'à la place centrale du village, totalement méconnaissable en l'absence de la foire. Cet endroit, autrefois bondé et animé se retrouve désert, silencieux, dénué de toute trace humaine. Bon j'exagère, mais la petite fontaine érigée au centre, a petite mine, comparée aux stands innombrables des jours précédents.

Je décide de m'asseoir au rebord de cette dernière et pense -encore- aux événements derniers. Mon cœur se serre à l'idée de mon ami d'enfance et je regrette profondément cette journée. Je me demande ce que l'on ressent lorsque nous sommes aimés en retour. Est-ce comme ils le décrivent dans les films ? A quoi ressemble le fait de passer du temps avec une personne qui vous estime, qui fait de vous sa priorité et dont vous êtes toujours le premier choix... ?

Je soupire. Aimer, c'est vraiment trop compliqué.

Je me lève et quitte la place centrale. Les boutiques aux alentours commencent à ouvrir et les habitants s'attèlent à quitter leur foyer pour entrer dans la vie active. Sur le chemin du retour, je croise mademoiselle Eleanor, les bras remplis de viennoiseries.

"- Vous avez besoin d'aide mademoiselle ?" Je lui demande en l'interceptant.

D'abord surprise, ses lèvres fines finissent par s'étirer en un sourire.

"- Edlynn ! Je ne pensais pas que tu étais aussi matinale !

-Je ne le suis pas", je lui avoue, tout en l'allégeant de ses affaires.

"- Mais, j'avais besoin de me rafraîchir les idées.

-Je vois, je vois. Merci, ça fait du bien d'avoir quelqu'un sur qui compter de temps en temps."

Nous continuons à bavarder pendant cinq minutes, jusqu'à ce que nos pas nous mènent au palier de sa porte. Elle reprend ses bagages et m'interrompt au moment où je compte la quitter.

"- Est-ce que tu écris toujours ?

-Pas vraiment...

-Oh quel dommage ! Tu as pourtant une belle plume, tu devrais exploiter ce talent.

SmokeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant