La Potiche

Partie 3

Tout en nouant ma cravate, je contemple Lili qui paresse sous la couette. Elle est adorable comme ça, encore à moitié endormie avec ses longs cheveux cascadant en boucles auburn sur sa délicieuse poitrine. Quand je repense à ses seins qu'elle a fait sortir du bustier, hier soir, mon sang circule plus vite dans mes veines et je lui souris :

– Tu dois être fatiguée, Lili, essaye de te reposer. Tu vas chez l'esthéticienne aujourd'hui ?

– Oui, j'aime bien celle du Delphinium, j'ai pris rendez-vous quand on est arrivés, avant-hier.

– Il y a des massages aussi. Tu devrais en profiter !

– Oui. Je vais voir. Pendant qu'on est à Londres, il y a une petite boutique de bas où je dois aller absolument...

J'aime bien voir ses yeux briller à l'idée d'aller acheter des vêtements. Il ne faut pas grand-chose pour lui faire plaisir ! Elle est toujours parfaite dans les dîners d'affaire et en plus, elle est passionnée au lit. C'est incroyable, mais avant Lili, je n'avais jamais eu des orgasmes aussi intenses, comme si j'ignorais ce que jouir signifiait vraiment ! Depuis qu'elle me suit dans mes déplacements professionnels, ma vie est différente, plus douce, plus simple. Avec Tilda c'était si compliqué ! Son adjectif préféré c'était « surfait » et elle l'utilisait à toutes les sauces pour exprimer son ennui de tout ce qui n'était pas hors du commun. Et puis Tilda voulait toujours avoir raison alors que Lili est une fille simple : elle n'a pas fait beaucoup d'études et ne s'intéresse qu'à des choses futiles comme la manucure à l'italienne ou les marques de bas de soie. Elle aime aller chez l'esthéticienne ou chez le coiffeur qui lui font des chignons sophistiqués qu'elle défait devant moi, comme hier soir ! Bon sang, il faut que j'arrête de penser à la fin de la soirée, sinon je ne vais pas être capable d'aller travailler ! Je lace mes chaussures et mes yeux sont attirés par Lili comme par un aimant. La couette a glissé et dévoile ses épaules et ses seins à moitié recouverts par ses cheveux. Quand elle voit que je l'observe, elle m'adresse un sourire heureux et bat des cils... Lili est toujours satisfaite, elle ne se plaint jamais. C'est un peu dur de le penser comme ça mais en fin de compte, Lili est la femme idéale parce qu'elle est assez bête pour n'aspirer à rien d'autre que de vivre dans mon ombre.

***

J'observe Soren qui est prêt à partir et je lui demande pour pouvoir prévoir ma journée :

– Tu vas au bureau ?

– Oui mais je déjeune avec Wessing et ensuite il tient à me faire visiter ses nouveaux locaux, dans la City.

– Tu vas rentrer tard ?

– Non. Ce n'est pas prévu. Mais tu sais que parfois...

– Bien sûr. Ne t'inquiète pas.

Bon, je sais que je dois être présentable à 18 h.

– Ca ne te fatigue pas d'être ici ?

– Non. Cet hôtel n'est pas du tout ennuyant. Il y a une piscine magnifique, en bas et un SPA et puis un sauna. Je ne m'ennuierai pas.

– Je suis heureux que tu t'y plaises.

Il s'approche de moi et m'embrasse sur la bouche. J'aimerais bien refaire l'amour mais il est prêt à partir et mon but est de lui faciliter la vie, pas de l'empêcher de bosser.

Dès que la porte s'est refermée sur Soren, je m'adosse contre les oreillers recouverts de soie et je me réjouis d'être à l'hôtel. Moi, je suis une femme entretenue qui ne fait jamais la vaisselle, jamais les lits et qui ne m'occupe jamais du linge. Quand je pense à ma mère qui faisait la cuisine en rentrant du boulot pendant que papa se vautrait sur le canapé et qui étendait la lessive avant le petit déjeuner, je me dis que j'ai une chance inouïe. Maman me dit que c'est merveilleux de s'occuper de sa maison mais, je trouve que c'est encore mieux de faire ce dont on a envie, d'être logée dans des hôtels de prestige, nourrie dans des restaurants étoilés et blanchie par le room-service tout en assouvissant chaque nuit sa passion du sexe avec un amant magnifique. Bien sûr, il y a des contreparties. Cela m'oblige à jouer un rôle, un rôle de composition créé sur mesure pour Soren.