※ Partie V ※

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Au petit matin je me réveillai en sursaut, près de Jonas et Lina. La portière du wagon avait été fermée et verrouillée. Les gens s'affolaient, un vieil homme aux cheveux gris pria tout le monde de rester calme et de ne bouger qu'en cas de nécessité. De la vapeur s'échappait du train avec un long sifflement. Le train s'ébranla dans un grand bruit de moteur. L'air dans notre espace confiné était à peine respirable à cause de la locomotive. On dégagea le trou des toilettes pour permettre une meilleure aération. De Kaunas d'où nous étions partis, nous arrivâmes quelques heures plus tard à Vilnius, la capitale. C'était l'homme aux cheveux gris qui avait lu grâce à une lucarne, la pancarte de la gare. Le train s'arrêta et l'on entendit des bruits métallique : le NKVD détachait des wagons. Peut-être celui de père ? Le voyage repris. Et une longue routine commença : chaque jour le NKVD faisait arrêter le train en rase campagne, ainsi personne ne pouvait s'enfuir sans être vu. Ils ouvraient les portes du wagon et répétaient « une personne, deux sceaux. Il y a des cadavres dans ce wagon ? ». Alors un déporté prenait les deux sceaux et revenait avec l'un rempli d'eau et l'autre rempli d'une bouillie grisâtre. Tout le monde attendait ce moment où l'on pouvait enfin respirer de l'air frais et voir la lumière du jour. Mais à chaque halte, des cadavres étaient jetés dans la boue, puis rapidement enterrés, accompagnés par les cris effrayants des proches du défunt. A chaque décès les soldats rédigeaient un document, que j'identifiais comme un certificat de décès. Après notre libération, en m'informant sur le sujet je découvris que ces certificats de décès faisaient l'objet d'un procès-verbal.

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Ruta LimasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant