Faits divers

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Inspiration

Je tape sur le clavier à une vitesse folle. Les idées affluent. Ça fait bientôt trois heures que je suis enfermée dans ma chambre avec de la musique au volume très élevé. Ma famille ne dit rien, elle est habituée. Je vais probablement recevoir quelques insultes de la part de mes frères, me traitant d'ermite et de « personne qui ne sort jamais de la maison », mais pour l'instant je suis concentrée sur l'histoire de Maddie et son fantôme. Je pose le point final, enregistre mon travail et ferme l'ordinateur, satisfaite.

L'homme du métro

Je sors du métro. Un homme me supplie.

-Je vous en prie madame. Est-ce que je peux vous poser une question? Une simple question!

Il me regarde et me demande nerveusement si je peux retirer mes écouteurs en tirant légèrement sur eux.

-Non. Non désolée, je n'ai pas d'argent à vous donner.

Je fais un pas sur le côté pour l'éviter. Il m'empêche de me diriger vers la sortie.

-Nous somme deux êtres humains, pleins de bon sens, nous pourrions probablement nous entendre.

-Non je suis désolée, je n'ai rien sur moi.

-Est-ce que je peux vérifier? Je n'ai pas bu depuis trente-six heures!

Il tend sa main vers mon sac et je fais un mouvement pour l'empêcher d'y toucher. Il est trop proche de moi, je me sens presque étouffer, je suis inquiète et personne n'est à proximité.

-Non. Non. Je suis pressée, désolée, non.

Je l'invite à s'écarter de mon chemin en posant ma main sur son épaule. Il me laisse passer en sacrant et m'insultant.

Misère

Je m'arrête d'écrire un instant en pensant à la misère de cet homme qui m'avait inspiré à la fois la haine et la pitié. Puis mon esprit dérive vers Maddie qui a vécu une situation similaire à la mienne avec Andrew Swofford, bien que la sienne ait été bien pire que moi et l'homme du métro. Je m'imprègne de la peur que j'ai ressenti ce jour-là, la peur d'être touchée, le sentiment d'intrusion dans mon espace personnel et le rythme de mes mains dansant sur le clavier reprend plus rapidement qu'auparavant.

L'homme du trottoir

Je marche dans la rue. Il est sept heures le matin. Le silence règne, les trottoirs sont vides, il fait froid. Un homme traverse la route en courant, il s'arrête près de moi. Sa démarche est étrange et son regard est perdu dans le vide : il semble voir quelque chose que je ne vois pas. J'accélère, il calque son rythme sur le mien. Il se met à me parler, mais je ne comprends pas ce qu'il dit. Il ne parle ni français, ni anglais, il ne semble pas utiliser une langue qui existe. Il marmonne, crie par moment. Je m'arrête à regret au feu rouge en espérant qu'il me laisse tranquille. Il saute autour de moi, comme un singe en criant. Je ferme les yeux au bord des larmes, je prends une grande respiration et lorsque la lumière devient verte, je me mets à courir vers le premier bâtiment que je peux apercevoir : un Starbucks. J'entend le vent siffler dans mes oreilles et comme s'il me traduisait les paroles de l'homme du trottoir, j'entends les cris incompréhensibles se transformer en insultes et en sacrements. Il ne m'a pas touché, il n'en a jamais eu l'intention. Il s'ennuie. Il reste sur son côté de la rue, son bout du monde en attendant sa prochaine victime à terrifier, immobile.

Placard et porte vitrée

Je suis assise à mon bureau, devant mon ordi. Je lance des regards furtifs à mon placard, puis je décide de prendre une pause d'écriture. J'arrête ma musique et j'écoute le silence dans la maison. Je tends l'oreille pour le moindre bruit suspect, j'entends, au même moment quelqu'un qui tente d'ouvrir la porte d'entrée. Je monte les escaliers à toute vitesse, le cœur battant et je vois ma mère, les mains remplis de sacs qui tente d'ouvrir la porte vitrée. J'éclate de rire alors qu'elle me lance un regard noir.

L'homme du placard

Je balaye la cafétéria du regard et repère Marie, mon amie d'enfance que je connais depuis maintenant dix ans, elle semble s'ennuyer profondément. Je la salue et lui demande à quoi elle pense.

-À mon programme. Je pensais aux projets que je dois remettre en arts visuels cette session-ci.

Je dépose devant elle l'article que j'ai trouvé en ligne.

- « Elle pensait que son appartement était hanté, mais un inconnu se cachait dans son placard » Attends, quoi ?!

Marie agrippe le document avec curiosité.

-Attends, laisse-moi récapituler : C'est l'histoire d'une fille qui s'appelle Maddie. Elle et ses colocataires avaient remarquées que certains objets avaient disparus de l'appartement, des vêtements, de la nourriture, mais elles avaient assumé que leur appartement était hanté. Un jour, Maddie est rentrée chez elle, seule, a entendue un bruit et elle a découvert un homme dans son placard qui portait ses vêtements ?!

-Oui, c'est fou, n'est-ce pas?

Marie sort son téléphone et recherche d'autres informations en ligne.

- Oh my god! C'est creepy as hell! C'est aussi la preuve que ma peur des portes de garde-robe ouvertes n'est pas irrationnelle! Ils disent ici que Maddie a dit qu'il était quand même gentil malgré tout. Il lui a dit qu'elle était très belle et lui a demandé un câlin pendant qu'il se regardait dans le miroir.

- Il lui a demandé un câlin? Et elle a dit qu'il était gentil?

-Oui! Leur serrure était défectueuse alors c'est comme ça que l'homme du placard, est rentré chez elle et ses colocs. Ça y est, à cause de toi, j'ai officiellement peur de rentrer dans mon appartement ce soir!

La touche « supprimer »

Je venais d'appuyer sur la touche « supprimer » pour la énième fois de la soirée. J'ai soupiré et décidé de faire un tour sur les réseaux sociaux. J'ai ouvert « Facebook », j'ai vu le titre , j'ai cliqué sur le lien. J'ai souris, j'ai trouvé mon idée.


Les points de vue d'une philosophe...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant