AVRIL

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Il m'a quitté le 11 mai.

Je ne l'avais pas vu depuis presque un an. Onze mois pour être exact. Tout est une question de date. On commence par en choisir une en commun. Celle qu'on célébrera tous les mois, tous les ans, voir toute une vie pour les plus chanceux. On finira par détester cette date. Cette date qui nous ramènera inexorablement au début de notre histoire. Ce n'est cependant pas la date qu'on détestera le plus. Une relation pourrait se résumer à un paquet de gâteaux  qu'on achèterait dans un supermarché. La date de consommation ne serait autre que la date qui marquerait la fin de toute relation entre deux personnes qui se sont aimées. Le 11 mai. Cette date : je l'exècre plus que tout. Cette date qui vous rappelle que votre histoire n'est que chimère.

J'avais failli rendre le Starbucks que je m'étais pris avec Nathan. Je pense que Nathan avait eu le même ressenti que moi. Il était devenu pâle et ses yeux verts s'étaient obscurci. Je ne savais plus où donner de la tête. Si je devais poursuivre ce semblant de date avec Nathan ou si je devais faire un bond dans le passé auprès de Clément. Que me voulait - il ? Comment m'avait - il trouvé ? Ou plutôt : comment nous avait - il trouvé ?

J'espérais au fond de moi qu'Eloise n'y était pas pour quelque chose. Après tout, je ne voyais pas une autre personne lui dire où je me trouvais. Noémie le détestait. Maxime avait pris mon parti. Quand à Eloise, je savais qu'elle avait gardé de bons rapports avec lui. Chose que je ne lui reprochais pas. Je pouvais tout à fait faire la part des choses. C'était incohérent. Elle n'avait pas pu lui dire que je me trouvais ici. Elle qui avait organisé la venue de Nathan dans ce café.

On n'est jamais sûr de rien.

Jamais certain(e) des bonnes décisions à prendre. Surtout quand elle concerne nos amours. J'ai toujours été de bons conseils avec mes amis. Pourtant, je n'ai jamais réussi à les appliquer dans mes relations. J'ai toujours l'impression de prendre la mauvaise décision en amour. Certains disent qu'il faut toujours écouter son coeur. À trop écouter son coeur, je me suis souvent rendu compte que j'en devenais déraisonnable. Le coeur a ses raisons que la raison ne connaît point.

Clément avait demandé d'une voix mielleuse à Nathan de nous laisser parler tous les deux. Nathan n'avait pas bougé de sa chaise. Je sentais qu'il n'avait pas envie de me laisser avec Clément. Il savait à quel point il m'avait fait du mal. Il savait à quel point je l'avais aimé et j'avais peur qu'il sache à quel point il m'avait manqué. Ce n'était pas bon pour lui. Tout comme ce n'était pas bon pour moi. Noémie aurait été là, elle m'aurait traîné vers la sortie.

Nathan attendait mon approbation pour laisser sa chaise à Clément.

« J'ai besoin d'aller au toilette ». C'était les seuls mots que j'avais réussi à sortir de ma bouche. Je m'étais levée de ma chaise tel un automate quand Clément m'avait saisi le bras. Son contact m'avait fait frémir de désir mais également de peur. C'était devenu un étranger. 11 mois que je ne l'avais pas vu. Était - il la même personne ? Avait - il encore des sentiments pour moi ? En avais - je en retour ? Où était - ce seulement de la nostalgie de ce que nous étions ensemble ?

Dans la vie, tout est une question de choix. J'avais choisi.

« Clément, je ne sais pas ce que tu fais ici et je ne veux pas le savoir. Lâche mon bras s'il te plaît. »

Il avait resserré  son emprise sur mon bras. Je l'avais vu comme un signe d'appartenance. Nathan s'était levé de sa chaise et avait fait face à Clément.

« Lâche là immédiatement » Je n'avais jamais vu Nathan dans cet état. Sa mâchoire s'était contractée. Ses yeux s'étaient noirci. À tout moment son poing partait dans la gueule de Clément. La force de Clément tétanisait mon bras.

« Appelle moi quand tu seras prête à me parler. Quand tu seras seule. (Il avait fustigé du regard Nathan). Au revoir Emma. »

Clément venait de disparaître.

Je n'avais plus le coeur à trouver un cadeau pour Noémie. Je n'avais qu'une envie : retrouver mon canapé et un pot de glace tout en me refaisant les détails de la scène qui venait de se passer. Clément l'avait compris et avait trouvé un cadeau à Noémie (deux places pour un concert) en prenant soin de mettre tous les noms de la petite bande sur l'enveloppe cartonné.

Le soir de l'anniversaire de Noémie, je n'avais pas osé lui en parler. Elle semblait tellement heureuse et je lui avais causé trop de soucis avec mes problèmes sentimentaux. Je ne voulais pas l'embêter le soir de ses 23 ans. À vrai dire, je n'en avais pas la force, ni l'envie ou encore le courage. Nathan s'était contenté de me demander comment j'allais toutes les vingt minutes. Je savais qu'il était inquiet. Pourtant ça avait eu l'effet inverse de ce qu'il aurait voulu. Je l'avais évité toute la soirée. Il avait fini par comprendre qu'il fallait me laisser dans mon coin. J'essayais de ne pas trop m'isoler pour que Noémie ne se doute de rien.

Un mois s'était écoulé. Nathan m'envoyait des messages tous les jours. Je répondais brièvement. Je trouvais toujours une excuse quand il m'invitait quelque part. Cette rencontre avait remis les compteurs à zéro. Il avait fini par parler de ce qui s'était passé au Starbucks à Noémie pensant que ça lui serait favorable. Noémie avait fait la sourde oreille pendant un mois jusqu'à ce petit matin :

« Tu ne comptais pas me le dire n'est - ce pas ? »

Elle avait attendu que je lui en parle.

« De quoi tu parles? »

« Fais pas l'innocente avec moi Emma. Il est revenu et tu rembarres Nathan qui est fou de toi depuis un mois. Mais enfin : qu'est - ce qui ne va pas chez toi? »

Je savais que Noémie était toujours de bons conseils mais son petit ton moralisateur dès le matin, je n'avais clairement pas envie de l'entendre aujourd'hui. J'étais de mauvaise humeur. Depuis un mois, je dormais mal. Après le nouvel an, j'avais retrouvé l'envie de dormir. Les insomnies n'étaient plus qu'un cauchemar qui appartenaient au passé. Ça avait repris après le retour de Clément.

« On en reparle plus tard. Je ne suis pas bien réveillée et j'ai très mal dormi ». J'étais en train de faire le café quand mon portable se mit à vibrer.

Le prénom de Clément venait d'apparaître sur mon smartphone. Aucune nouvelle de lui pendant un mois. Combien de fois j'avais eu envie de l'appeler mais je m'étais résignée à ne pas merder. Son impatience avait dû se manifester aujourd'hui. Je vis le regard inquisiteur de Noémie. Puis je compris ce qu'elle voulait faire. Trop tard.

Elle avait bondit sur le téléphone et l'avait plongé dans les tréfonds de mon café brulant.

« NOÉMIE ! TU ES CINGLÉE ! »

Mon portable continuait à sonner, j'essayais tant bien que mal de le récupérer mais il était trop chaud.

Il s'arrêta  de vibrer.

J'avais l'impression de me retrouver dans cette scène. J'étais mon portable et le café s'avérait être ma vie sentimentale dans laquelle je me noyais en ce moment même.

Calendrier affectifOù les histoires vivent. Découvrez maintenant