chapitre 10

13 2 0
                                    


Nous avons tout laissé de côté, n’emportant que le nécessaire avec nous, trop pressés pour démonter le camp. Nous avons juste prit le van et nos jambes à nos cou.
Plusieurs heures plus tard, lorsque nous étions sûr de ne pas être suivis de trop près par Shella, Simon a déposé le van en dans un concessionnaire d’occasion et a acheté un camping car. J’avoue apprécier le confort de ce modèle quasiment neuf et me demande comment Simon peut avoir autant d’argent a dépenser.
Confortablement installée en tailleur sur l’un des lits, au fond du véhicule, ma tête dodeline sous l’effet de la fatigue.
Alexeï s’installe à côté de moi.

- Pourquoi tu ne te reposes pas ?

Je lève la tête vers lui, dans un état second. Je suis totalement épuisée, mais j’ai peur. J’ai peur de créer un accident alors que nous sommes sur la route, j’ai peur de tuer quelqu’un, l’un d’entre nous. Je le regarde sans oser lui répondre la vérité, mais comme s’il avait deviné mes pensées il me lance un sourire encourageant.

- Ne t’inquiète pas pour nous, si jamais quelque chose arrive avec ton double, je réveillerais l’original.

Je laisse un sourire glisser sur mes lèvres et m’allonge sur le côté, tout en regardant Alexeï alors que mes paupières s'alourdissent.
Cette situation me paraît très intime, comme si lui et moi, avions passé un cap dans notre relation. Ou peut-être que c’est normal pour lui de plonger son regard dans celle qui s’endort devant lui ?
Je ne m’interroge pas plus pourtant, je divague, ma vision se trouble et le noir m’envahit. Je soupire de soulagement et me glisse entre les bras de ce merveilleux Morphée.

Quand j’apparais, je suis debout, et j’observe Alexeï qui à toujours les yeux posés sur mon autre moi. Il a un regard doux et bienveillant. Un peu gênée par cette vision, je fais un geste pour attirer son attention et il sursaute, quittant aussitôt mon autre moi des yeux.
Ses joues prennent une teinte rosée et il se lève tout en fermant le rideau qui nous sépare de mon vrai corps. Je vois son regard se poser sur mon arcade tuméfiée et il grimace.

- C’est un sacré coup que tu as reçu. Tu es sûre de ne pas vouloir demander à Allie de te soigner ça ?
- Ce n’est rien, juste une bonne bosse.
- Une bosse qui saigne, ce n’est pas rien. Laisse moi au moins nettoyer.

Je m’assieds sur une chaise et le laisse glisser sa main sous mon menton pour me relever la tête et inspecter ma blessure. Le grand blond fouille dans tous les placards du véhicule et finit par trouver ce qu’il cherche : une boîte blanche ornée d’une croix rouge sur le dessus. La trousse de secours.
D’une main sûre, il déchire le papier d’une gaze et l’imbibe d’un liquide transparent, Alexeï tend la main et essuie le sang séché que je n’ai pas eu l’occasion de nettoyer jusqu’à maintenant. Des picotement attaquent la plaie et je grimace.

- Quand ça pique, c’est que ça guéri !

Il me regarde et sourit. Moi aussi, je souris. Quelqu’un se racle la gorge un peu plus loin et notre contact visuel est rompu. C’est moi qui détourne les yeux. J’aperçois Lucas qui nous observe du coin de l’œil et je vois Allie qui lui donne une petite tape sur l’épaule. Le brun détourne le regard mais je garde le mien rivé sur l’avant du véhicule – là où se trouvent nos trois compagnons de route.

- Bon, les enfants, je fais quelques détours pour semer d’éventuels poursuivants mais si tout se passe comme prévu, ce soir, nous arrivons au QG.

Allie, Lucas et Alexeï réagissent avec enthousiasme, apparemment heureux de rentrer chez eux, mais moi, je ne dis rien. J’appréhende de toutes les façons possibles ce nouveau lieu me posant milles questions.

***

Plusieurs heures se sont écoulées et je me réveillée alors que la nuit est tombée depuis longtemps. Depuis l’annonce de Simon, l’ambiance est différente, l’impatience est palpable.
Personne ne prononce un mot lorsque le camping car ballotte sur une petite route exigüe, cela dure plusieurs minutes et j’en viens à me demander si je ne vais pas finir par être malade mais nous nous arrêtons devant une immense porte de garage.
Simon coupe les feux et une grosse porte s’ouvre. La lumière nous éblouie et je découvre un hangar où des dizaines de véhicule stationnent. Il y a de tout : un bus, des voitures de collections ou des modèles plus discrets, j’aperçois un autre van comme celui qu’on a abandonné ce matin et deux  camping car un peu moins récent que celui que nous avons.
Enfin, nous nous garons et le moteur s’arrête.
Chacun descend précipitamment, soulagé de quitter une bonne fois pour toute le véhicule et je sors en dernière.
La surface de ce que je suppose être le garage m’impressionne, on se croirait dans un stade de football couvert. La hauteur du plafond est incroyable également.
Je ne dis pas un mot quand tout le monde se dirige comme un seul homme vers une petite porte située au fond de l’immense pièce. Alexeï se retourne vers moi et ralenti l’allure pour s’arrêter à ma hauteur.

- Je suis sûr que tu vas adorer la suite.

Il m’envoie un sourire rassurant et pousse la porte pour me laisser le devancer. Je ne comprends pas de suite ce qu’il veut dire, nous entrons sur un couloir sombre où nous avons le choix entre tourner à droite, ou à gauche. Simon nous fait prendre la seconde option. Nos pas résonnent sur un sol bétonné et rugueux, le plafond est bas à présent et les murs sont étroits, tout est d’un blanc crème passé et triste sauf sous nos pieds où ça tire sur le gris foncé.
Après plusieurs enjambées, nous passons une autre porte.
Je comprends ce qu’Alexeï sous entendait. Nous sommes dans le réfectoire et un brouhaha se fait entendre. Il doit y avoir une petite centaine de personne, attablée en groupe sur plusieurs tables, on nous remarque à peine, trop concentrés sur leur conversation et leur plateau de nourriture pour nous accorder plus d’importance.
C’est Lucas qui s’empare du premier plateau pour faire la queue et nous imitons tous son geste. L’odeur me chatouille agréablement les narines et mon estomac gronde, ça sent les plats chauds, la pomme de terre et la viande et c’est ce qu’on sert en quantité astronomique dans mon assiette. De la purée et du poulet dégoulinant de sauce. Ma bouche salive, j’ai dormi longtemps aujourd’hui, je n’ai rien avalé depuis mon dernier repas au camp hier soir. J’ai un appétit d'ogre.
Nous nous installons tous à une table ronde et attaquons de la même façon notre assiette.

- Je te ferais visiter les lieux si tu veux.

C’est Allison qui me parle, la bouche pleine et les yeux brillants d’excitation. Elle bouge beaucoup sur sa chaise, même si elle mange, elle n’a pas l’air de pouvoir tenir en place. Je lui souris pour toute réponse, l’enthousiasme dont elle fait preuve me gagne et j’essaye de m’imaginer ce qui m’attends.
Le réfectoire est une grande pièce, pas autant que le garage évidemment et avec un plafond d’une hauteur raisonnable, mais assez grande pour accueillir une centaine de tables comme la nôtre qui peuvent elles-mêmes accueillir une demi douzaine de personnes. Le sol est en carrelage gris et les murs d’un blanc sali, au fond, il y a la cuisine fermée aux hôtes et un accès aux cuisiniers pour nous servir.
Je souris, la salle ressemble beaucoup à celle de mon ancien lycée, mais contrairement à ce que je pensais avant d’arriver, il y a des personnes de tout âge. J’aperçois même un couple quinquagénaire qui se tient la main, un peu plus loin.
Je suis coupée dans ma contemplation par l’arrivée d’une jeune femme qui a à peu près notre âge. Elle s’installe entre Allie et Lucas et s’accroche à son bras en lui souriant.

- Votre balade a duré plus longtemps que prévu !

Je lève un sourcil en observant sa démonstration possessive. Elle ne me lâche pas du regard et le mien dévie sur Allie qui hausse les épaules, aussi étonnée que moi. Je me souviens de ce qu’elle m’a dit la veille au soir «Je n’ai jamais connu Lucas avec une fille», alors peut être que la jeune rousse a raté quelque chose.
La nouvelle venue me toise toujours, une lueur de défi brille dans ses yeux de biches bleus océan, sa longue chevelure blonde remue derrière sa tête, prise dans une queue de cheval haute et son sourire n’a rien de sympathique. Elle est belle à glacer le sang.
Je détourne alors mes yeux d’elle sans me démonter pour autant, mon attention se reporte sur ma nourriture que j'engloutis allègrement.

- Je m’appelle Lyvia.

Elle s’adresse à moi, pour que j’arrête de manger et que je commence à la craindre si j’en crois son air hautain.

- Marysa.

J’ai la bouche pleine et on comprend à peine ce que je dis, ça fait rire Allie.
Je n’ai pas l’intention de lui offrir plus d’importance qu’elle ne mérite.
Alexeï a les yeux qui roulent de Lyvia à moi. La tension est palpable pour tout le monde, si bien que Simon, indifférent à tout ça se lève et disparaît en vidant son plateau.
Seul Lucas semble serein. Comme si aucune harpie blonde ne s’était pas agrippée à son bras.
Elle retourne alors son attention vers Lucas.

- Vous avez encore trouvé un nouveau chien errant ?

Je me raidis et cesse de manger. Ok, première attaque personnelle.
Mon père m’a toujours dit que les chiens ont tendance a tester leur maître. Si on ne réagit pas assez vite la première fois, alors il se dira qu’il est le dominant pour le restant de ses jours.
Lucas réagit alors, son regard se relève vers moi, mais je n’arrive pas à le déchiffrer. Est-ce du défi ? Attend-il une réaction particulière de ma part ?

- Laisse-nous manger tranquillement tu veux ? Tu pourras cracher ton venin plus tard si ça te chante, mais on est tous fatigués du voyage.

C’est mon premier avertissement et j’espère qu’il fera mouche.
Un jour, Papa m’a dit qu’il ne fallait pas que je me laisse faire, plus personne ne m’a cherché des noises depuis. Loin d’être la jeune femme chétive et apeurée que j’ai été jusqu’à présent, mes camarades de route n’ont aucune idée de qui je suis réellement.
Je ne sais peut être pas me battre, je ne sais pas non plus utiliser mon don, mais je ne me laisse pas faire non plus.
Lyvia me lance un sourire carnassier, elle n’en démord pas. Dommage. Ignorant mon avertissement, elle continue.

- Je me demande quand Simon arrêtera de les récupérer dans le caniveau. Blanche comme elle est, elle doit sûrement faire partie de ces junkies. Vous avez vérifié ses bras ?

Je bois d’une traite mon verre d’eau et aperçois le regard de Alexeï se durcir devant moi.

- Lyvia. C’est bien ça ? Encore une fois, j’aimerai bien finir de manger, je suis affamée, s’il te plaît. Fiche moi la paix.

Le son de ma voix devient plus grave. Je m’agace de plus en plus, les poings serrés, je suis prête pour le troisième round.

- Je suis sûr que c’est elle qui a tué quelqu’un pour une dose. Elle ne mérite même pas son don.

Je ne tiens plus, je me lève d’un bond et m’apprête à lui jeter mon poing gauche dans la figure mais Alexeï réagit plus vite que moi, il m’attrape par les épaules et m’éloigne de la blonde qui s’est levée, l’air choqué.
Je lance un regard noir à Lyvia et aperçois Allie, l’air contrarié et Lucas…qui sourit ? Je l’observe alors que Alexeï me tiens fermement le bras sans pour autant me faire mal. Le cou à moitié tordu, je n’arrive pas à comprendre comment ce bellâtre arrive à s’amuser de la situation.
Nous passons une porte et nous retrouvons dans un couloir identique à celui que nous avons traversé en arrivant. Le jeune russe s’arrête et me fait face.

- Non mais quelle connasse !

Les mots m’échappent, je croise les bras autour de ma poitrine, la rancune tenace.

- De si vilains mots dans une si jolie bouche...

Je ne relève pas, je fais les cent pas, me demandant si il n’est pas trop tard pour y retourner et lui mettre une bonne gifle pour lui remettre les idées en place.

- Dire que je suis un chien errant, passe encore ! Mais de là à me traiter de meurtrière !
- Je sais, Lyvia est…spéciale.
- Spéciale tu dis ? C’est une connasse oui !

Il grimace, Alexeï n’a pas l’air d’apprécier mon langage et je m’en contrefiche.

- Elle teste souvent les nouveaux arrivants. On est tous passé par là.
- Ah oui ? Elle t’as traité de junkie toi aussi ?

Il marque une pause avant de répondre, son regard fuit le mien, ses joues prennent une teinte rosée et il se gratte la tête.

- Non, pas vraiment en fait. J’ai eu le droit à un accueil un peu plus chaleureux.

Je lève les yeux au ciel. Et curieusement, une sensation désagréable me traverse.

- Évidemment !
- Ça n’a pas duré longtemps ! J’étais nouveau et…enfin, je suis un hom…
- Tu n’as aucune raison de te justifier. Ça ne me regarde pas.

Je frissonne en imaginant mon ami avec cette harpie. Alexeï m’observe, comme s’il attendait une quelconque réaction de ma part, mais laquelle ?
À la place de ça, je me dirige à l’opposé du réfectoire, l’allure lente pour qu’il comprenne que je l’attends. Le blond me rattrape rapidement et nous marchons en silence.
Finalement, c’est lui qui me fait faire le tour du propriétaire. Enfin une partie, d’après lui, l’endroit est immense. Nous sommes dans une usine de papier désaffectée, elle dispose de plusieurs étages sous terre.
Il y a longtemps, elle traitait tout, du tronc d’arbre à la feuille de papier à imprimer. Mais, les employés ne supportant plus d’être enfermés sous terre, l’usine a fermé et s’est installée ailleurs.
Comme c’était le plus gros employeur à plusieurs centaines de kilomètres à la ronde, les villages alentours ont fini par se vider. Il n’y a plus âme qui vive dans le coin, très peu de voiture circulent et le chemin que nous avons emprunté en arrivant est si bien dissimulé que personne ne pourrait tomber dessus par hasard.

- Mais et l’électricité ?

Alexeï sourit tandis que nous sortons de la salle de bain commune du rez-de-chaussée.

- C’est là qu’entrent en jeu nos dons. Ils sont quatre à maîtriser l’électricité qu’elle soit statique ou aussi puissante qu’un orage. Le père de Simon a travaillé là-dessus un bon moment, mais il a réussit à créer une machine qui emmagasine cette énergie et grâce à elle, nous pouvons la doser et l’utiliser.

L’histoire qu’il me raconte est passionnante, j’ai l’impression d’être dans un film.

- Le père de Simon est ici ?
- Oui, il faisait parti d’une branche scientifiques qui travaillait sur nous, il a finit par quitter ses recherches quand Simon a commencé à…muter.
- C’est lui qui a trouvé cet endroit ?
- Oh non. Ça fait longtemps que l’usine est habitée par les initiés. Personne ne saurai dire depuis quand. Elle est fermée depuis 1876, c’est tout ce que je sais.

Plus nous descendons, plus l’air se fait pesant, ça sent le renfermé et j’aperçois des aérations à chaque virage de couloir.
Alexeï s’arrête et me tend une clé.

- C’est la clé de ta nouvelle chambre, il y en a bien assez pour tout le monde ici. Si tu ne te sens pas bien dans celle-ci, parce que tu es claustrophobe ou pour n’importe qu’elle autre raison, il y a encore d’autres lits disponibles au rez-de-chaussée, mais c’est des chambres communes.

Je hoche la tête. À son ton, je remarque que ce n’est pas la première fois qu’il fait ce discours qu’il à l’air d’avoir apprit par cœur. Je fais tourner la clé dans la serrure de la porte numéro 2034 et l’ouvre. Alexeï trouve l’interrupteur avant moi et me laisse découvrir ma chambre.
C’est une petite pièce à la décoration sommaire : un lit simple, une armoire en fer un miroir et un lavabo. Au plafond pend une ampoule nue qui éclaire des murs gris et un sol en linoleum gris clair.
Je remarque avec soulagement la brosse à dent, le dentifrice, la serviette de bain et une tenue complète – grise elle aussi – posés sur le matelas.

- Les couvertures et draps sont dans l’armoire. Je sais, c’est pas hyper agréable, mais au fur et à mesure, tu finiras par décorer un peu tout ça à ton goût et, qui sait, tu te sentiras chez toi ?

Je lui souris et m'assieds sur le matelas qui est beaucoup plus confortable que ce qu’il paraît. Alexeï me regarde, l’épaule contre le seuil de la porte, les bras croisés.
Je tourne la tête vers lui et hésite. Cela fait plusieurs jours que je n’ai pas été seule. Je devrais rêver de cette intimité qui m’a fait défaut jusque-là, mais j’ai peur. J’ai peur de ressentir à nouveau ce vide qui se reforme déjà dans mon estomac.
Le russe se redresse.

- Je vais te laisser, les douches sont juste à droite au bout du couloir. C’est écrit sur la porte. Si tu me cherche, je suis chambre 1988, n’hésite pas…

Il commence à partir, je me lève. Je ne veux pas qu’il parte.

- Alexeï !

Il se retourne, m’interroge du regard, mes yeux le supplient de rester, mais un seul mot s’échappe de mes lèvres :

- Merci.

Il sourit et hoche la tête en guise de réponse, mais paraît un peu déçu. Moi je le suis, déçue. De moi-même.
Alors je ferme la porte et m’assieds de nouveau sur le matelas, dans cette pièce sans fenêtre où seul l’air conditionné m’empêche d’étouffer.
Le vide au creux de mon ventre s’agrandit et ma vue se trouble. Une larme s’écrase sur mon short, une seconde et puis je ne contrôle plus rien.
Je pleure parce que je suis seule et que je suis incapable de demander de l’aide. Parce que je suis perdue, ici, si loin de chez moi, au milieu de centaines d’inconnus.
Je pleure aussi parce que je ne contrôle plus rien, mon corps, si différent, si incroyable, semble à bout de force, ces larmes sont celles qui débordent du mur que je me suis construite depuis la mort de Papa, celles qu’on m’a reproché de ne pas verser à son enterrement. Je suis submergée, par l’émotion, la tristesse et  l'incompréhension.
La colère aussi ! Oui, je suis en colère. Contre Maman qui n’est jamais revenue, contre Papa qui ne devait jamais partir. J’ai mal et je n’arrive pas à faire taire la souffrance.
Je m’allonge sur le côté, en position fœtal sans pouvoir me calmer. Et puis je m'épuise, mes yeux humides se ferment à bout de force et je m’endors, lentement.




Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Jul 03, 2019 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

J'ai rêvé de nousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant