CHAPITRE 5

31 5 13
                                    

THÉSÉ

Les mondes parallèles existent aujourd'hui, celui des êtres humains, et le nôtre, vampires, pourtant c'est sur cette même Terre que nous habitons et cela ne changera jamais.

Je reste seul dans la chambre devant elle en regardant le matériel de transfusion sur la tablette à ses côtés.

Son visage doux et détendu paraît comme endormit alors qu'au fond d'elle même elle se bat pour faire son choix entre la porte blanche et lumineuse de la vie et les bras squelettique que lui tend la Mort.

Sans perdre de temps, je prends rapidement la seringue disponible et regarde l'aiguille pour son bras d'un oeil attentif.

L'épaisseur de la pointe en métal est impressionnante, elle transpercerait ses fines veines dès le premier geste.

Je me retourne aussitôt et fouille dans la commode derrière moi pour y extirper une aiguille beaucoup plus fine.

Un échange standard, des gestes précis, une désinfection de son bras et du mien, il ne reste plus qu'à la diriger vers la vie.

Je serre légèrement son bras gauche, le seul qui lui appartienne vraiment, pour que sa petite veine se montre.

N'importe qui aurait flanché et s'en serait prit à elle en faisant mes gestes mais je reste de marbre devant elle. Ce n'est pas maintenant que je dois perdre le contrôle, je sais qu'elle devra mourir un jour mais ce ne sera pas aujourd'hui. C'est au destin seul d'en décider.

Mes doigts encerclant son bras sont glacés. Ils sont encore plus pâle que sa peau déjà extrêmement blanche et cette vision me fait à peine sourire.

Elle ne doit certainement rien ressentir tant son état est pitoyable, mais je sais qu'au fond d'elle, restera imprégné cette sensation de fraîcheur.

Je me concentre et plante alors l'aiguille dans sa peau de porcelaine pour atteindre sa petite veine. Elle ne réagit pas et se laisse faire.

Par connaissances et habitude, je me pique et attends que mon sang, un sang noir, coule le long du tube en plastique jusqu'à atteindre son bras.

Je ne sais pas si je dois m'inquiéter ou regretter quant à ce que je suis en train de faire.

Je connais les risques mais elle en vaut la peine, quelque chose en moi le sait.

Pourtant sans même regretter mes actes je viens de l'entraîner entre nos deux mondes.

Ce sera à elle de choisir sa voie, et je ne pourrais rien faire contre ça.

Malgré ça, elle sera toujours libre parce que je veux voir de mes yeux la façon dont elle se relèvera.

À vrai dire, en la regardant avec attention tandis que mon sang continue de couler en elle, je la trouve belle pour une humaine qui ne cesse de vieillir à chaques secondes.

Ses cheveux roux, automne, tranchant avec sa peau claire, ses yeux noisette et la grâce qu'elle a en dansant sont uniques.

J'étais présent ce soir-là, l'opéra était rempli avec une majorité de vampire, en réalité il n'y avait que ça. J'ai vu la scène se dérouler devant mes yeux et je ne saurais dire ce qu'il s'est vraiment passé. Elle était magnifique, simplement, sa seule présence sur scène comblait l'opéra entièrement d'une caresse. Tant d'élégance, de douceur, de souplesse à travers ses gestes, me faisaient m'envolais moi aussi à ses côtés. Elle y mettait corps et âme, l'oiseau semblait voler sous nos yeux.

Il n'a fallu que d'une seconde d'inattention avant qu'elle ne tombe, étoile filante passant devant mes yeux.

Son corps était comme paralizé un instant avant sa chute et son cœur battait si vite qu'il m'était difficile de compter ses pulsations, il s'affolait tant, que tout le monde pouvait l'entendre.

Lien de sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant