Une histoire de bureau (1)

79 3 6
                                    

Point de vue d'Elle.

Naël et moi nous séparâmes à l'entrée de mon cour d'Anglais. En effet, il avait pris Espagnol en spécialité. Nous n'étions donc malheureusement pas dans le même cour. On se sourit mutuellement et je rentrai dans ma classe. Un peu en retard, certes, mais cela ne valait pas le regard foudroyant que me lança le professeur d'Anglais. Je me fis alors toute petite et jetais un coup d'œil sur la classe pour repérer Alice.

En effet, ma place était à coté d'elle dans presque tousles cours qu'on partageait ensemble. Je l'aperçus dans un coin de la classe et me dirigeai vers elle.

Elle me vit alors arriver de loin et elle secoua la tête frénétiquement. Je fronçais les sourcils, ne comprenant pas son attitude. Elle parut de plus en plus affolée à mon arrivée, me faisant de grands signes à mon approche.

Tête de mule que je suis, je m'avançai jusqu'à elle quand même. Je me frayais un chemin entre l'enchevêtrement de bureaux et de chaises. Je crus que j'allais tomber plusieurs fois à cause des fameuses lanières de sac à dos qui formaient comme des pièges pour mes pauvres pieds.

J'arrivai enfin devant Alice et je me rendis compte, au dernier moment, qu'il n'y avait que son bureau. Je me figeais et me mordillais la lèvre. Je soufflai fort et me posai deux minutes pour réfléchir.

Je faisais place à un endroit vide devant moi. Pourtant, je me souvenais que mon bureau était habituellement placé à cet endroit là. En effet dans ce cours, nous avions des places attitrées pour l'année. Je regardais Alice que me fit une tête désespérée. Elle prit ensuite sa tête dans ses mains comme si elle ne voulait pas voir ce qui allait se passer.

J'entendis soudainement des ricanements provenant du fond de la salle. J'avais ma petite idée de qui m'avait fait cela. Je tentai de les ignorer, me cherchant une autre place dans la salle. Je m'avançai vers le fond la pièce espérant me trouver un nouveau bureau. Mes yeux étaient partout dans la salle.

Malheureusement, je ne vis aucun autre bureau de libre. Les larmes me montèrent aux yeux à cause de la cuisante humiliation. Je sentais tous les regards des élèves de la classe sur moi. J'étais là, plantée en plein milieu de la salle. J'essayais de me calmer et je me tournai vers où les ricanement venaient. Je ne fus absolument pas surprise de découvrir le groupe de Jasmine riant aux éclats, fières de leur manigance.

Voyant les larmes au coin de mes yeux, le groupe de filles s'esclaffa de plus belle. Je m'approchai d'elles, prête à leur arracher les cheveux. Le professeur me stoppa dans mon élan et pointa du doigt les fenêtres qui donnaient sur la cour. Il prit la parole:

-Ma chère Elle, ton bureau est par là. Ta place n'est pas ici.

Je fus clouée sur place face au choc. Le professeur ne cherchait même pas à m'aider. Au contraire, il m'enfonçait encore plus. Je jetai un regard à Jasmine et sa troupe, qui, fière d'elle, fit un clin d'œil au professeur. Le professeur lui sourit. Mais pas n'importe quel sourire. Un sourire pervers.

Je grimaçai à cette image dégoûtante. Je n'en revenais pas, Jasmine avait dû payer le professeur, ou lui échanger un de ses services. Je secouai la tête. Cette fille baissait encore plus dans mon estime, elle était capable de tout pour arriver à ses fins. Jasmine se tourna vers moi et lâcha d'un ton mielleux.

-Bah alors, Elle, où est ton bureau? Il a disparu? Et elle éclata de rire.

Je me détournai d'elle et me dirigeais vers la fenêtre. Je me mis sur la pointe des pieds pour avoir une vue d'ensemble sur la cour. Ces fenêtres étaient sacrément hautes ! Je soufflai, soudainement épuisée, et cherchai frénétiquement mon bureau dans la cour. Et je le trouvai. Il était en plein milieu de la cour. A la vue de tous. Je respirai un bon coup. Mais le flot d'émotions était trop fort.

Je déguerpis aussi vite de la salle que je pouvais. Je courais, zigzagant à travers les bureaux. Je m'enfuyais de cette atmosphère atroce. Je me sentais jugée, humiliée et rabaissée. J'ouvris la porte de la salle en vitesse et claquai la porte aussi fort que je pus. J'entendis le rire de la plupart des élèves résonner dans le couloir.

Des larmes coulaient le long de mes joues. J'accélérai la cadence et dévalai les escaliers du lycée. Je traversais les couloirs du lycée à une vitesse folle. J'essuyai mes larmes du bout de mes doigts. J'étais surtout déçue d'Alice. Elle n'était pas venu m'aider. Cependant, une part de moi la comprenais. Elle allait se mettre à dos tout le reste des élèves.

J'arrivai dans la cour et la traversai en vitesse. Arrivée au centre, j'attrapais les bords de mon bureau et tentais de le porter. Mais je ne réussis qu'à le soulever de quelques centimètres. Je soufflai et essayai de me calmer. "Ça va aller Elle, ça va aller."

Je me répétais cette phrase dans ma tête plusieurs fois, comme une litanie. Il fallait que je trouve le courage de continuer. Pourtant, j'avais une énorme envie de m'enfuir le plus loin de ce lycée. J'avais envie de baisser les bras. Mais je décidai de me battre. J'allais montrer mon courage.

J'attrapais avec force les bords de mon bureau et le tirai vers moi. Je le faisais ainsi traîner par terre. Je le traînais, certes, mais grâce à cette technique, je réussis à le bouger de place. J'avançai doucement. Pas à pas.

J'entendis des cris au loin. Je relevais la tête et vis certaines des fenêtres du lycée ouvertes, laissant place à des têtes d'élèves. Certain criaient:

-Tu vas y arriver!

D'autres,

-Tu es forte vas-y! Ne les laisse pas gagner!

Puis des cris de combats résonnèrent dans la cour. De plus en plus de têtes apparurent aux fenêtres. Les élèves criaient, tapaient dans leurs mains. Je souris et séchai mes dernières larmes, plus que jamais déterminée. Je repris le bureau et le fis traîner sur le gravier. Qu'est ce qu'il était lourd ce maudit bureau!

Je me retournai, j'avais déjà bien avancé. Il ne me restait qu'un quart de chemin à faire. Une goutte de sueur coula le long de mon visage. Je fis une petite pause pour récupérer un peu et posai mes mains sur mes genoux.

Il faisait si chaud en plein soleil! J'allais repartir lorsque j'entendis des pas derrière moi. Je me retournai et découvris Naël et Aédan, tous les deux arriver en courant, ils étaient affolés. Naël s'approcha du bureau et l'empoigna comme s'il ne pesait rien, tandis qu'Aédan et me prit la main. Il me dit ensuite sur un ton de reproche.

-Pourquoi tu ne nous as pas appelés?

Je passai une main sur mon visage et décollai quelques mèches de mon front qui étaient trempées de sueur. Je voulus me détourner de lui pour aider Naël à porter le bureau. Il me l'empêcha et me tira vers lui. Naël renchérit aux propos d'Aédan.

-Je sais que tu ne nous fais pas totalement confiance, Elle. Il se dirigea vers les escaliers menant à la salle de classe, toujours en portant le bureau. Il reprit. Mais laisse nous au moins t'aider quand tu es en difficulté.

Je me mordillai la lèvre. Je leur faisais à moitié confiance, c'était vrai. Ils me cachaient un secret. J'en étais sûre. Cela m'empêchait de les croire sur parole.

Ensuite, ce n'est pas que je ne voulais pas de leur aide, j'aimais juste me débrouiller par moi-même. Ne dépendre de personne. C'était cela que je recherchais. Ne pas être déçue d'une personne et ne pas décevoir. C'était ce que je voulais. Mais Aédan et Naël avaient chamboulé tout cela.

Allègrement.

Voici la première partie de ce chapitre, que pensez vous de Jasmine?
Cache t-elle un sombre secret la rendant méchante?
Aédan et Naël qui portent secours à leur protégée? ❤

ElleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant