Chapitre trois - Douleur et culpabilité #2

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Minho était allongé dans son lit, Newt reposant paresseusement à ses côtés. Son bras gauche entourait l'épaule du jeune homme, le serrant un peu plus près de lui tandis qu'une des mains de Newt se promenait sur le torse de Minho. Minho laissa échapper un soupir d'aise. Il adorait ce genre de moments calmes, où plus rien n'avait d'importance. Ils étaient juste là, ensemble. Pas de soucis. Pas de Thomas pour les séparer. Ces séances de câlins étaient assez rares, Newt n'étant pas l'homme le plus tactile qui soit. Il se suffisait souvent à être l'un à côté de l'autre, les doigts timidement entrelacés. Minho se demandait souvent pourquoi ce dernier semblait sans cesse sur la défensive, comme s'il s'attendait à être attaqué d'une seconde à l'autre.

- Tu le quitteras un jour ? demanda Minho, brisant le silence de leur confort.

Il put sentir Newt se raidir dans son étreinte. C'était un sujet de discussion détesté qui apportait souvent son lot d'agacement et de petites disputes.

- C'est pas aussi simple, répondit Newt d'un ton étonnamment sec de sa part.

- T'as juste à lui dire 'je te quitte', rien de très compliqué selon moi.

Il n'obtint aucune réponse si ce n'est un râle irrité. Les lèvres de Minho se pincèrent, il s'en voulut un peu d'avoir gâché l'ambiance mais le temps passait et il devait avouer qu'il avait hâte de pouvoir se pavaner au bras du garçon qui reposait tout contre lui. Il laissa un silence, pendant lequel il se rappela tout de même qu'il se devait de suivre le rythme de Newt, il le lui avait promis. 

- Je suis désolé Newt, j'aurais pas du parler de ça.

- C'est rien, je comprends.

Ils s'embrassèrent tendrement, oubliant déjà la discussion précédente. Puis Newt se figea, assis au milieu du lit.

- Newt ? l'appela Minho, visiblement confus.

L'intéressé tourna la tête en sa direction. Minho eut un hoquet de surprise face à la vision d'horreur qui s'offrit à lui. Newt arborait un œil au beurre noir sur le côté gauche de son visage, rendant son œil ensanglanté. Sa lèvre était fendue et un hématome impressionnant colorait sa joue droite. Son expression faciale se transformât en une grimace inhumaine et du sang s'écoula soudainement de son nez.

- Pourquoi tu m'as fait ça Minho ? demanda Newt, soudainement apeuré.

Minho tenta de se rapprocher de lui pour savoir ce qui lui était arrivé et pour le réconforter mais il fuit face à ses bras et se couvrit de ses mains en hurlant.

- Pourquoi tu m'as tué ? cria Newt entre les larmes, sa voix se transformant en un cri suraiguë. 

Le regard de Minho se baissa sans qu'il ne le désire sur ses poings fermés. Il eut un haut-le-cœur en constatant qu'ils étaient ensanglantés. Lorsqu'il releva la tête, Newt était inerte face à lui, baignant dans une mare de sang noir.

- Newt ! s'époumona Minho en se redressant dans son lit.

Il alluma sa lampe de chevet, le cœur battant à mille à l'heure. Ses yeux firent un tour rapide de la pièce dans laquelle il se trouvait, analysant chaque détail avant de finalement regarder ses mains.

Mais rien. Ce n'était qu'un cauchemar.

Il retomba lourdement sur le matelas, la respiration encore saccadée par sa frayeur. Ce mauvais rêve semblait si... réel. Minho pouvait parfaitement entendre la voix de Newt, quoiqu'un peu déformée, lui demandant pourquoi il l'avait tué. Il se pinça l'arête du nez, au bord des larmes. Cette vision allait être très difficile à retirer de son esprit. Il éteignit la lumière, le cœur encore battant.

Incapable de se rendormir après un tel cauchemar, il tournait et se retournait dans son lit. Ses pensées étaient un bordel sans nom, l'amenant à se rappeler les croyances de sa grand-mère. Quand il était plus jeune, elle lui conseillait sans cesse de toujours écouter ses rêves et notamment ce que les personnes décédées pouvaient lui dire. Elle pensait que le monde des rêves était le lieu de rencontre entre le monde des vivants et celui des morts. Comme une frontière où, chaque nuit, le commun des mortels pouvaient recevoir messages et conseils de leurs défunts.

Est-ce que Newt voyait vraiment son meurtrier en Minho ? Si tel était le message qu'il avait à lui faire passer, Minho n'était plus prêt de se rendormir tranquillement en espérant trouver refuge dans ses songes. D'une main tremblante, il se frotta le visage et soupira longuement. Ses yeux fixèrent l'obscurité du plafond, l'absence de luminosité créant des formes étranges dans le noir.

Cette horrible voix dans sa tête répétait inlassablement la terrible question de Newt. Pourquoi tu m'as tué ? Pourquoi tu m'as-tué ? Pourquoi tu m'as-tu-.

- Je ne savais pas ! cria Minho en fermant fortement les yeux.

Ses mains couvraient ses oreilles dans un espoir vain de faire taire l'ouragan dans sa tête.

- Je ne savais pas, je suis désolé ! continuait-il de dire, désormais en boule sous la couette.

Et il laissa le désastre sortir par le biais d'une crise de larmes assez tonitruante. Il happait l'air comme un noyé tandis que les perles salées roulaient par-dessus son nez puis autour de son oreille, avant de finalement finir leur chute sur le drap.

Il lui semblait qu'un trou béant avait remplacé son cœur et que des piques tranchantes pénétraient la plaie ouverte. Et cette blessure, il se l'était lui-même infligé en érigeant sans le savoir un mur de silence entre Newt et lui.

Minho mettrait beaucoup de temps avant de comprendre qu'il n'était pas complice du décès de Newt. Il ne l'avait pas tué mais il ne l'avait pas sauvé également. Les non-dits peuvent être fatals. Ils blessent et deviennent des armes dans les mauvaises mains mais ils restent également logés au fond de ceux qui en souffrent.

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