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J'ai rencontré mes parents biologiques. C'était bizarre. Ils étaient gentils, mais restaient quand même des inconnus. Je ne les connaissais pas, et j'avais peur d'apprendre à les connaître. J'avais alors réalisé que mes parents étaient ceux qui m'avaient élevés, pas ceux qui m'avaient mis au monde.

- Maman ? je demande en me tournant vers elle.

- Oui ?

- Est-ce que tu sais pourquoi j'ai atteris dans votre famille ? Enfin, est-ce qu'ils m'ont abandonné, ou un truc du genre ? je lance.

Elle baisse la tête, et retourne encore et encore le stylo dans ses doigts, avant de déclarer :

- On t'a adopté, parce que l'on n'arrivait pas à avoir d'enfants.

J'essaie de garder ma tristesse pour plus tard, mais je n'arrive pas à la retenir :

- Je veux la vérité. Pourquoi ? Parce qu'ils avaient trop de gosses ? Parce qu'ils ne voulaient pas de moi ?

Son regard croise rapidement le mien, et je comprends que j'ai raison. Ce que j'ai dit à voix haute n'était pas un mensonge. Je l'entends sangloter, puis je lâche :

- Ne pleure pas, maman. Parce que sans vous, je n'aurais jamais eu une vie extra-ordinaire. Sans vous, je n'aurais jamais connu Phœnix.

Elle sourit tendrement, et ouvre ses bras, signe qu'elle veut m'étreindre. Je ne suis pas fan des effusions familiales, mais je sais qu'elle en a besoin, alors je la lui rends.

Puis je pense à ce que j'ai découvert dans son bureau juste avant mon accident. J'ai envie de lui dire qu'elle m'a mentit. Lila. Lila aurait pu être ma demi-sœur. Cet acte de naissance l'aurait prouvé. Le prouve encore. Mais Lila a préféré la mort. Finalement, je n'en parle pas à ma mère. Cela rappelera trop de mauvais souvenirs.

La porte qui s'ouvre me fait sortir de mes pensées.

- Je vais y aller, chéri, je te préviens quand je repasse, d'accord ? me dit ma mère.

- Ok, 'man, bisous.

Elle sort de la pièce, et Jevi me demande, sans me regarder :

- Alors ? Tes parents biologiques ? Tu as pu les voir ?

- Ouais, je réponds froidement.

- Quoi ? Tu me fais la gueule ? lâche-t-il, surpris.

- Non, je marmonne.

- Tu boudes ? lance-t-il, ironiquement, en levant les yeux au ciel.

- Non, je répète.

- Quoi, alors ? Tu vas me dire c'est quoi le problème ? Parce que là, je ne vois pas ! s'écrie-t-il.

- Non, je continue, sans me laisser démonter.

- Non ? m'imite-t-il, ahuri, alors je vais devoir deviner ? propose-t-il.

- Non.

- Putain, mais dis-moi ! s'exclame-t-il, au bord de la crise de nerfs.

Je lève la tête vers lui, et lâche :

- Il se passe que je sais pourquoi tu es ici.

Il ne répond pas et soupire, avant d'aller s'assoir à côté de moi, sur mon lit.

- Je sais que tu as une tumeur cérébrale, que tu vas sûrement devenir fou, aveugle, ou paralysé, mais clairement, je m'en tape de ça. J'aurais juste aimé que tu ne me le caches pas. Que tu ne me caches pas que tu vas aller dans les étoiles. Il n'y a pas de honte, tu sais.

Son regard s'accroche en face de nous, sur la porte de notre chambre, et il entrelace ses doigts aux miens.

- Je suis désolé, Zio. Je te jure que j'ai essayé mais... c'est trop dûr, souffle-t-il, avant de fermer les yeux.

J'ai envie de lui dire que je suis là, de l'embrasser, mais j'en suis incapable. Je n'ai plus de force.

Ma vue commence à se brouiller, alors que Jevi pose sa tête sur mon épaule. Je sens qu'il va craquer.

- Comment tu l'as su ? me demande-t-il.

Je ne sais pas si je dois lui dire la vérité ou pas, alors j'utilise l'humour.

- Oh, j'ai dû forcer sur les nerfs de Kim. Tu sais, quand je veux savoir quelque chose, je ne passe pas par quatre chemins, je rigole.

Un médecin entre soudainement dans notre chambre, et me demande de l'accompagner. Je n'ai aucune envie de laisser Jevi seul, de peur qu'il fasse une connerie, mais j'y suis obligé.

Je quitte donc notre chambre, après que le médecin se soit assuré que plus aucun fil ne me retenait, et je lui emboîte le pas, marchant dans les innombrables couloirs de l'hôpital. Comme je m'y attendais, j'atteris dans le bureau de Kim, qui patiente derrière son bureau en souriant.

Je m'asseois en face de lui, avant de déclarer poliment :

- Bonjour.

Il me sourit en retour -sourire que j'ai envie de lui arracher- et me rend mon "bonjour" avant de s'appuyer sur son bureau.

- Vous avez enfin décidé de m'annoncer la date de ma mort ? je lance brusquement, récoltant au passage son regard bridé noir.

- Je t'ai déjà dit que nous ne la connaissons pas, jeune homme. Je ne t'ai pas fait venir pour cela, mais plutôt parce que ton colocataire de chambre m'a donné ça, me dit-il, en me tendant sa paume ouverte, où y trône mon cutter.

Je baisse la tête, et la secoue.

- Jevi... je souffle dans un murmure. M'aurait-il fait vraiment ça ?

- Il m'a également raconté ce que tu fabriquais avec. Je n'ai besoin que d'une seule réponse. Pourquoi ? lance-t-il, les yeux brillant d'incompréhension.

Je ne veux pas répondre. Parce que la réponse est la même pour tout ceux qui se font ça. Pour évacuer la douleur quand ça devient trop lourd.

Je préfère donc détourner la conversation, l'esprit embrumé de colère, ne faisant pas vraiment attention à ce que je dis :

- Si je suppose que vous n'aviez pas remarqué que je me mutilais, avez-vous vu que Jevi boit et se fait vomir en cachette, en plus de se droguer de médicaments ? Je suppose que non. Vous êtes tous pareils, ici. Tout le monde pense que vous allez nous sauver des maladies, des cancers, tout ça. Mais vous êtes aveugles. Aussi bien les uns que les autres.

Son regard s'assombrit, et sa mâchoire se crispe, c'est là que je comprends que je suis allé trop loin.

- Tu ne sais pas ce que tu dis, Zio. Tu ne connais pas notre métier, les conditions dans lesquelles nous le pratiquons. Tu es un patient comme les autres, et tu n'as rien à nous reprocher. Montre-moi tes poignets. Tout de suite, lâche-t-il, calmement.

Je me lève, et recule instinctivement vers la porte. Personne n'a le droit de les voir. Kim se lève aussi, et fait le tour de son bureau, mais avant qu'il ai pu me toucher, je suis déjà sorti en courant de son bureau, vagabondant dans les couloirs sur-peuplés de l'hôpital.

Paralysés /BXBOù les histoires vivent. Découvrez maintenant