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- On va attendre qu'il se réveille pour lui expliquer, dit une voix à ma gauche.

Je laisse mes yeux fermés pour tenter d'en apprendre plus. Et j'écoute.

- Vous en êtes sûr ? Je pense qu'il vaudrait mieux ne rien lui dire du tout... ajoute une autre voix, plus lointaine.

Puis je comprends qu'on ne parle pas de moi. Alors j'ouvre les yeux, et soulève ma tête pour regarder. Et je découvre qu'ils parlent de Jevi, allongé et inconscient dans le lit à côté de moi.

Je me laisse retomber contre le matelas, et souffle son prénom. Je n'étais pas là pour lui... alors qu'il avait besoin de moi.

J'observe les machines à côté de moi qui bippent lentement, et je comprends que je ne peux pas enlever les fils qui me retiennent comme ça. Il me faut l'aide d'un spécialiste. Et le seul qui voudra bien, c'est Kim.

Le seul problème, c'est si j'appuie sur le bouton, les médecins qui s'occupent de Jevi auront juste à se retourner, et refuseront ce que je leur demanderais. Alors je tente quand même, et j'appuie.

Comme je m'y attendais, ce sont les médecins de Jevi qui se tournent vers moi.

- Que voulez-vous, jeune homme ? Oh, vous êtes réveillé ! s'exclame une infirmière, je vous ramène ? Quel est le numéro de votre chambre ? demande-t-elle.

- En fait... je bredouille, j'aimerais voir l'anéstésiste Kim, s'il vous plaît...

Elle hôche la tête, prend la tablette dans sa poche, et cherche sûrement où il doit être. Elle relève ensuite la tête, et me dit :

- Il n'est pas disponible pour le moment, il est en opération. Je peux lui faire passer un message, si vous le souhaitez ?

- Non, c'est bon, merci, je vais me débrouiller, je lâche, déçu.

- Je vous ramène dans votre chambre, d'accord ? me propose-t-elle.

J'aquiesce, lui dis le numéro de ma chambre, et me laisse emporter à travers les couloirs de l'hôpital. Mes pensées dérivent vers Phœnix. Comment Jevi est-il parvenu à presque me le faire oublier ? Phœnix... était le seul être qui comptait pour moi, avec mes parents, bien sûr, mais c'était différent...

Quand on arrive dans ma chambre, l'infirmière fait le transfert des fils des machines, et me laisse seul. Dès qu'elle sort, j'arrache les fils un-à-un, et quitte mon lit. Les machines n'arrêtent plus de bipper. Je cherche précipitamment les boutons qui me permettent de les éteindre, et les trouve rapidement.

Je souffle un bon coup quand le silence résonne dans la chambre. Je vais devant la fenêtre, et admire Paris. C'est une jolie ville, malgré tout ce qu'on dit sur elle.

Je viens à peine de m'asseoir que j'entends la porte derrière moi s'ouvrir. Je me retourne brusquement, et souris quand je vois que c'est Kim. Qui ne me rend absolument pas mon sourire.

Il referme la porte derrière lui, et s'assoit sur le lit de Jevi, en enlevant son bonnet bleu d'opération.

- Qu'est-ce que tu me voulais ? demande-t-il, d'un ton sec.

- Rien, c'est trop tard, je murmure.

- Zio. Tu ne m'as pas appelé pour rien, et je ne suis pas venu pour rien, ok ? Dis-moi, reprend-il.

- C'était juste pour aller voir Jevi. Il lui est arrivé quoi ? Pourquoi est-ce qu'il était en salle de réveil ? je demande.

Il fronce les sourcils. Apparemment, il ne doit pas être au courant. Je fais le rapprochement.

- Vous deviez sûrement être en train d'opérer, je souffle.

Il hôche la tête, et me regarde sérieusement.

- Je vais aller voir, ok ? Ne t'inquiète pas, je suis sûr que ce n'est rien de grave, essaie-t-il de me rassurer.

Il s'approche de moi, et secoue mes cheveux, puis sort de la chambre. Je me ré-installe devant la fenêtre, en prenant au passage mes écouteurs. La musique coule dans mes oreilles, et je me suis bientôt envolé loin de l'hôpital, pour n'écouter que la mélodie et la voix.

The story never ends, de Lauv.

J'aimerais croire Kim, et penser que Jevi va bien, mais je ne peux m'empêcher de penser le contraire. Je le sais.

J'appuie ma tête contre l'encadrement de la fenêtre, et ferme les yeux, avant de plonger dans les notes qui résonnent dans mes tympans.

Quelques minutes plus tard, j'entends la porte s'ouvrir doucement, et je me retourne. Surpris de voir Jevi, je ne bouge absolument pas. Il me sourit timidement, et s'approche de moi.

- Ça va ? je réussis à articuler.

Il ne me répond pas, et se place à côté de moi en soupirant.

- Ça pourrait aller mieux... murmure-t-il.

- Qu'est-ce qu'il y a ? je lance, en fronçant les sourcils.

Il secoue la tête, et dit :

- Ne t'inquiète pas... je ne sais rien de ce qu'il se passe sur mon corps, et ça va me rendre fou. On ne me dit absolument rien, dans cet hôpital.

- Tu n'es pas le seul, je lui réponds.

Il me prend un écouteur, et l'enfonce dans son oreille, avant de lancer sa playlist préférée. Je m'affale contre l'encadrement de la fenêtre, et Jevi vient se mettre entre mes jambes, sur mon torse. Je glisse mes mains dans ses cheveux, et mon regard glisse vers la ville de Paris, illuminée. La tour Eiffel éclairée la nuit, est vraiment belle.

Je ne sais pas comment j'y arrive, mais je finis par m'endormir ici, Jevi sur moi, et la musique dans une oreille.

Je ne rêve pas, et je ne cauchemarde pas non plus. Quelque chose bouge sur moi, et je suis obligé de me réveiller, et d'ouvrir les yeux.

- Jevi ? je murmure d'une voix rauque, encore pleine de sommeil.

Je me relève brusquement, et sens une violente douleur dans mon dos. Puis je me rappelle que j'ai dormi par terre.

- Kim veut te parler, lâche-t-il, ensommeillé.

- Maintenant ?

- Ouais. Vas-y.

Je sors de la chambre, et me retrouve nez-à-nez avec Kim, qui m'entraine dans un endroit calme.

- Vous voulez me dire quoi à trois heure du matin, monsieur Kim ? je demande, complètement sonné par cette heure de réveil.

- Quelque chose d'important. Écoute-moi. Jevi ne mange plus et ne dort plus beaucoup depuis quelque jours. Son oeil droit et son oreille gauche sont paralysés, ainsi que ses doigts de la main droite qui commencent à être affecté. Il a fait un malaise. Je pense que...

Il s'arrête, mais moi, je ne peux plus attendre, alors je m'écrie :

- Vous pensez que quoi ?!

- Chut ! Vous allez réveiller les autres patients ! s'exclame-t-il, tout bas.

- Alors dîtes-moi !

- Je pense que... demain sera la dernière journée et la dernière nuit de Jevi, souffle-t-il.

Paralysés /BXBOù les histoires vivent. Découvrez maintenant