Aux alentours de quatre heures du matin, Marie vint frapper à la porte de son maître.
« - Monsieur, on vous attend en bas, dit-elle d'une voix qu'elle espérait assez forte. »
Elle savait que ses patrons n'aimaient pas être levés si tôt. Elle alluma un chandelier dans la chambre et ressortit.
Monsieur Arthur Duval quitta le lit conjugal de fort méchante humeur, laissant derrière lui sa femme Louise. Lorsqu'il descendit quelques minutes plus tard, habillé, avec sa moustache fraichement peignée, il accueillit très mal le policier en uniforme qui se tenait dans son entrée.
« - Une jeune femme retrouvée morte dans le bois de Boulogne, inspecteur, l'informa l'officier.
- C'est pour une pute morte qu'on vient me déranger chez moi, s'exclama-t-il. Vous savez bien l'opinion que j'ai sur ce genre de crime.
- Cette fois c'est différent, monsieur. La jeune femme, on ne sait pas encore sa profession, a eu la gorge méchamment tranchée, et présente divers sévices sur tout le corps.
- Des sévices ?
- Des lacérations, monsieur. »
L'inspecteur soupira.
« - Faîtes préparer mon fiacre, ordonna-t-il à Marie, restée en retrait.
- Il vous attend devant, monsieur. »
Monsieur Duval s'engouffra dans l'habitacle et le cocher fit claquer son fouet qui lança les chevaux, habitués à ce genre de démarrage. La calèche s'arrêta dans l'avenue Mozart où se trouvaient les bureaux de la police du XVIe arrondissement. On le dépêcha aussitôt sur les lieux du crime, où le corps était encore, dans l'attente du médecin légiste. Essayant de ne pas salir son pantalon et sa redingote, l'inspecteur se fraya un chemin à travers les arbres pour rejoindre les policiers entourant le cadavre. Seuls deux jeunes officiers avaient été chargés de garder le corps.
Le soleil commençait à peine à se lever, on avait donc placé des lanternes pour éclairer les lieux.
« - Alors, demanda l'inspecteur. Qu'avons-nous précisément ?
- Une jeune femme égorgée, l'informa le plus replet des deux. Ses vêtements sont déchirés et elle a de multiples lacérations.
- C'est une prostituée qui a découvert le corps en traversant le bois pour rentrer chez elle, compléta le deuxième, un jeune homme dégingandé. Elle est là-bas. »
L'inspecteur ne regarda même pas la direction qu'il lui indiquait et se pencha sur le corps. La femme avait la peau blanchâtre et avait des cernes sous les yeux. On avait manifestement d'abord voulu l'enterrer, au vu du trou présent non loin d'elle, puis on avait tenté de la recouvrir. De la terre maculait sa robe et on pouvait voir son corset, déchiré également. Ses cheveux étaient sales et emmêlés, ses chaussures gisaient à quelques centimètres de ses pieds. Le policier commençait à inspecter les plaies qui parsemaient son corps, quand le médecin légiste arriva. Il le pria de s'éloigner de la victime et s'agenouilla pour examiner la dépouille, sans même se présenter.
La pluie avait lavé le corps du sang qui avait ruisselé en grande quantité, majoritairement sur ses flancs et sa gorge. Le médecin prit des notes, étudia les quelques plaies puis se releva.
« - Je l'emmène à la morgue, annonça-t-il. Mais je pense que je n'aurai pas de surprise, il semble qu'on l'ait égorgée cette nuit.
- Et vous-êtes ?
- Excusez-moi, je ne me suis pas présenté. Docteur Gousset.
- Enchanté docteur. Les plaies qu'elle présente ont-elles été pratiquées avant ou après la mort ?
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Un Anglais à Paris
Historical FictionA la fin du XIXe siècle, un jeune anglais décide de venir s'installer à Paris afin de se faire oublier. Son admiration pour un certain tueur en série et ses crimes avait failli lui valoir des ennuis, et il lui fallait un nouvel endroit pour continue...