Chapitre 6

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Duval était plutôt satisfait. Dans l'ensemble, les premiers jours de l'Exposition Universelle avait été un relatif succès en matière de sécurité. Mis à part quelques incidents de vol à la tire, comme c'était le cas dans toutes les grandes manifestations, les forces de police n'avaient pour le moment pas eu à faire face à des menaces de bombes ou d'attentats sur les émissaires étrangers ou français. A l'ouverture, il avait lui-même supervisé la sécurité, et n'avait connu personnellement qu'un vol de sac à main, dont il avait dû poursuivre l'auteur à travers le Hall des Machines.

Même s'il éprouvait beaucoup de satisfaction personnelle à voir son plan de sécurité se dérouler sans accroc, il était frustré de ne pas réussir avancer sur son enquête. La découverte d'un deuxième cadavre de jeune femme avait interrompu l'inspecteur dans sa visite de l'Exposition en tant que civil. Il parcourut les bois avec deux agents, à la recherche de la scène de crime, et il fut stupéfait de découvrir que c'était la même clairière que la fois précédente. Pour dissimuler le cadavre, le meurtrier s'y était cette fois mieux pris, mais pas assez pour déjouer la curiosité des promeneurs, qui avaient découvert la tombe de fortune.

Duval observa les lieux mais ne vit rien qui pouvait constituer un indice, et il s'accroupit à côté du corps. C'était une femme ronde, dont le corps était lacéré de plaies de toutes sortes, certaines semblant très profondes. Pour la deuxième fois, il eut affaire au docteur Gousset qui arriva quelques minutes plus tard. Il se pencha également sur le cadavre, prit la température du foie et examina superficiellement les blessures.

« - A première vue, et sans trop m'avancer, je dirais que c'est la même personne qui a tué celle-ci et la précédente, annonça le docteur. »

L'inspecteur acquiesça. Le médecin légiste fit signe à deux policiers qu'ils pouvaient la retirer de la terre. Il les suivit, en indiquant à Duval qu'il pourrait passer le lendemain matin pour le compte-rendu de l'autopsie. L'inspecteur ordonna une fouille minutieuse de la clairière, et une dizaine de policiers se mirent aussitôt en rang et avancèrent en cœur en regardant le sol. Il les observa, tout en inspectant lui-même les alentours. Au bout d'une demi-heure de recherche, ils n'avaient aucun indice. On pouvait seulement voir les traces de l'assassin qui s'était accroupi pour déposer sa victime, puis on voyait d'autress trace de pas à l'endroit où il s'était manifestement tenu pour la recouvrir. Malheureusement, ils ne purent suivre les traces, puisqu'elles avaient été recouvertes de celles des promeneurs, puis des policiers. On pouvait également voir les empreintes des chaussures à talonnettes du docteur Gousset, juste à côté de celle du tueur.

Duval soupira et ordonna d'arrêter les fouilles. Il posta deux policiers dans le bois, avec pour consignes de surveiller la clairière, pour l'hypothétique cas où le meurtrier reviendrait sur la scène de crime. L'inspecteur lissa machinalement ses moustaches et sortit de la forêt. Il revint au commissariat en calèche, et se laissa tomber sur son fauteuil de bureau. Il était dix-sept heures, et il n'avait aucune piste sur laquelle se pencher pour l'enquête, mis à part espérer qu'il n'avait pas affaire à un tueur en série. Il consulta quelques archives, essayant de déterminer si de telles blessures avaient déjà était observées dans d'autres meurtres.

Il passa une heure entière à lire d'anciens dossiers, parmi ceux de la police de Paris. Il trouva bien évidemment de nombreux meurtres à l'arme blanche, et des mutilations de toutes sortes, mais rien qui ne sembla être exactement semblable aux découpes minutieuses opérés sur les deux corps qu'ils avaient trouvé. Il finit par rentrer chez lui, en espérant que l'autopsie serait plus fructueuse, et permettrait au moins d'identifier la victime.

Le lendemain matin, il était à neuf heures précises devant la porte de la morgue. Il frappa à la porte, mais personne ne vint lui ouvrir. Il attendit une dizaine de minutes avant qu'un assistant arrive pour lui ouvrir, et dix de plus pour que le docteur Gousset pénètre à son tour dans la salle. Il prit le temps de poser ses affaires dans son bureau, tandis que l'assistant mettait le corps de la victime sur la table d'autopsie, recouverte par un drap qui avait dû être blanc, autrefois, mais dont la teinte se rapprochait désormais plus du jaune. Le médecin légiste ressortit de son office avec sa blouse et un dossier à la main.

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⏰ Dernière mise à jour : Sep 11, 2019 ⏰

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Un Anglais à ParisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant