Ruggero
Elle ne m'a pas oublié ! Je tiens dans mes mains la preuve que Jorge avait raison. Mi Amor ne m'a pas oublié depuis la métropole, et a simplement pris son temps pour me répondre. L'enveloppe est très épaisse. Combien de passe a-t-elle écrite ? Je ne sais pas si c'est une bonne chose. Me quitte-t-elle à travers cette missive ? Avoue-t-elle son adultère ? Mon estomac se serre à cette pensée. J'ai besoin de m'éloigner un instant de l'ambiance qui règne ici !
Tous mes camarades sont aux anges. Entre les colis des parents, les photos un peu intimes de leur compagnon ou compagne, ils sourient tous. Je fais signe à Jorge que je les abandonne tout en restant visible. Il hoche la tête. Mon ami couvre mes arrières. Je m'assois dans le sable et fixe le papier que je tiens entre mes mains. L'écriture élégante de Karol, légèrement penchée, s'étale dessus. Je sais qu'il faut que je l'ouvre, mais je profite encore un instant de l'état d'ignorance et d'innocence dans lequel je me trouve. Peut-être que tout changera à la fin de ma lecture.
Je ne peux pas fuir plus longtemps la réalité. Mon cœur se serre. J'ai besoin de savoir ce qu'elle me dit. Lire ses mots, c'est comme l'avoir à mes côtés, et Karol me manque trop pour que je me passe d'elle plus longtemps. Je décachette l'enveloppe et en sort une liasse de papiers.
« Mi Amor.
J'espère que tout va bien de ton côté. Si tu savais comme tu me manques... Je voudrais sentir tes bras autour de moi, qui me sécurisent, et que tu poses ta main sur mon ventre, même si notre enfant ne remue pas encore. Je me sens tellement seule en ce moment... J'ai besoin de toi plus que jamais !
Mes parents ne sont toujours pas au courant. Je ne sais pas comment leur annoncer que leur petite fille, la prunelle de leurs yeux tout juste âgée de dix-huit ans, est enceinte ? Je n'ai pas les mots, et j'ai peur de leur réaction. Je tiens bon pour toi, grâce à la force que tu me procures, même à distance. Je voudrais que tu sois avec moi dans cette épreuve. Tout change, sauf ton absence.
Vendredi dernier, j'ai passé ma première échographie. Sans toi, je n'avais aucune main rassurante à serrer, et être seule, dans la salle d'attente du gynécologue, alors que des couples viennent s'assurer de la santé de leur bébé est terrible. J'ai l'impression que le monde entier me rappelle sans cesse que je suis sans toi. Pourtant, le médecin s'est montré prévenant. Un tout petit haricot grandit en moi, pas plus grand qu'une croquette ! J'ai pu entendre son petit cœur battre pour la première fois, tout au fond de mon ventre.
Quelle angoisse ! Je ne me rendais pas vraiment compte que la vie grandissait en moi avant cet instant, mais maintenant, je ne plus l'ignorer. Mon corps change, de même que mon humeur. J'ai des envies étranges, des nausées à toutes heures du jour et de la nuit et mon odorat est plus développé que jamais. Me rendre au lycée est un calvaire. Je peux sentir la nourriture du self depuis le bâtiment E ! Autant dire depuis l'autre bout de la cours ! Je n'en peux plus !
Je ne dors plus la nuit. Mes seins sont douloureux, mon dos m'élance et je suis épuisée. Parfois ,j'ai des étourdissements. Valentina est la seule au courant, pour une bêtise. J'ai laissé échappé le test quand je l'a fais, et depuis, nous nous sommes rapprochées toutes les deux. Elle est un soutien indéfectible en ton absence, et je suis contente de l'avoir à mes côtés. Elle me rassure et me protège, et m'assure que tu vas bien. Je sais que c'est égoïste, mais je veux que tu rentres, Mi Amor !
J'ai besoin de toi à mes côté ! Ta présence, tes conseils, ta peau contre la mienne... Tout ça me manque énormément. Sans toi, je me sens seule et démunie, alors que j'aimerai être aussi forte qu'en ta présence. S'il te plaît, donne-moi le courage de supporter tout ça jusqu'à ton retour. J'aimerais que tu me promettes d'être là pour l'accouchement. Je te veux à mes côtés !
Dis-moi, comment puis-je le dire à mes parents ? Ma mère a bien remarqué que quelque chose clochait, mais je lui fais croire que je suis malade. Une grosse grippe, peut-être une gastro... je fais de mon mieux, je sors mon plus beau jeu d'acteur pour la convaincre, mais elle n'est pas dupe. Je suis certaine qu'elle a déjà deviné, d'ailleurs. Elle doit seulement attendre que je lui en parle en premier. Ne comprend-t-elle pas à quel point c'est difficile ? Je ne trouve pas les mots, ni le bon moment, et pourtant, j'ai besoin de ma maman ! Je veux qu'elle me conseille sur la meilleure manière de refouler ces fichues nausées, et comment soulager mes ballonnements ! Bon sang, comme tout ça doit te paraître moche et hideux...
Je n'ai plus rien de sexy. J'ai commencé à prendre du poids. Pour le moment, ça ne se voit pas, mais la balance l'a remarqué. J'ai pris du poids, et ce que je te raconte ici doit t'effrayer à un point inimaginable. Comme tu dois être content d'être loin de moi en ce moment, et je le comprendrais, ne t'en fais pas ! Moi aussi je voudrais être à des milliers de kilomètres de cette jeune femme à l'humeur changeante que je ne reconnais pas. Sans toi, j'ai envie de tout arrêter, et que tout redevienne comme avant !
Je sais que ces lettres devaient te donner de l'espoir, et faire en sorte que tu ne te sentes pas mal, mais nous nous sommes jurés honnêteté et vérité, alors me voilà honnête, Ruggero. Je t'aime et tu me manques. J'ai besoin de toi pour supporter cette grossesse. J'angoisse. J'ai peur. Je te veux. Reviens, s'il te plaît.
Je t'aime.
Karolita. »
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Ecrit par AngieWings97
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Mi Amor
FanfictionTomber enceinte à 18 ans ne faisait pas vraiment partie des projets de Karol. En couple depuis six mois avec Ruggero, sa grossesse survenait au pire moment possible : quand son petit ami était en mission militaire. Comment va-t-il réagir en apprenan...