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On roula dans la campagne pendant un long moment. Il faisait froid, dehors il faisait blanc, et dans la voiture on ne parlait pas. Mes yeux étaient rivés sur la route, les tiens faisaient l'aller-retour entre tes mains et la fenêtre, mais on y était habitué. C'était comme ça depuis un bon moment déjà, et mes doigts se crispaient sur le volant. Mes jointures devenaient de plus en plus rouge, j'avais une grosse envie de pleurer.

Puis la voiture se stoppa.

Tu me regardas, surpris, et d'une petite voix tu pris la parole.

-Ji-...Jisung ?

-C'est pas moi.

-Le moteur ?

J'hocha simplement la tête, et tu soupiras lentement, désespéré.

-Ne t'inquiète pas Minho, on va s'en sortir.

Dans un élan de détresse, ma main gelée et rouge se posa sur la tienne, se voulant réconfortante, et tes yeux se posèrent sur cette alliance devenue inhabituelle.

Et puis on le senti.

Tu sais, ce truc qu'on fait de se parler sans les mots, juste avec les sentiments.

Nos cœurs battaient vite, comme au début et que tout allait bien. Doucement mais sûrement, nos yeux se sont rencontrés, et tout a fondu autour de nous. La neige devenait rouge, réconfortante, et une bouffée de chaleur me prit. Je me perdais dans tes yeux, Minho.

Je te regardais vraiment, pour la première fois depuis cette épopée, je te regardais vraiment. Tu m'avais terriblement manqué. Tes yeux vitreux, tes lèvres pleines et gercées, ta peau négligée, et les traces de tristesse sur tes joues, tout était de ma faute. Tu étais ma faute.

Et comme si un vent glacial était passé, notre contact se rompu, la neige réapparue, et ton beau visage disparu. Mon cœur se serra, mais je m'y résignai. De toute façon, c'était comme ça depuis un bon moment déjà.

J'aimerai tellement que tout redevienne comme avant...

-Jisung arrête de rêver, la police pourrait nous retrouver.

Au moins c'était clair. Rien ne pourrait jamais être comme avant.

On devrait sûrement se bouger et faire quelque chose, mais on restait bloqués sur nos sièges, les yeux perdus dans le vide et les mains jointes, comme si le temps s'était stoppé.

Et puis, il, est arrivé.

-Euh...Bonjour ?

J'avais tourné la tête lâchement, sans conviction, et j'avais croisé le regard d'un petit homme aux cheveux bruns, aux lunettes bien trop grosses, et aux yeux rieurs. Il avait les joues rouges et sentait le bonheur.

-Vous avez besoin d'aide ?

J'avais envie de crier que oui, qu'on avait terriblement besoin d'aide, qu'on avait le cœur brisé, qu'on était en train de sombrer dans un endroit terrifiant, qu'on risquait de mourir de peur, ici, dans cette vielle voiture bleue, au beau milieu d'une campagne blanche, poursuivis par la police. Mais je ne dis rien. Je me contentai d'hocher de la tête.

-Votre voiture ne démarre plus ?

Un autre hochement de tête.

-Vous êtes muets ?

-Non.

-C'est déjà ça...Bon, je n'habite pas très loin, est-ce que vous voulez passer à la maison le temps de réparer votre voiture ?

Je te lançai un regard, demandant ton approbation, et tu ferma les yeux.

Mon cœur rata un battement.

Avant, pendant les jours heureux, tu fermais les yeux quand je te posais une question, et tu me disais que ça voulait dire que tu me faisais aveuglément confiance. Et tu l'as refait aujourd'hui.

-Merci.

-Avec plaisir, au fait je m'appelle Seungmin. Et vous ?

-Jisung et Minho.

-Et pourquoi avez-vous l'air si mort, Jisung et Minho ?

-Parce qu'on a une mort sur la conscience.

Je l'avais dit. Et tu avais éclaté en sanglot.

ƇσмƒσятOù les histoires vivent. Découvrez maintenant